Timber Timbre : Sortir de l'ombre
Musique

Timber Timbre : Sortir de l’ombre

Encore méconnu du grand public, le groupe folk montréalais Timber Timbre bouleverse l’auditeur et lance Creep on Creepin’ on, un disque déjà inscrit sur nos listes de fin d’année.

S’il existait un pub six pieds sous terre, un bar pénard où les squelettes pourraient jouer au poker tout en descendant une bière à l’abri des termites, le phonographe y jouerait en boucle Creep on Creepin’ on. Quatrième production du trio montréalais Timber Timbre, l’album possède ce côté glauque caractéristique du chanteur Taylor Kirk, un Ontarien fraîchement débarqué au Québec.

Frêle gaillard à la tronche inquiétante, le compositeur couche sa voix gorgée de soul sur des musiques folk, blues et doo-wop dépouillées. L’atmosphère est singulière, poignante peu importe le contexte. Il suffit de 30 secondes d’écoute pour comprendre qu’on vient de basculer dans un univers sombre, certes, mais dont la mélancolie n’a rien d’écrasant. "C’est un peu comme l’atmosphère du film Corpse Bride (La mariée cadavérique) de Tim Burton, compare la multi-instrumentiste Mika Posen. Dans ce dessin animé, un personnage est amoureux d’une morte qui l’entraîne au pays des cadavres, un endroit nettement plus coloré et agréable que le monde des vivants où tout est gris et froid, particulièrement l’attitude des vivants face à leurs semblables."

Comme c’est le cas pour de nombreux disques écrits après qu’un groupe se fut lancé dans ses premières tournées mondiales majeures, le nouveau gravé est également inspiré par la route et par cette excitation que suscite la formation en Europe, au Canada et aux États-Unis. Capté au studio Treatment Room dans le Mile End ainsi que dans une église de Farnham convertie en studio par Arcade Fire, Creep on Creepin’ on aborde la perte de contrôle. "J’étais très excité par la réaction à Timber Timbre, mais se retrouver en tournée, au centre de l’attention, est sans doute la chose la moins naturelle pour moi, confie Taylor. C’est ce qui m’a le plus affecté pendant nos deux dernières années de concerts. J’ai expérimenté cette perte de contrôle qui semble inhérente au succès d’un artiste, même s’il reste marginal. Soudain, nos chansons ne nous appartiennent plus, et il devient plus difficile de mener sa carrière comme on l’entend. Ça m’a réellement obsédé au départ, et je cherche toujours à conserver les rênes de notre destinée. Au fond, je serais beaucoup plus heureux si je décidais de lâcher prise comme de nombreux musiciens, mais je n’y arrive pas. Pas encore."

À écouter si vous aimez /
Nick Cave, Bon Iver, Devendra Banhart