Vincent Gagnon : La sagesse au piano
Musique

Vincent Gagnon : La sagesse au piano

Vincent Gagnon compose en toute liberté et laisse à la musique le soin d’exprimer sa volonté. Le résultat: du jazz poétique qui respire la sagesse.

Depuis l’album Bleu cendre en 2009, le pianiste Vincent Gagnon se démarque sur la scène jazz avec une démarche musicale lyrique et poétique. Disons qu’il se détache du bassin des virtuoses du clavier en empruntant une direction artistique axée sur la mélodie et les thèmes polymorphes. Ce mordu de Chopin et de Billie Holiday ne raffole pas des prouesses techniques (même s’il maîtrise la touche contemporaine) et des grandes architectures musicales. Avec lui, une composition emprunte plutôt un souffle naturel où l’instrumentation et le dialogue entre les musiciens s’échafaudent dans un cadre de travail interactif.

Lorsque vient le temps pour lui de nous livrer les secrets de quelques-unes de ses compositions, le pianiste est réfléchi et affiche un calme énigmatique en parlant de sa discipline créative qui nous semble contemplative. Mais dès le départ, il met cartes sur table en nous avouant qu’il ne force pas les choses et qu’il se laisse plutôt guider par son instinct. "Si les idées ne viennent pas naturellement, alors je n’écris pas, indique-t-il. Je ne panique pas avec la composition. Cette musique, je dois la sentir et je veux qu’elle vienne de moi. Souvent, lorsque je fais des exercices de routine au piano, une succession de notes, trois ou quatre, devient le point de départ d’une idée. Avec la répétition, une mélodie apparaîtra et ça créera du sens avec le temps. Et si je ne compose pas, eh bien, je fais des spectacles et j’accompagne d’autres artistes."

C’est vrai que les projets se bousculent au portillon de l’artiste ces dernières années. Outre le jazz, il s’adonne à la chanson avec l’auteur-compositeur-interprète Keith Kouna, et les interprètes Annie Poulain et Paule-Andrée Cassidy ont, elles aussi, eu recours à ses services. En fait, alors que son deuxième album, Himalaya, vient tout juste de paraître, Vincent Gagnon retournera en studio avec Kouna dans les prochains mois (pour enregistrer deux albums) et accompagnera bientôt Paule-Andrée Cassidy en Amérique du Sud pour des concerts. "Il y a des périodes comme ça où tous les projets débloquent en même temps, et tu te retrouves avec de nouvelles échéances inscrites à ton agenda. C’est comme ça, alors tu t’ajustes!"

C’est la vie du musicien jazz, et pour les musiciens de son quintette, les projets parallèles sont tout aussi nombreux. En face d’Alain Boies (saxophones), Michel Côté (saxophones), Guillaume Bouchard (contrebasse) et du batteur Michel Lambert, Gagnon est ainsi aux commandes d’un groupe polyvalent qu’il dirige avec sagesse. "Je crois qu’il y a deux types de musiciens. Il y a ceux qui aiment travailler avec des indications précises et dans un cadre déterminé. Pour d’autres, ce qui compte, c’est de jouer. Ce quintette, c’est ça. Je connais bien ces musiciens et j’ai déjà une vague idée de la direction que prendra une composition. En studio, j’aime accorder une certaine liberté aux musiciens, comme si on jouait un blues. Il y a alors des zones d’interprétation qui apparaissent et c’est inspirant. Au préalable, mis à part les mélodies, rien n’est écrit. La direction artistique d’un projet comme Himalaya, elle s’impose dans l’exercice et avec le caractère des pièces."

Vincent Gagnon
Himalaya
(Effendi/Distribution Select)