Junior Boys : Sauver mon âme
Musique

Junior Boys : Sauver mon âme

Au terme d’une crise existentielle, Junior Boys enfante d’It’s All True, un quatrième album à la fois grave et joyeux.

À l’époque où Jeremy Greenspan entreprit d’enregistrer It’s All True, nouvel album de Junior Boys, il décida, sur un coup de tête, de quitter son Hamilton, Ontario natal pendant deux mois pour vivre au coeur de la cité surpeuplée de Shanghai. "Ce qui m’a frappé, c’est que les références à la culture et à la vie en général sont complètement différentes. Et dans ce genre de voyage, tu apprends rapidement que tes petites obsessions sont futiles et grotesques. C’est la leçon qui m’a été la plus salvatrice", explique d’emblée le bidouilleur et cerveau du duo complété par Matthew Didemus.

Sur It’s All True, qui succède aux applaudis Begun Dull Care (2009) et So This Is Goodbye (2006), et qui regroupe une collection de gaillardes élucubrations électro baignées de pop et de r’n’b – sans doute ses plus accessibles en carrière -, Greenspan trace le portrait d’un homme en pleine réflexion sur sa vie et dont la confiance en soi se révèle malmenée. "À cette époque, je constatais que je vieillissais, je me voyais perdre cette magic touch… Je craignais plein de choses."

"Tu sais, quand ça va mal dans ta vie et que la seule chose qui te raccroche à celle-ci, c’est la musique, tu ne peux rien faire d’autre que de te jeter tête première dans ce genre de projet."

De ce doux abandon découlera l’adoption d’un ton manifestement intimiste qui, une fois couché sur les rythmes sucrés façonnés par Greenspan, assure à It’s All Good une jolie dichotomie d’ensemble. "Ce qui avait été auparavant subtil dans l’approche est devenu plus brutal, surtout quand j’ai fait état de mes émotions." La majorité des pièces, dont A Truly Happy Ending, dans laquelle Greenspan chante la folie et la peur de s’égarer, laissent volontairement frayer des propos chargés de spleen sur des rythmes qui portent à l’hédonisme. "C’est ce que le disco faisait à l’époque: traiter de trucs très sombres, de récession, de problèmes sociaux, sur des musiques qui affirmaient s’en foutre un peu. J’ose croire que cet album parvient à jouer sur ces deux niveaux de la même façon. Cette attitude de vouloir danser au travers du chaos, c’est ce à quoi j’aspirais avec It’s All True."

De toutes les vérités dévoilées sur le disque, laquelle risque le plus de résonner auprès de ses fans? En guise de réponse, Greenspan se contente d’un soupir et d’un souriant "Je ne sais pas." Il conclut l’entretien avec sérénité en affirmant: "Je ne crois pas que ce nouvel album va plaire à ceux qui ne connaissent pas les Junior Boys. Il faut une éducation préalable. Cela dit, je n’ai jamais eu la prétention de faire de la pop pour les radios."

À écouter si vous aimez /
Hot Chip, Cut Copy, Telefon Tel Aviv