Suuns : Voyage dans le temps
Galvanisé par l’accueil favorable réservé à Images du futur, son second album, le groupe indie rock montréalais Suuns s’apprête à reprendre la route après un arrêt local.
Tout comme ses compères, Ben Shemie revient de loin, très loin même. Après une tournée interminable – «Suuns a donné plus de 150 concerts au cours de l’année 2011!», spécifiera-t-il – et des critiques élogieuses (autant ici qu’ailleurs) du premier jalon Zeroes QC, on retrouve une formule plus aguerrie du quatuor.
Malgré l’expérience acquise, le guitariste et chanteur demeure désarmant de candeur en entrevue. «On joue vraiment mal à Montréal, d’habitude!», lance-t-il à l’autre bout du fil. La bande se dirigeant à Toronto pour un spectacle-vitrine, le tintement du clignotant de la camionnette rangée sur l’accotement ponctue ses propos, tel un métronome. «L’ambiance est différente ici. On a l’impression de jouer uniquement devant nos amis et nos familles. D’un côté, c’est stressant, mais de l’autre, ça ne semble pas relever d’un show normal.»
Alors que les aspects ludique et professionnel s’entremêlent, la mise en scène, elle, se retrouve particulièrement sublimée par l’imagerie évoquée par la nouvelle œuvre. «Mais ça demeure un moment excitant pour nous! On a investi pas mal dans la production de ce spectacle afin de le rendre “spécial”. Le visuel projeté pendant le show est pas mal cool!»
La perte de l’innocence
Trois ans après Zeroes QC, donc, Suuns a appris de ses erreurs, parcouru les salles de spectacle des deux côtés de la mare – le groupe a même été invité au festival Sonic City de Belgique, en décembre dernier, à titre d’artiste et de commissaire –, en plus de s’aventurer dans les dédales de l’industrie du disque. «On voit les choses différemment, tranche Shemie. On a goûté à l’industrie du disque et on a vu ses rouages. Ce qui est bien, car on s’est préparé en conséquence, mais aussi merdique, car on devient vite blasé de cet aspect!»
Heureusement, le temps passé en studio et sous les projecteurs, lui, demeure précieux pour le collectif. «Pour ce second disque, l’atmosphère était tout autre», commente l’interprète, laissant entendre que le vase clos de la troupe n’était pas si étanche à l’époque de la création d’Images du futur. «Les gens avaient maintenant un contexte, donc des attentes. De notre côté, nous sommes devenus un groupe un peu moins “naïf” – ce qui est quand même malheureux –, en plus de prendre de l’expérience.»
Sans retour dans le temps pour échafauder une refonte de Zeroes, Ben Shemie explique que la nouvelle création découle tout de même de l’œuvre initiale. «Le premier album est très punk, très rapide et très “laisser-aller”. Ce qui était très bien, mais on ne voulait pas refaire la même œuvre, disons. Du même coup, je ne dirais pas qu’on s’est amélioré, mais on a quand même pris du galon, alors on s’est mis à développer notre identité et à approfondir ce son, en plus d’accorder une plus grande attention aux détails afin d’éviter les regrets. C’est donc un album sans compromis.»