Peter Peter : Mater le spleen
Peter Peter nous offre une carte de visite lo-fi de luxe signée Howard Bilerman. Avec lui, l’artiste est sorti de sa zone de confort et a réussi une synthèse musicale judicieuse.
Lorsque le premier album de Peter Peter s’est fait entendre, plusieurs critiques semblent avoir eu de la difficulté à saisir la direction artistique de la production. La plupart se sont limités aux textes et au chant parfois relâché de l’auteur-compositeur-interprète, qui signe ici une première collaboration avec l’étiquette Audiogram (Karkwa, Alex Nevsky). Il est vrai que les thèmes abordés sur 11 des 12 chansons réunies sur ce disque homonyme (la pièce Dring Dring Pow Pow étant instrumentale) concernent la solitude (Rien ne nous ressemble), l’ivresse (Réfractaire) et les filles (Laurie). Sujets fréquents si on tend une oreille vers la bande FM…
Avec ce disque, c’est plutôt l’enveloppe musicale qui intrigue. Avec le réalisateur Howard Bilerman (Wolf Parade et Basia Bulat, qui collabore à l’enregistrement), Peter Peter a réussi à capter sur bande magnétique une attitude lo-fi qui lui tenait à coeur. "Au départ, j’étais sûr que l’album serait entièrement enregistré à la guitare acoustique, avoue-t-il. C’est Howard qui m’a convaincu de sortir la guitare électrique pour donner plus de relief. J’avais peur, j’ai tellement fait de la merde avec l’électrique quand j’étais jeune! Mais ce que j’aime du résultat, c’est que mes influences shoegaze sont revenues à la surface. Je suis resté un grand fan des Pixies, de Sonic Youth et de Nirvana, ça paraît. En fait, le concept de cet album, c’est qu’il n’y en a pas. Ce que je voulais, c’était donner l’impression qu’on avait accès à mes démos, à quelque chose de très personnel."
Pas une mince tâche quand on constate que l’artiste est signé sur une étiquette de disques qui a travaillé avec les Jean-Pierre Ferland, Paul Piché et autres Laurence Jalbert. Un constat qui a traversé l’esprit de l’artiste lorsqu’il a signé avec la compagnie après sa victoire, en 2008, au concours Ma première Place des Arts à Montréal. "J’ai toujours trouvé que plusieurs groupes francophones québécois avaient des productions trop peaufinées, souligne-t-il. Surtout pour les guitares électriques. Tout est toujours trop aseptisé, et c’est ce qui me faisait peur lorsqu’on a enregistré ce disque. Il y a aussi que je n’ai jamais vraiment écouté de la musique francophone. Le seul qui me vient en tête, c’est Jean Leloup."
Par contre, lorsqu’on lui parle du groupe allemand The Notwist, sa réaction ne se fait pas attendre. "Absolument, surtout l’album Neon Golden! Et j’adore aussi le disque Love Tara d’Eric’s Trip. J’aime les chansons courtes et simples, les pièces presque linéaires. Sur l’album, Demain, c’est l’heure correspond à ça. Je voulais qu’elle reste sur le même ton du début à la fin. Pas besoin d’arrangements raffinés ou d’un bridge trop élaboré." Même résultat pour Tergiverse, qu’il chante en duo avec Béatrice Martin (Coeur de pirate). "Cette chanson me tient à coeur et j’étais sûr qu’elle resterait guitare-voix. C’est la plus pop sur l’album, et l’idée d’un featuring ne m’emballait pas. Finalement, c’est bon! Et avec la voix de Béatrice, ça marche. Toujours grâce à Howard!"
À écouter si vous aimez /
Elliott Smith, Dumas, Jean Leloup