Rupa & The April Fishes : Éveil global
Rupa & The April Fishes subvertissent la langue de la finance afin de chanter l’éveil des opprimés de par le monde.
D’ici avril prochain, Rupa & The April Fishes auront sillonné l’Europe, pris du bon temps en Afrique du Sud et, au détour d’un arrêt en Indonésie, visité quelques temples balinais. Pour l’instant toutefois, Rupa prend son petit-déjeuner au beau milieu d’un pittoresque nulle part, entre Hartford, Connecticut et Arland, Delaware. Parce que c’est ce que la bande d’éternels nomades de San Francisco sait faire de mieux: aller vers le monde – partout, partout, partout – et abolir les frontières en touillant un mondialisant mélange de reggae, de ska, de chanson, de cumbia, de swing et d’une foule d’autres savoureux ingrédients. Montrer que la distance entre Hartford et Paris est moins importante qu’on pourrait le croire.
Contrairement à ses deux prédécesseurs, Extraordinary Rendition, qui faisait la part belle au français, et Este Mundo, essentiellement chanté dans la langue de Gabriel García Márquez, le troisième album de la formation, Build, s’approprie l’anglais, langue par excellence des affaires et de la finance, pour mieux la subvertir. "J’ai écrit les chansons en parcourant le monde, en tournée, pendant les trois dernières années. J’ai pu observer l’éveil des opprimés, des gens qui se sont levés pour contester les pouvoirs en place, qu’ils soient militaires ou économiques. J’ai écrit de la manière la plus simple et la plus directe possible en utilisant la langue de l’hégémonie", explique Rupa Marya, qui alternera entre le français et l’anglais pendant l’entretien.
N’allez pas cependant parler de printemps arabe ou d’Occupy Wall Street à la chanteuse; elle vous répliquera que ces étiquettes ne servent qu’à diviser. "Je préfère parler d’un éveil global, argue-t-elle. Compartimenter ainsi les choses, c’est faire l’impasse sur la réalité. Et la réalité, c’est que dans 100 ans, les gens vont dire: "Holy shit! Le monde s’est soulevé à cette époque." Il y a des milliers de gens dans les rues chaque semaine partout sur la planète: des membres des Premières Nations qui luttent pour la reconnaissance de leurs terres, des agriculteurs qui combattent les multinationales agroalimentaires, des étudiants québécois. Mais je refuse de décrire la réalité en termes d’affrontement, de lutte entre le 99% et le 1%, par exemple. Nous devons concentrer nos efforts sur la réconciliation, nous devons bâtir des structures pour vivre ensemble et cultiver les liens sociaux en nous soustrayant au pouvoir des oppresseurs, que je ne veux surtout pas démoniser."
La musique aurait indéniablement un rôle à jouer dans l’éveil des consciences, affirme Rupa. "Je racontais récemment aux membres du groupe comment la chanson Cortez the Killer de Neil Young m’avait ouvert les yeux quand je l’ai entendue pour la première fois à 11 ou 12 ans. Jusque-là, pour moi, Cortez [un mythique conquistador espagnol] était un héros admirable en tous points. Je n’avais jamais pensé qu’il était aussi un tueur. J’ai commencé à remettre en question ce que j’apprenais à l’école à partir de ce moment-là."
ESTRIE
Le 28 septembre à 20h
Au Théâtre Centennial
QUÉBEC
Le 27 septembre à 20h
Au Petit Champlain