Chloé Lacasse : La chanson espiègle
Grande gagnante des Francouvertes 2011, Chloé Lacasse passe à la prochaine étape, celle du premier album complet, de la première tournée. Détours et méandres ont beau être privilégiés dans sa musique, c’est assurément vers le haut que la trajectoire de la chanteuse se dirige.
"Mais y a mon coeur qui t’aime", chuchote Chloé Lacasse sur Je voudrais l’être, alors que les notes de piano finissent par se perdre dans ce silence qui suggère que la ballade de coeur émietté a pris fin. À la place, quelques nanosecondes plus tard, une variation instrumentale bercée par de somptueuses cordes se déploiera avec éclat, à la grande surprise de celui qui y porte oreille. "Ce bout instrumental a toujours existé dans Je voudrais l’être, soutient Lacasse, jointe à son appart montréalais. J’écoute beaucoup de musique minimaliste, qui part de rien et qui se termine en bourrasques; ça fait changement du trop concret, du plancher des vaches."
Chloé Lacasse, le premier album de l’auteure-compositrice, fait état d’une myriade de ces menus détails laissant, du coup, présager une Chloé espiègle, qui se plaît à surgir de nulle part dans le dos d’un copain, une femme qui voit en sa musique un terreau fertile.
"Je dirais que pour cet album-là, c’était un défi de revenir à la formule pop, du genre couplet-refrain-couplet, de commenter Lacasse. Je tentais de trouver le juste milieu entre quelque chose qui est pas trop déstabilisant pour l’oreille, mais qui expose une recherche quelconque."
Voir évoquera alors Tout va bien, premier simple qu’on aime qualifier de chanson-velcro, mais qui par sa structure cyclique s’amuse à faire un pied de nez aux conventions radiophoniques. "Tout va bien, j’ai vraiment failli la jeter. C’est un peu plus minimaliste dans l’écriture, et probablement le plus pop que je me suis permis d’être sur l’album."
Il fallait un big bang
Si le nom de Chloé Lacasse vagabondait çà et là depuis quelques mois grâce aux mini-albums lancés de façon indépendante, c’est lors des dernières Francouvertes que la chanteuse a connu "ce gros boom dont un artiste a besoin pour lancer sa carrière".
"C’est une aventure stressante, oui, mais ça se passe dans d’excellentes conditions. Pour moi, c’est lors des Francouvertes que tout est arrivé – pas mal en même temps."
C’est qu’entre-temps, elle entretenait son bronzage de studio, alors qu’elle passait le plus clair de ses journées en enregistrement avec Antoine Gratton, à qui la chanteuse avait confié la réalisation d’un EP de cinq chansons, "qui s’est métamorphosé en album complet avec l’arrivée de l’équipe de Vega", explique-t-elle. À propos de Gratton, Lacasse ne tarit pas d’éloges: "Ça a été génial. Antoine amène l’énergie du live au processus. Y a pas eu de temps mort, d’"écoeurantite". J’avais le goût d’oser, d’aller vers le "tout est permis", et Antoine est comme ça."
Ce qu’elle retiendra de cette magnifique tempête, soudaine mais souhaitée, qui s’est abattue sur sa carte du ciel en 2011: le soutien d’une équipe. "Sans équipe, tu finis par faire des milliers de choses qui ne sont pas de la musique, jusqu’à faire des affiches… Ça fait du bien de voir que je ne suis pas seule. Moi, ça me donne du temps pour me concentrer sur ce que j’aime. Et c’est pas apprendre les rudiments de Photoshop!" lance-t-elle dans un éclat de rire.
Celle qui sera à la marquise des Francofolies de Spa en Belgique cet été conclut: "Y a beaucoup de défrichage à faire, j’en suis bien consciente. On ne voulait pas faire quelque chose de précipité, et cette éthique de travail me plaît. Tsé, je ne vois pas cet album comme mon premier; mes mini-albums m’ont permis de prendre une chose à la fois, de franchir une marche après l’autre. Donc tout ça, c’est le cours normal des choses."