Mastodon : L’heure du Minotaure
Le succès, pour un groupe métal, est à double tranchant. Mastodon l’a constaté ces dernières années, ce qui ne l’empêche pas de n’en faire qu’à sa tête.
Le phénomène est paradoxal: les fans de métal veulent que leur groupe préféré connaisse du succès, mais pas trop, de crainte qu’il ne devienne trop accessible. Mastodon vit avec cette contradiction depuis la sortie de Blood Mountain sous étiquette Warner. Interrogé à ce sujet, le batteur et chanteur Brann Dailor ne nie pas que les fans de heavy métal sont passionnés, minutieux et très critiques par rapport à leur musique: "Ça nous oblige à rester à l’affût pour ne pas les décevoir, mais en même temps, on ne veut pas se décevoir nous-mêmes. Du coup, on a choisi de suivre notre coeur et de proposer des chansons qu’on aime vraiment. On n’a aucun contrôle sur le reste." Le raisonnement s’applique entre autres à Curl of the Burl, l’une des chansons les moins heavy de leur 5e album, The Hunter: "On l’a écrite en 15-20 minutes et on l’a laissée telle quelle parce que ça n’avait pas de sens de la complexifier en pensant aux attentes des gens", souligne Brann.
Pour le musicien, enregistrer un nouveau disque, c’est l’occasion d’essayer de nouvelles choses. "Je voulais que ma batterie sonne comme je l’imaginais: une version moderne de la batterie de Phil Collins sur l’album Duke. Sur Crack the Skye (2009), on s’était concentré sur les éléments progressifs, alors on voulait que The Hunter soit une bête à deux têtes, à la fois lourde et progressive", souligne-t-il, encore surpris d’avoir été contacté par le réalisateur Mike Elizondo (Eminem, Dr. Dre), qui voulait travailler avec eux: "On ne savait pas qu’il était un fan. C’est un gars curieux et instruit musicalement qui a joué dans des groupes thrash durant son adolescence. C’est aussi un talentueux bassiste. Quand on travaille sur un album pendant des mois, ça devient difficile de voir la forêt derrière l’arbre, alors ça prend une paire d’oreilles supplémentaire capable de donner une autre perspective. C’est ce que Mike a fait. Il était un peu comme un cheerleader. Il nous a encouragés et aidés à atteindre les objectifs qu’on s’était donnés", conclut Brann.