Jeunes musiciens du monde : Un monde idéal
L’organisme Jeunes musiciens du monde est en croissance et garde le cap depuis 10 ans. Parfois la musique peut changer le monde et les jeunes des quartiers populaires semblent lui donner raison.
Il y a de cela 10 ans, Jeunes musiciens du monde voyait le jour et ses deux fondateurs, Mathieu et Blaise Fortier, ouvraient une première école de musique en Inde, à Dharwad. Aujourd’hui, cette idée a fait du chemin, et l’organisme a fondé trois autres écoles au Québec: l’une au Patro Laval à Québec, une autre dans Hochelaga-Maisonneuve à Montréal et la toute dernière dans la communauté algonquine-anicinape de Kitcisakik en Abitibi-Témiscamingue. Tout ça sans compter l’organisme Famille Espoir, qui a décidé de se joindre à Jeunes musiciens du monde en empruntant son concept pédagogique pour ouvrir une école à Sherbrooke dans l’ancienne municipalité d’Ascot en janvier 2011.
Au-delà de la musique, toutes ces écoles partagent une même vocation, celle d’offrir à des jeunes qui vivent dans des milieux "populaires" la possibilité d’avoir accès à une activité parallèle de qualité. Une forme d’éveil musical pour combler certains vides dans leur quotidien, tant sur le plan social que scolaire. "On veut faire le pont entre la musique et leur milieu, leur proposer un contexte où ils ne seront pas jugés, nous explique Mathieu Fortier. Nos professeurs en musique sont des passionnés, et des intervenants sociaux comme Caroline (Hamelin, coordonnatrice du programme social à l’école de Québec) sont là pour accompagner ces jeunes et être à leur écoute. Tout ça, c’est pour favoriser leur développement."
"Dans chaque région, il y a des défis particuliers qui s’imposent, ajoute-t-il. À Montréal, c’est la lutte contre le décrochage. À Sherbrooke, c’est un quartier où l’on trouve beaucoup de nouveaux arrivants, alors l’organisme se concentre sur l’intégration des jeunes à l’école. Et à Kitcisakik, le but premier est de redonner une fierté à ces jeunes autochtones qui vivent dans une communauté défavorisée."
L’auteure-compositrice-interprète Chantal Archambault est d’ailleurs directrice de Jeunes musiciens du monde à Kitcisakik et y travaille depuis 2010. Formée en psychoéducation, elle nous explique le défi de taille qu’elle relève chaque semaine. "Cette communauté n’a pas l’électricité ni l’eau courante, ce sont des conditions de vie très difficiles. Depuis 2005, il y a maintenant une école primaire et les enfants n’ont plus à quitter la maison pendant une semaine pour aller à l’école à l’extérieur. On accompagne cette nouvelle école en offrant un programme d’activités musicales, et moi je m’attarde au développement personnel de ces jeunes qui vivent parfois avec des blessures profondes. Ils sont exposés à la violence, à la consommation (alcool, drogue)et à une certaine négligence familiale. On pourrait dire qu’ils sont en processus de guérison et qu’ils gardent la tête hors de l’eau."
La musique dans tout ça vient donc donner une forme de répit aux jeunes et contribue aussi au tissu social et à la vie de la communauté lorsque des concerts sont organisés au courant de l’année scolaire. Dans le cas de Kitcisakik, la musique autochtone se greffe au programme et les jeunes renouent ainsi avec une culture identitaire de plus en plus oubliée.
"On ajoute aussi un volet culturel, indique Chantal Archambault, par exemple une excursion dans le bois où les enfants vont confectionner un tambour autochtone. Il y a même des séances de yoga qui nous aident à gérer certains problèmes comportementaux. Ce sont des exercices qui nous permettent de les désamorcer et de faire en sorte que les jeunes soient disposés à recevoir un enseignement."
Or, la mission sociale de Jeunes musiciens du monde coûte de l’argent, et le spectacle-bénéfice de l’organisation est essentiel à sa survie et à sa croissance. Cette année encore, Yann Perreau en est le porte-parole et il montera sur scène en compagnie de plusieurs artistes, dont Chantal Archambault, Papagroove, Marco Calliari, Catherine Major, Marc Déry, Damien Robitaille ainsi que des élèves de Jeunes musiciens du monde. Dix ans, ça se fête!