Jipé Dalpé : Entêtement
Musique

Jipé Dalpé : Entêtement

Jipé Dalpé lance La tête en bois, un deuxième disque à la fois personnel et rassembleur.

Sur la planète musique, 2011 fut l’année du saxophone. De retour en force, le cuivre s’est retrouvé à jouer un rôle dominant dans les compositions d’artistes ultra respectables (Bon Iver, Feist…).

Et si 2012 était l’année de la trompette? Avec La tête en bois, Jipé Dalpé tente une brèche, et ce, de manière réfléchie. "Le côté festif des cuivres, moi, ça ne m’intéresse pas, nous rassure-t-il. C’est efficace, mais en chanson, mon approche est mélodique, lyrique. Sur le disque, je voulais que ce soit une ponctuation nuancée." D’ailleurs, lorsqu’un confrère musicien fait appel à lui pour ses talents de trompettiste, ce n’est jamais pour appuyer une salsa ou un boogie. "On m’appelle pour jouer smooth. Je suis plutôt du genre Chet Baker…"

Lors des dernières années, Jipé Dalpé fut aussi demandé pour ses talents d’auteur-compositeur. Après une faste récolte de prix dans les festivals de chanson et un premier opus (Les préliminaires, en 2008), il a brillamment réchauffé les planches pour des artistes d’ici qui lui ressemblent, comme Daniel Bélanger et Vincent Vallières (qui lui a fait cadeau d’une chanson, Faut qu’on fitte), mais on s’étonne qu’il ait fait la première partie de Miossec, mauvais garçon de la chanson française. "J’ai des amis français qui m’avaient parlé d’un festival, Musique en stock. J’y ai envoyé mon dossier, mon disque. Ils ont tripé, et je me suis retrouvé sur la grosse scène, à jouer avant Miossec. Bizarre, hein?"

L’anecdote souligne la détermination du chanteur à vivre de son métier. Si Miossec a un passé de noceur, Dalpé en a plutôt un de travailleur acharné; il est l’antithèse de la vedette instantanée. D’où La tête en bois, pour son entêtement. Sur le disque, on trouve des questionnements existentiels qui sont les siens. "J’avais le désir de parler très directement. Je ne voulais pas m’enfarger dans des images à l’emporte-pièce. J’ai privilégié le sens aux images. Je veux qu’on me comprenne", exprime-t-il, avant d’ajouter qu’il s’est imposé différentes retraites – dont une à Paris – pour faciliter le processus d’écriture.

"Pour moi, c’est un disque d’intégrité. J’avais le désir de préciser mon univers. J’étais toujours avec plein de monde, et je voulais revenir à l’essence, au pourquoi je fais de la musique. Qu’est-ce que j’aime? Qu’est-ce que j’écoute? Qu’est-ce qui me reste de toutes mes rencontres professionnelles? J’ai voulu faire un condensé de tout ça, dans le propos, la musique, les arrangements… Et même dans la réalisation, que j’ai faite avec Éloi Painchaud." Ensemble, ils ont établi un fil conducteur, mais avec quelques jolis noeuds, dont un ragtime sur Nadette, et un rock un peu plus carré sur Adèle. Et saluons les superpositions de voix qui peuvent rappeler Elliott Smith.

D’autres amitiés se manifestent de diverses façons sur La tête en bois: Gaële, Martin Léon, Antoine Gratton, Pierre Fortin, François Lafontaine (de Karkwa)… Jipé Dalpé le prouve: un trompettiste à la tête dure peut être un incroyable rassembleur.

Jipé Dalpé
La tête en bois
(Vega)
En magasin le 17 avril