The Unsettlers : La mort vous va si bien
Le cirque macabre explosif de la troupe locale The Unsettlers.
On l’a souvent associé à la nouvelle scène folk anglo-montréalaise des Lake of Stew et autres United Steel Workers of Montreal, mais une fois qu’on l’a vu sur les planches, le macchabée dansant à 11 têtes The Unsettlers rappelle davantage feu Me, Mom & Morgentaler. Un Me, Mom & Morgentaler lugubre et composé d’enfants spirituels de Tom Waits plutôt que de skaphiles, soit, mais à l’esprit forain, éclaté étrangement similaire.
"C’est la taille du groupe qui nous vaut les comparaisons avec Lake of Stew et USWOM", blague le chanteur et guitariste Benjamin Brandes, alias Baltimore Washington Brandes, avant d’évoquer le bar du centre-ville Grumpy’s, qui a servi de point de rencontre aux trois formations. "J’y travaille, notre bassiste Ram (Krishnan) aussi et Gern des Steel Workers également. Lake of Stew sont des habitués des jams bluegrass du jeudi. Ce sont les premières personnes que nous avons rencontrées quand nous sommes arrivés à Montréal…"
Car oui, on a affaire à une autre bande d’expatriés. Originaires de Windsor, en Ontario, Brandes et le pianiste Dustyn Lucas sont d’abord passés par Vancouver, de 2003 à 2006, avant de transplanter leur projet naissant (démarré en 06 avec les chanteuses Brie Neilson et Genevieve Schreier) à Montréal où, selon Brandes, "les weirdos susceptibles d’aimer notre musique vivent". "On s’est donné une période d’essai d’un an et on est encore ici. Aucune intention de partir." Pas le choix puisque c’est ici que les sept autres parties de l’équation se sont ajoutées: Krishnan, l’accordéoniste Santosh Lalonde (aussi de Bad Uncle), le batteur D’Arcy Nichol, le clarinettiste Elie Jalbert, le tromboniste Eli Richards, la violoniste Laura Lee Officer et la contorsionniste (!) Andreane Leclerc.
Après une première sortie éponyme, en 2008, le clan lançait en novembre l’ambitieux Oil & Blood, album double qui, selon Brandes, a comme avantage sur son prédécesseur d’étaler les talents des différents compositeurs du groupe (alors que Brandes avait tout composé sur le premier). L’histoire qui semble se dessiner au fil de ces deux volumes n’est pas tout à fait un hasard, ni tout à fait une trame précise. "On a examiné les textes de tous les morceaux pour voir comment ils pourraient s’agencer et former une séquence cohérente, un peu à la manière d’un film", précise le ténébreux chanteur, poète depuis l’enfance.
C’est d’ailleurs à lui qu’on doit la couleur macabre des Unsettlers. À la suite du décès de plusieurs proches en 2004, il a orienté sa poésie vers le thème de la mort. "Ça semble morbide au premier abord, mais je cherche simplement à jeter un autre regard sur le sujet, que je vois davantage comme une célébration, un peu sur le principe du Día de los Muertos mexicain: fêter la vie au lieu de pleurer la mort", souligne-t-il, jurant que les membres de l’équipe n’ont rien de sinistre au quotidien. "À quoi sert-il d’être un artiste torturé puisque le bienfait de l’art est justement d’offrir une forme d’évasion?"
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