Le facteur est toujours en retard : Au paradis des facteurs
Musique

Le facteur est toujours en retard : Au paradis des facteurs

Afin de souligner la disparition d’Henri-Louis Renaud, le légendaire "Facteur culturel", Les Poèmes animés honoreront sa mémoire avec le spectacle Le facteur est toujours en  retard.

Le 8 mars 2012, Henri-Louis Renaud, mieux connu comme le Facteur culturel, quittait ce monde. Véritable boulimique d’événements culturels, le Facteur aura assisté à un nombre incalculable de spectacles de toutes sortes. L’assiduité du personnage a été remarquée par le cinéaste Pierre Demers, et une histoire d’amitié a vu le jour à la suite de la réalisation d’un documentaire. "Quand j’ai fait un film sur lui en 2009, il y avait Pierre Dumont qui était en rémission de son cancer des poumons, et moi, je voulais absolument qu’on occupe Pierre, qu’il fasse quelque chose, se souvient Demers. Je lui ai donc demandé de faire la musique du film. Il était aussi dans le film. Comme Cocteau disait: "On filme toujours la mort au travail." Dans le fond, je filmais deux morts. Je ne m’en rendais pas compte. Mais la vraie raison, c’est que je voulais voir comment c’était dans la maison du Facteur (rires)."

Au dire de Demers, alors qu’il était enfant, Henri-Louis Renaud a été confiné dans sa chambre deux années durant après une grave pneumonie, avec comme seules fenêtres sur le monde une encyclopédie et Radio-Canada. C’est ainsi que sa passion pour la culture serait devenue grandiose. "Sa mère, qui était institutrice, lui a conseillé de faire comme son mari, de se trouver une job comme facteur. Comme ça, il passerait la journée à prendre l’air, à cracher comme il en aurait besoin et tout ça, sans jamais déranger personne. Toute sa vie, c’est ce qu’il a fait. C’était un marcheur et un voyageur devant l’éternel."

Levée du courrier

On meurt comme on a vécu, dit le proverbe. Logiquement, c’est en tant que membre du public que le Facteur a effectué son dernier tour de piste. "Il est mort à l’opéra. Il était allé voir Hernani de Verdi au cinéma de Jonquière. Ça faisait une couple de semaines qu’il souffrait d’une hémorragie interne et après le deuxième acte, une de ses amies a appelé l’ambulance. Il est décédé après une semaine à l’hôpital, mais dans les faits, il est mort en plein travail de spectateur."

En bon ami, Demers s’est rendu au chevet de Rousseau, et c’est ainsi que la genèse du spectacle Le facteur est toujours en retard a eu lieu. "À l’hôpital, ils l’appelaient le poète parce qu’il disait des affaires que les infirmières ne comprenaient pas. Il voulait faire rire tout le monde. On pensait tous qu’il allait ressortir… En parlant de la mort, il disait: "Si jamais ça m’arrive, j’aimerais ça un party au Côté-cour, comme pour Pierre Dumont, avec du calvados. Une belle fête avec plein de musique et de la danse." C’étaient ses dernières volontés."

Livraison exprès

Avec le spectacle Le facteur est toujours en retard, Les Poèmes animés honoreront la mémoire de Rousseau par l’entremise de plusieurs disciplines artistiques. À ce jour, de nombreux acteurs du milieu culturel de la région ont accepté de se joindre à l’événement. "Il va y avoir de 30 à 35 interventions de pas plus de cinq minutes chacune. Il y aura des courts métrages, des extraits de films, de la musique actuelle, de la musique classique et des comédiens qui joueront des extraits de pièces qu’il a déjà vues. On va faire comme d’habitude, on va l’attendre et lui préparer la table qu’il prenait toujours."

Lorsqu’on félicite Demers de se laisser porter par cet élan du coeur très émouvant, c’est avec humilité qu’il remet les choses en perspective. "Une des responsabilités des réalisateurs et de ceux qui écrivent, c’est de rendre compte de la mémoire."

Gageons que le public, lui, ne sera pas en retard.