Aline Morales / Festival des traditions du monde : Les tambours et l’amour
La suave chanteuse d’origine brésilienne Aline Morales tend avec amour un bouquet de fleurs et de tambours. Que demander de plus?
Se coller serré sous une doudou. Regarder des séries télé en rafales. Cuisiner des plats réconfortants. Voilà autant d’indispensables moyens de juguler les rudesses de cet hiver de force qui, plus que les Rocheuses ou Nickelback, façonne le quotidien canadien.
Façonne et accable, doudou ou pas, le quotidien de bien des immigrants comme Aline Morales, Brésilienne d’origine installée à Toronto depuis 2003. "L’hiver pour moi, c’est encore très, très difficile, avoue-t-elle en étouffant un rire de gamine timide. C’était encore plus difficile en 2010, parce que c’était la première fois que je ne retournais pas en visite au Brésil. M’enfermer dans un sous-sol pour enregistrer un album a beaucoup atténué mes blues parce que j’avais la tête occupée à travailler sur quelque chose que j’aime, la musique. Je le recommande à tout le monde: si vous vivez mal votre prochain hiver, faites un album!"
Le fruit de cette saison de cloisonnement volontaire, Flores, Tambores e Amores (littéralement: fleurs, tambours et amours) ne respire ni la féérie de la blanche saison, ni la dépression saisonnière. En nomination pour le Prix du meilleur album world de l’année lors de la plus récente édition des Junos, la première aventure en solo de Morales passe à la centrifugeuse jazz, funk, pop ainsi que différents sous-genres musicaux brésiliens – tropicália (courant 70’s aux effluves de psychédélisme et de kitsch), bossa-nova, samba et forró (une danse née dans le nord-est du pays) – afin d’en extraire une essence résolument ensoleillée, mais qui revendique néanmoins une certaine noirceur. D’où vient ce titre si suavement énigmatique? "Ce sont trois choses avec lesquelles j’entretiens un lien très intime. Les percussions ont été très jeune ma porte d’entrée sur le monde de la musique", explique la professeure de percussions et leader de la trentaine de membres du groupe Baque de Bamba, qui se donne régulièrement en spectacle aux Pedestrian Sundays du quartier multiculturel Kensington Market à Toronto.
Et l’amour dans tout ça? "C’est à cause de l’amour que j’ai quitté le Brésil, confie la chanteuse, toujours timide. Cette relation est aujourd’hui terminée, mais c’est grâce à l’amour que j’ai dû affronter l’obstacle que constitue l’apprentissage d’une nouvelle langue et le rapport à toute nouvelle culture."
Chaussure à son pied
Largement étrangère aux musiques pop occidentales, Morales s’est adjoint les services de David Arcus, son complément musical parfait, dit-elle, à la réalisation de son premier album. "Nous partageons un bagage commun, étant donné l’affection qu’a toujours portée David aux musiques brésiliennes en général. Nous avions d’abord un groupe d’interprétation de forró, avant que nous nous décidions à écrire nos propres chansons. Je pense que sa grande connaissance de la musique pop s’entend sur plusieurs morceaux."
Quelques secondes après le dernier morceau de Flores, Tambores e Amores, retentit la voix cristalline de petites filles, les nièces de Morales. "Je les ai enregistrées lors d’une visite chez ma soeur à Barcelone. Elles chantent une chanson pour enfants, Téia centopéia, qui raconte l’histoire d’un mille-pattes qui cherche ses chaussures. C’est le seul sujet à propos duquel David et moi nous sommes gentiment disputés. Lui ne voulait pas l’inclure, moi oui!"
En tout respect pour Arcus, donnons raison à Morales. Derrière l’indicible mignonnerie de cette comptine se profile un clin d’oeil exquis au parcours d’une Brésilienne qui, en s’installant au Canada, allait joliment trouver chaussure à son pied.
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Nos suggestions pour le Festival des traditions du monde
Voluntad
La bande de l’éblouissante Gwendolyn Rivera incarne l’idée même des musiques du monde, avec ses morceaux chantés en français autant qu’en espagnol et ses emprunts aux patrimoines rock et sud-américain.
Le 8 août à 20h sur la scène Desjardins
David Goudreault
Malgré son horaire de premier ministre et le recueil de poésie qu’il s’apprête à lancer cet automne aux Écrits des Forges, le slameur se paie du bon temps avec ses musiciens sur scène. Allusions à la crise étudiante et aux imminentes élections à prévoir.
Le 9 août à 17h au Bistro SAQ
Karim Saada
Un rendez-vous à ne pas manquer pour les joyeux membres de la diaspora maghrébine et leurs amis que ce passage du musicien algérien, artisan d’un métissage entre tradition et création.
Le 10 août à 12h30 au Carrefour multiculturel Loto-Québec, à 15h au Bistro SAQ et à 19h30 sur la scène Desjardins
Amanda Martinez
"Cette fille possède une grande sensibilité, du goût et, surtout, elle sait s’entourer", écrivait le collègue Ralph Boncy, la référence en musiques du monde, dans sa recension du plus récent album de la chanteuse torontoise, Amor, élégante profession de foi jazz latine.
Le 10 août à 21h30 sur la scène Desjardins
Delhi 2 Dublin
La formation vancouvéroise figure une improbable rencontre entre musique celtique et bhangra (un genre composite développé en Grande-Bretagne par des immigrants du Pendjab dans les années 80) où violon, tablas et sitar électrique font bon ménage.
Le 11 août à 22h sur la scène Desjardins et le 12 août à 16h sur la scène Loto-Québec