GrimSkunk : Les noces de porcelaine
Musique

GrimSkunk : Les noces de porcelaine

Depuis maintenant deux décennies, GrimSkunk scande aux quatre vents ses intentions révolutionnaires, martelées par un rock pesant de plus en plus sophistiqué. Ouvrons l’album aux souvenirs en compagnie du chanteur, guitariste et leader Franz Schuller.

1991-1994: Les débuts

Album clé: GrimSkunk (1994)

Franz Schuller: "Ce band-là a commencé dans des nuages de fumée de pot. C’était des chums qui venaient de commencer le cégep, on était encore teenage, 18-19 ans. On a commencé à jammer pour le fun; c’était plus un trip de party et de libre expression à la base. Quand on a réécouté ce qu’on faisait, on s’est rendu compte que c’était pas mal bon. Les amis qui nous entouraient ont commencé à suivre le band dès le début. Alors, avant même de faire notre premier show, y’avait déjà 25 personnes dans notre local de répétition, avec les strobs, les caisses de bière. On sentait déjà cet esprit communautaire autour du band, de la musique. Ça a commencé "sur une gosse", comme on peut dire."

1995-1998: Sur la route

Album clé: Autumn Flowers Rerolled (1997)

Franz Schuller: "On avait une vision très internationale de notre band: indépendante, alternative, et, à l’époque, très marginale. Faut comprendre qu’à nos débuts, Nirvana n’était même pas connu. Au Canada et au Québec, il s’est créé une scène alternative, un peu en parallèle à ce qui se passait aux États-Unis avec Green Day et Offspring, qui sont passés d’un niveau très underground au sommet des palmarès. Pendant 10 ans, on a tourné énormément, à raison d’environ 150 shows par année dans 15 à 20 pays. GrimSkunk, au départ, a été un groupe de scène, ça s’inscrivait dans une logique purement naturelle et organique. Le problème pour nous, c’était plus de passer à la prochaine étape, celle qui différencie le band underground de celui qui est hot en ce moment même. C’est à force de retourner dans certains pays, comme en Allemagne, qu’on a réussi à se créer une fanbase, qui existe toujours aujourd’hui. La seule explication de ce succès, c’est la culture musicale des gens qui permet à GrimSkunk de les atteindre plus instantanément. On savait qu’on touchait les gens qui ÉCOUTAIENT la musique."

1999-2004: La consolidation, la vie

Album clé: Seventh Wave (2002)

Franz Schuller: "La tournée, ça a été notre vie pendant 20 ans. Mais entre les tournées, la vie arrive. Certains d’entre nous ont eu des enfants, ça a dédoublé les responsabilités et ralenti la progression du band. Pas que ce soit négatif, loin de là. À l’époque, Indica [maison de disques fondée en 1997 par la formation et qui héberge aujourd’hui Les Trois Accords et Vulgaires Machins] roulait de plus en plus; ça nous a permis de respirer un peu plus. La nature humaine étant ce qu’elle est, il y a un maximum d’idées qui vont émerger de ton cerveau dans un laps de temps donné. Seventh Wave n’a pas été particulièrement apprécié au Québec. C’est pas mon album préféré non plus, parce qu’on a raté la cible sur certains points. On était visiblement à court d’idées. Aussi, le gars qui a réalisé l’album [GGGarth] n’avait jamais vu le band en concert avant de le faire. Et ça, ça a été une gaffe."

2005-2010: Second souffle

Album clé: Fires Under the Road (2006)

Franz Schuller: "Quatre années séparent Seventh Wave et Fires Under the Road: faudrait faire des albums plus rapidement que ça. Malheureusement, on peut pas se le permettre. Mais, ça nous permet d’avoir beaucoup d’idées. L’arrivée de Vincent Peake [ancien membre de Groovy Aardvark] est venue nous donner un second souffle; il a amené une toute nouvelle énergie. Dans Fires…, il y a une certaine volonté de ne pas faire du reggae ou du ska. C’est peut-être pour ça qu’on s’est aventurés à faire des trucs un peu plus différents."

2011-…: À l’avenir!

Album clé: Titre à déterminer (2012)

Franz Schuller: "On a 50 idées de tounes. Je ne sais pas où ça va finir, mais on sait qu’on va certainement ramener quelque chose de reggae-ska à la The Clash. On va tenter de garder l’équilibre entre le fuzzé et l’acoustique du folk, quasiment worldbeat. J’espère qu’il va y avoir aussi quelques chansons en français, question de complémenter le reste, qui sera principalement anglophone. Éclectique est le mot à retenir."

"Je suis déçu de la musique d’aujourd’hui. Je ne suis pas convaincu que les années 2000 ont offert des trucs aussi substantiels que les années 90. Oui, ça a été une bonne période pour le local canadien: Alexisonfire, Billy Talent, et, au Québec, Les Trois Accords, Vulgaires Machins et Malajube, du moins, à leurs débuts."

"Pour l’international, on repassera. Les deux dernières années sont à se pitcher en bas d’un pont: c’est soit du shoegaze hipster à s’ouvrir les veines, assez mauvais d’ailleurs, soit du dance pop de wannabe Lady Gaga, qui est inécoutable quant à moi. J’ose espérer que la nouvelle décennie amènera plus de couilles, plus de personnalité et plus de propos engagés. Je suis désolé, quand j’écoute The National, j’entends rien. C’est bien fait, mais ce sont des mots lancés en l’air. Pis moi, je déteste ça."

À écouter si vous aimez /
System of a Down, Manu Chao, The Clash