Ale Dee : Le rap vous veut du bien
Entouré sur scène d’un guitariste, d’un batteur, d’un violoniste, de choristes et d’un DJ, Ale Dee diversifie son rap pour mieux vaincre les préjugés.
Originaire de Trois-Rivières, mais déménagé à Montréal il y a trois ans, Ale Dee incarne bien la propriété "Mini-Wheats" de la musique hip-hop. Rappeur réputé le soir, étudiant en charpenterie/menuiserie le jour, il mise autant sur l’urgence et la dureté de son chant rauque que sur l’aspect commercial de ses refrains destinés à élargir son auditoire. Mal dosé, le mélange donnerait la nausée, mais Alexandre Duhaime (son vrai nom) s’en tire sur 4 minutes de gloire, son quatrième album paru l’automne dernier.
"Ces refrains plus commerciaux sont de petits compromis acceptables parce qu’ils ne vont pas à l’encontre de ma personnalité, explique Ale Dee. Sur l’album, je chante une pièce en collaboration avec Jean-François Dubé, le chanteur de Noir Silence. Quand j’étais jeune, la pièce On jase de toi jouait partout et ça a marqué mon enfance. Pour moi, inviter Dubé est une manière d’ouvrir des portes et de montrer que t’as pas besoin d’être un yo à casquette pour aimer le rap."
Le tour de chant du rockeur n’est pas la seule pointe d’exotisme sur 4 minutes de gloire. On note aussi la présence accrue de violon, de guitare électrique et de vraies pistes de batterie; des instruments que l’on retrouvera aussi sur scène lors de la rentrée montréalaise d’Ale Dee. "Je n’avais pas envie de simplement appuyer "play" et "stop" sur un ordinateur. Le show est meilleur, et c’est aussi une manière d’ouvrir ma musique. Ces changements ont même une influence sur mes textes. Je n’écris pas de la même façon lorsqu’il y a de la guitare électrique sur une pièce. Je repousse mes limites et j’ai l’impression que mes textes y gagnent en profondeur autant que mes musiques."
Parfois critiques envers le milieu rap, les textes d’Ale Dee abordent l’adversité, l’amour, les désirs et les problèmes sociaux. Rien pour servir de munitions aux détracteurs du mouvement hip-hop, comme la Régie des alcools du Québec qui a récemment forcé quelques bars à ne plus organiser de soirées rap afin d’éviter les débordements. "Le véritable problème du rap au Québec, c’est sa diffusion. Le hip-hop local est boudé par la radio, la télévision et même la presse écrite. Pourtant, je ne fais pas l’apologie de la violence ou de la dope sur mon disque. Je n’ai aucune chanson là-dessus, mais j’ai une toune sur une peine d’amour par exemple. Est-ce qu’il y a quelque chose de plus universel qu’une peine d’amour? Les gens ont des préjugés envers le hip-hop parce qu’ils le connaissent mal. Et s’ils le connaissent mal, c’est que personne n’en parle, sauf quand une bataille éclate dans un concert. On est pris dans ce cercle vicieux. Il faut nous donner une chance."