Anika : Les deux minutes du peuple
Musique

Anika : Les deux minutes du peuple

Anika ramène la musique et la politique à l’échelle humaine.

On a bien failli ne pas la voir chez nous, l’auteure d’un des meilleurs albums de l’année (son opus homonyme est officiellement paru à l’automne 2010, mais a vraiment été découvert au début 2011). Le seul moment où sa première tournée nord-américaine pouvait passer par Montréal s’avère être le soir précis où s’arrête en ville le groupe de l’homme qui a réalisé son premier album, Portishead. C’est en effet Geoff Barrow et son (autre) groupe Beak> qui sont aux commandes musicales d’Anika, une passionnante expérience dup-punk.

Une première partie pour les géants de Bristol aurait été idéale, mais tant pour la chanteuse que pour son mentor, c’était non souhaitable. "Ça aurait créé trop de confusion entre les deux projets. À ce stade, on souhaite vraiment tous les deux les déconnecter. Ce sont deux projets différents, animés par des motifs bien distincts", explique Anika, en route vers un concert au New Jersey.

Qu’est-ce qui a bien pu motiver la jeune journaliste politique anglaise à délaisser une place confortable à la BBC pour se lancer dans l’arène artistique? "C’était un dilemme… Mais c’est une chance de pouvoir faire ce que je fais présentement. Et je crois que c’est une autre façon de pouvoir avoir une influence."

Anika ne signe que deux titres sur son album. Le reste est constitué de reprises méconnaissables de Bob Dylan, The Kinks, Yoko Ono, Skeeter Davis et autres piliers. "S’ancrer dans des références me semblait une bonne façon de me présenter. Et aussi, j’aime cette façon qu’avaient des gens comme Dylan ou les groupes de l’époque des compilations Nuggets de ramener les questions sociales et politiques dans le quotidien. La guerre contre le terrorisme a habitué les Occidentaux à voir la politique comme quelque chose de lointain. Depuis la récession, ça touche les gens de près. Ces chansons sont politisées, mais dans un contexte plus personnel."

Si elle ignorait tout des courants dub-punk cités sur son album ("Je suis née en 1987… On connaît toujours moins bien la décennie qui nous a précédé"), le son de l’album est pour elle un commentaire sur l’état actuel de la musique. "Les ravages de la téléréalité, le R&B et le hip-hop qui dépeignent une vie glamour qui n’a rien à voir avec la réalité… Mon album a des failles. Ça sonne cru, les notes ne sont pas toujours justes, mais on sent que ça a été fait par des êtres humains."

À voir si vous aimez /
The Slits, Nico, The Clash