Yann Perreau : Le fou et la bête
Musique

Yann Perreau : Le fou et la bête

Sur À genoux dans le désir, la poésie de Claude Péloquin rencontre l’univers musical de Yann Perreau.

Un album inspiré de textes de Claude Péloquin et bonifié de la crème des chanteuses québécoises; bien que Yann Perreau réfute avec énergie l’étiquette «disque de duos», il ne bronche toutefois pas à l’idée d’avoir finalement livré un «album-concept». «Oui, mais ce n’était pas voulu. Ça s’est fait naturellement et amicalement», justifie-t-il avant de se lancer dans la genèse d’À genoux dans le désir.

Un enterrement et un mariage

La collaboration entre Perreau et Péloquin (enfant terrible de la poésie québécoise à qui l’on doit, notamment, Monsieur l’Indien, le Lindberg de Charlebois et Forestier ainsi que le fameux «Vous êtes pas écoeurés de mourir, bande de caves! C’est assez!» de la murale de Jordi Bonet) remonte à une rencontre fortuite dans une galerie d’art. «Gilles Gagné, un autre de mes vieux potes qui est récemment décédé, nous a présentés. J’étais devant lui, face à la légende, et Claude a déposé sa main sur mon épaule et m’a dit: «Je suis content de finalement te rencontrer!»", se rappelle Yann avant d’ajouter que l’auteur a indiqué qu’il aimerait lui confier des textes. La semaine suivante, Perreau recevait un paquet contenant 300 pages signées par Péloquin.

Deux années plus tard, Perreau fait le deuil de son père sur scène et l’idée d’étirer son spleen jusqu’au studio ne lui plaît guère. «Ma vie allait bien, mais ce que je signais était vraiment sombre», glisse-t-il au passage. Il s’est donc replongé dans les textes de Péloquin pour s’inspirer. Ce qui devait tout d’abord être un simple maxi s’est rapidement transformé en album, fruit d’une nouvelle union entre une bête de scène et «un fou, un vrai» – pour reprendre les mots du chanteur – qui est toujours bien en verve.

«Le titre de travail était «Perreau chante Péloquin», explique Yann, mais c’est bien plus que ça. Claude m’a donné la liberté de jouer dans ses textes et c’est ce que j’ai fait, sans dénaturer son oeuvre. Du même coup, ce disque-là m’a aussi permis d’aller au bout de «ma recherche musicale ». On y retrouve autant des tounes roots que des chansons plus léchées.» Des pièces chargées qui profitent aussi de la présence de nombreuses chanteuses de talent dont Salomé Leclerc, Marie-Pierre Arthur et Lisa LeBlanc.

Patrimoine vivant

Bien que Péloquin ait fait tout un cadeau à Perreau en lui offrant sa poésie, ce dernier le lui rend bien avec À genoux dans le désir, une oeuvre qui pourrait bien faire découvrir les strophes du poète maudit à une nouvelle génération. «Je suis content de le faire connaître. Les gens de mon âge le connaissent peu, même si c’est un mythe. On a chanté Miron et y est mort. On chante tout le temps ceux qui sont morts!» lance celui qui, on se rappellera, a aussi participé à 12 hommes rapaillés, un projet qui aura remis Gaston Miron en valeur. «Péloquin, lui, y est toujours vivant. Allez sur la rue Prince-Arthur à Montréal, vous le verrez là!»