Groenland : La quête
La formation indie pop montréalaise Groenland réalise des rêves particuliers en dévoilant The Chase, son premier album.
Alors qu’un vent glacial balayait la ville, Sabrina Halde et Jean-Vivier Lévesque, respectivement chanteuse et «chef d’orchestre» de Groenland, se tenaient au chaud dans un café de Montréal où ils enchaîneraient les entrevues. «T’es le sixième», lance-t-elle, enthousiaste. «Mais ça va. C’est plus amusant qu’on pensait», précise-t-il, partageant le sourire aux lèvres de sa collègue, tout comme son regard mi-amusé, mi-obnubilé par la situation: deux jeunes musiciens – l’une ambitieuse, l’autre ayant envisagé un changement de carrière – qui doivent se raconter.
De duo électro à sextuor orchestral
«C’était un peu boring!», glisse Halde en abordant la première mouture du projet: un duo électro inspiré par les bidouillages en solo de Thom Yorke. «Mais ce n’était qu’un point de départ», précisera-t-elle. La paire a ensuite recruté Jonathan Charette, frère d’armes de Lévesque au sein du quintette indie rock Le Roi Poisson (on y reviendra), qui s’est installé derrière les percussions. «Avec tous nos contacts de l’université, on s’est dit: “On essaie-tu d’être fous?” Au fil des courriels, La Pieuvre – première appellation du groupe – a donc grossi ses rangs, changé de nom et flirté avec un nouveau genre de prédilection: la pop orchestrale chantée en anglais à mi-chemin entre l’exubérance d’Edward Sharpe & The Magnetic Zeros et l’ambition d’Arcade Fire, auquel – ville d’adoption et instruments à cordes obligent – Groenland est déjà comparé sur certains blogues.
«Je ne suis pas surpris», rétorque Jean-Vivier lorsqu’on lui rapporte ces rapprochements. «C’est vrai qu’on en écoute, mais je ne crois pas qu’on leur ressemble, poursuivra-t-il. C’est mieux qu’à l’époque du Roi Poisson où on nous comparait à Karkwa et Malajube. On aimait beaucoup ces groupes, mais tout ce que ces orchestres-là ont en commun, c’est un gars qui joue des claviers!»
S’éloigner de soi
Aussi, l’interprète et principale parolière de la troupe envisage l’écriture de façon instinctive et imagée. Un processus qui pourrait également expliquer que, malgré le fait que Groenland rassemble des musiciens francophones, les strophes sont posées sur papier en anglais. «Je n’ai jamais été portée à écrire en français», indique-t-elle, avant de revenir sur sa formation en chant jazz où les standards dans la langue de Shakespeare étaient de mise. «Peut-être, aussi, que c’est parce que ç’aurait été trop près de moi sinon?», s’interrogera-t-elle un peu plus tard.
Plus Brel que Jonas comme quête
«Ça fait longtemps qu’on le cherche», lance l’interprète en faisant référence à la “quête” – sonore et identitaire – derrière The Chase. Son compère prend la relève: «On ne peut pas expliquer ce qui nous a poussés à devenir musiciens. Déjà que c’est un plan foireux…» Il s’esclaffe, puis s’explique: «C’est aller contre vents et marées, en plus de marcher à tâtons.» Autrefois membre du Roi Poisson, un collectif associé à la mouvance Sherbrooklyn qui rendait l’âme l’année passée, Lévesque profite d’un nouveau départ avec Groenland. «Ça m’a fait vraiment chier», crache-t-il en revenant sur son deuil. «Je voulais faire de la musique. J’en étais désespéré. Ça ne marchait pas, t’sais. Puis, ce projet-là est venu à un moment où j’étais en paix avec ça. C’est donc une nouvelle game pour moi!»
The Chase
(Bonsound)
Présentement dans les bacs