Laurence Hélie : L'apôtre
Musique

Laurence Hélie : L’apôtre

Laurence Hélie rallie les sceptiques aux charmes du  country.

Vous auriez prédit il y a 10 ans que la catégorie Album country du Gala de l’ADISQ – le prix remis par défaut à Georges Hamel depuis Mathusalem – serait non seulement la catégorie la plus substantielle de la soirée, mais qu’elle regrouperait les parutions les plus hip de l’année (Chantal Archambault, Les Frères Goyette, Tire le coyote, Isabeau et les chercheurs d’or), que l’on vous aurait ri à la figure. "Quand j’ai commencé à faire mon album, les gens me demandaient: "C’est quoi ton genre de musique?", et quand je répondais: "Folk-country", on me renvoyait des regards qui voulaient dire: "Es-tu certaine?"", se souvient Laurence Hélie, qui triomphait en octobre dernier de cette belle bande de nouveaux apôtres d’un genre jadis ringard pour repartir avec le Félix de l’album country de l’année, statuette qui lui permet d’encore entonner sur les routes enneigées du Québec les classiques instantanés (Kérosène, Plus je reste) de son premier disque, paru il y a bientôt deux ans.

Comment expliquer que toute une génération passe à la centrifugeuse Johnny Cash, Renée Martel et Neil Young, dépoussière Dobro et pedal steel au même moment? La jolie Hélie avance l’hypothèse d’un ressac, d’un haut-le-coeur induit par une overdose de productions artificielles. "Peut-être qu’on avait simplement besoin de faire de la musique avec du vrai monde! Il faut refuser de tout peaufiner à l’extrême. Neil Young n’est jamais tombé dans le panneau de recommencer huit fois le même mot en studio."

Craint-elle qu’il ne s’agisse que d’un effet de mode? "C’est sûr qu’il y en a une, on la voit, on la sent passer." Nos excuses à Andrée Watters, dont les oreilles ont peut-être cillé.

Comme du Britney Spears country

Sémillante ambassadrice de la résurgence d’une musique de proximité et de coeur qui gagne de plus en plus d’adeptes, Laurence Hélie n’a cependant rien d’une nouvelle convertie, elle qui connaît son Hank Williams sur le bout des doigts et avoue même, sans que l’on doive la torturer, raffoler de ce country-pop qui règne sur les ondes hertziennes au pays de Garth Brooks. "Tu sais, j’écoute de tout, hein, même du Ke$ha! Mais le country-pop, qui est regardé d’un oeil condescendant par plusieurs, ça me rend heureuse, tout simplement. Quand tu montes dans une auto et que tu entends ça, tu es obligé de mettre le volume dans le tapis. J’aime la production propre et parfaite aussi, c’est tellement loin de ce que je fais. Une toune comme Jesus, Take the Wheel de Carrie Underwood, c’est tellement over the top, c’est comme du Britney Spears country; je le dis sans connotation négative. Il y a un gars [Luke Bryan] qui chante [elle prend un trémolo nasillard] "Where I grew up, we rode in trucks". C’est fabuleux."

Mais soyez sans crainte, la musicienne pige dans un répertoire moins édulcoré et emphatique lorsque vient le temps de garnir son tour de chant de reprises. "Les gens me disent souvent: "Je n’écoutais pas de country avant." Et pourtant, quand je fais des tounes super country, ils aiment ça."