Catherine Major : Au nom de la mère et de la fille
Musique

Catherine Major : Au nom de la mère et de la fille

La vie de Catherine Major a bien changé depuis la parution de l’acclamé Rose sang. Une transformation qui guide son troisième et nouvel album Le désert des solitudes.

Paru en 2008, le deuxième album de Catherine Major, Rose sang, a donné des ailes à la carrière de la chanteuse récipiendaire du prix Félix Leclerc et couronnée au Gala des Jutra pour sa trame sonore du film Le Ring d’Anaïs Barbeau-Lavalette. Mais au-delà de la reconnaissance de ses pairs qui lui a permis de gagner en confiance, c’est davantage sa rencontre avec le chanteur Moran et la naissance de leur fille Frédérique qui ont jeté les bases de Le désert des solitudes.

"Après avoir donné la vie, c’est comme si tout prenait une proportion différente. Les choses nous touchent tellement plus ou tellement moins. On apprend à relativiser. Ça me semble le fil conducteur de l’album."

Au centre d’un univers sonore délicat, une autre réalisation d’Alex McMahon qui rehausse le jeu de piano très cinématographique de Major, la chanteuse met en musique quelques textes personnels, mais aussi ceux de sa mère Jacinthe Dompierre, de l’auteur Christian Mistral (Saturne sans anneaux) et de son amoureux qui signe notamment la pièce titre et la magnifique Ourse: observations d’un amant qui épie sa belle endormie. "J’aime beaucoup comment Moran écrit. Ces textes sont complexes, truffés de belles images. Il faut toujours les lire à plusieurs reprises pour comprendre leur quadruple sens."

Si elle avoue mettre du temps à "trouver" une chanson, la quête musicale paye puisqu’émane du Désert des solitudes cette même force d’interprétation qui a fait la beauté de Rose sang. L’énoncé peut paraître cliché, mais Catherine Major vit ses chansons, leur conférant profondeur et grandeur d’âme. "Quand je reçois un texte où que je compose, il faut que je vibre, que j’aie un frisson. J’ai énormément de débuts de pièces que je ne termine pas. Elles ne sont pas nécessairement mauvaises, mais elles ne m’ont pas chavirée suffisamment pour que je les utilise. C’est pourquoi j’ai tendance à écrire mes textes sans aucune pudeur, quitte à me demander si je ne vais pas trop loin dans l’autobiographique."

La musicienne fait ici référence à Bien, un constat extrêmement sévère à son endroit écrit sous le coup de l’impulsion. Une thérapie ouverte qui a le mérite de ne jamais verser dans le pathos. "La naissance de ma fille m’a amenée à vivre les choses différemment, ne serait-ce que pour des raisons hormonales. Je me souviendrai toujours de ce jour-là. Nous étions au restaurant Moran et moi, ce qui ne nous arrivait pas souvent depuis la naissance de notre fille. J’étais hyper sensible et j’ai pété une coche pour aucune raison apparente. Je me suis levée. Je suis partie. J’ai laissé mon chum là, et j’ai marché je ne sais pas combien de kilomètres en plein hiver. Je me suis retrouvée ailleurs, dans un café où j’ai commandé un verre et écrit la chanson d’un trait. J’étais limite hystérique, mais ça m’a fait un bien fou. Cette chanson dans laquelle je fais état de mes faiblesses vaut un an de psychanalyse. Heureusement pour moi, mon chum ne l’a pas pris personnel. Il commence à me connaître. J’ai d’autres qualités, tu sais."

Catherine Major
Le Désert des solitudes
(Spectra Musique)