tUnE-yArDs : Construire la voix
Musique

tUnE-yArDs : Construire la voix

Avec son projet tUnE-yArDs, l’ex-Montréalaise Merrill Garbus propulse la voix humaine vers des limites insoupçonnées.

Surprenante est la réaction populaire et médiatique à Merrill Garbus – cette native de la Nouvelle-Angleterre un temps établie à Montréal – et à son projet tUnE-yArDs (un one-woman band devenu duo, puis récemment quatuor avec l’ajout de deux saxophistes). Partie de rien avec un premier album enregistré sur dictaphone, Garbus a récolté des ventes enviables ainsi qu’un accueil favorable de la presse mainstream (sans compter l’appui de grosses figures comme Yoko Ono ou The RZA) avec son second opus, le plus "hi-fi" w h o k i l l, lancé en avril.

Plus surprenante encore est la voix puissante et gutturale de la jeune femme, depuis repartie vivre en Californie avec son partenaire et bandmate Nate Brenner. "Ma voix n’a pas toujours été ainsi. Demande à ceux qui m’ont vue à Montréal!", commente Garbus alors découverte au sein du combo avant-gardiste Sister Suvi. "Quand j’ai commencé Sister avec Patrick Gregoire (NDLR: l’ex-Islands maintenant appelé Pat Jordache), nous chantions des chansons folk toutes délicates. Puis, nous avons fait des premières parties pour Islands, où soudainement j’avais à remplir de grands espaces avec ma voix. Dois-je ma voix à Nick Diamonds? Mon expérience de chant a cappella au collège a probablement joué un plus gros rôle…"

Fille de musiciens folk, touche-à-tout ayant trempé dans le théâtre et les marionnettes, Garbus répand son chant aux inflexions jazzy sur des rythmes spontanés, construits sur le moment via échantillonneur, puis joue avec les mots et les syllabes. "Beaucoup de chansons naissent d’improvisations avec une pédale à échantillonner, ou bien d’idées de rythmes qui me viennent quand je marche. La marche est un bon métronome pour jouer dans sa tête", décrit la demoiselle.

Sous une surface pétillante, sa musique est cependant hautement politisée, conscientisée, conséquence de l’attachement de Garbus à des courants aux résonnances sociales fortes, comme le jazz, le reggae et l’afrobeat. "La musique peut certainement divertir, mais je ne crois pas qu’elle ne puisse être que ça, témoigne-t-elle. Rien ne peut être dissocié de son contexte. Tout art est politique."

À voir si vous aimez /
Camille, Nina Simone, Fela Kuti, Talking Heads