Vic Vogel : Vieux bougon attachant
Musique

Vic Vogel : Vieux bougon attachant

Le Festi Jazz chauffe Mont-Tremblant jusqu’au 14 août. Brin de jasette avec son parrain, Vic Vogel.

Pardonnez le jeu de mots: le Festi Jazz Mont-Tremblant aurait difficilement pu trouver meilleur parrain que Vic Vogel, jazzman au look et au sourire de gentil mafieux (parrain… mafieux… capiche?). Un rôle que le vieux bougon attachant ne prend pas à la légère, se montrant très respectueux d’une certaine omerta. Essayez, pour voir, de connaître ce qu’il compte mettre au programme de son tour de piano. Rien à faire, le sacripant se tient coi. "Le pacing est totalement improvisé, assure-t-il. Si je veux, je peux niaiser pendant 12-15 minutes sur une toune. Tant que je la trouve intéressante, les gens vont la trouver intéressante. Je sais que le show est fini quand Bob [Pover, son gérant] me shine sa lampe de poche sur la gueule." Beau numéro de fildefériste, certes, mais d’une témérité toute relative quand on connaît ses standards sur le bout des doigts. Et quand on a des hommes de main comme Dave Gelfand (contrebasse), André Leroux (saxophone) et Ugo Di Vito (batterie) pour nous rattraper si on perd pied.

"En fait, la seule chose qui est immuable, poursuit-il, c’est qu’après l’entracte, je demande à la foule ce qu’elle veut entendre. Il y a toujours un ou deux niaiseux dont j’accepte les demandes spéciales. Mais je règle ça le plus vite possible. Surtout quand c’est des affaires comme Take Five."

Vous ne portez pas Dave Brubeck, le roi des signatures rythmiques insolites, dans votre coeur, monsieur Vogel? Vous saviez que le quatuor Fréquence Jazz consacrait un concert à son catalogue pendant le festival? "C’est un grand musicien, il a fait de belles choses. Le problème, c’est que son seul succès, c’est une crisse de toune en 5/4, composée par son saxophoniste. C’était dans les jukebox du monde entier. Pourquoi? Pour une seule raison, à mon avis. Parce que ça boite! Et les gens qui dansent, ils dansent mal, ils boitent. Comme il y a un beat de trop, c’est parfait."

Le Festi Jazz pourrait prendre rapidement des airs de party de famille vendredi soir alors que Dave Turner, saxophoniste au sein du Vic Vogel Big Band depuis 1979, précédera son mentor sur scène avec son propre quintette. Un clan tissé serré que celui de Vogel: "J’essaie d’inculquer la discipline aux gars qui viennent jouer dans mon band. Je ne veux surtout pas changer leur style. J’ai toujours composé et arrangé en gardant en tête le son de chacun. Les solos leur appartiennent. Quand ils quittent, je les jette. I don’t give an old coat to a new guy."

En plus des formations de Dan Thouin, d’Yves Léveillé et de Paulo Ramos, plusieurs spectacles-hommages (à Oscar Peterson, Cannonball Adderley, Gerry Soetermans) émaillent la programmation du FJMT. Quel genre d’hommage Vogel aimerait-il lui-même recevoir? Il se gratte la barbe blanche longuement. Puis, une grimace facétieuse découpe son visage. "Tant qu’on ne me donne pas une autre toile d’un peintre local. That’s what I need, another fucking painting? J’en ai plus de 200. Mes murs sont pleins. C’est assez, là!" Vieux bougon attachant, qu’on vous disait.

À voir si vous aimez /
Terry Gibbs, Zoot Sims, Dave Brubeck!