David Usher : Monsieur créativité
David Usher n’a qu’un mot à la bouche: créativité. Discussion avec un francophile qui, afin de s’inscrire dans la durée, tutoie l’inconnu.
Songs from the Last Day on Earth (Chansons d’un dernier jour sur Terre). C’est le titre du plus récent album de David Usher, son huitième. Un titre à haute teneur tragique, auquel le chanteur songea pour la première fois sous les lampadaires, en fendant l’air doux d’une nuit magique pourtant tout sauf tragique. «L’été, il arrive que mes amis et moi roulions sur nos vélos dans les rues de Montréal, à la belle étoile, en buvant un peu de vin, raconte-t-il. Ce sont des moments qui nous ramènent à la liberté de l’enfance. C’est important de parfois renouer avec ce sentiment-là quand tu vieillis et que tu as des enfants toi-même.»
Il faudrait donc entretenir une discussion féconde avec le gamin en soi, celui qui tient les rênes de notre sens de la créativité, dit Usher en détachant bien chacune des syllabes de «créativité», un mot qui revient souvent pendant la discussion avec ce fondateur d’une boîte de… créativité (!), CloudID Creativity Labs (active dans le domaine du Web, entre autres). C’est d’ailleurs sous la bannière CloudID Creativity Labs que le chanteur désormais établi à Montréal prononce devant des parterres remplis de gens d’affaires suspendus à ses lèvres des conférences sur le sujet (voir le beau gosse du rock alterno canadien s’adresser à une assemblée de vestons-cravates tient de l’expérience surréaliste, rendez-vous au cloudid.com). «Je suis chanceux: en tant que musicien, je suis constamment au cœur du processus créatif. Ce qu’on dit peu, c’est que la créativité doit faire partie du quotidien de tout le monde, pense le plus débonnaire des Jean-Marc Chaput. La créativité, c’est entre autres être capable de renouer avec cette partie de notre cerveau qui est très sollicitée pendant l’enfance, celle qui est curieuse du monde et qui est excitée devant la nouveauté et l’inconnu.»
En français
Pour David Usher, l’inconnu revêtait jusqu’à tout récemment la couleur du français, une langue que ses filles apprennent à la petite école, mais qu’il ne parle pour sa part encore qu’à tâtons, ce qui ne l’empêche pas de se l’approprier sur disque, avec un enthousiasme renouvelé depuis le succès radiophonique Je repars (en duo avec Marie-Mai). «Chanter dans une langue étrangère était terrifiant pour moi au départ et je voulais le faire précisément parce que ça me terrifiait. C’est un défi considérable. J’aime chanter en français, parce que les mots sonnent différemment, mais je suis toujours sur la corde raide parce que j’oublie souvent mes paroles. En anglais, je peux me permettre d’improviser, en français, j’en suis incapable.»
Sur scène, David Usher promet un spectacle bien rock, avec emprunts à la période Moist. Dernière question pour les fans de la première heure: Que cherchais-tu à faire, David, en agrippant à deux mains la tête de ton collègue Mark Makoway dans le clip du hit de 1994 Push (un détour par YouTube s’impose si vous ne savez pas de quoi il est question). Il rigole: «Sérieusement, man, j’en ai aucune idée.» Les voies de la créativité sont parfois impénétrables.