Alexi Murdoch : Celui qui prend son temps
Après une saucette estivale l’an dernier, il fallait, pour Alexi Murdoch, un second rendez-vous avec le public québécois. Chose à laquelle l’auteur-compositeur écossais s’apprête à remédier.
Quand on annonce une tournée d’un artiste étranger dans la Belle Province, on s’attend habituellement à ce que celui-ci ait un nouvel album à faire mousser, de nouvelles chansons à casser. Or, pour l’Écossais Alexi Murdoch – auteur-compositeur qui s’est présenté à nous l’an dernier par une sublime première partie pour les Barr Brothers dans le cadre du Festival de jazz de Montréal –, il en va tout autrement. Joint par téléphone à sa résidence en Écosse, il explique sa démarche: «Je suis conscient que mon dernier album date de tout près de deux ans. Mais je ne tourne pas beaucoup; c’est moi qui en ai décidé ainsi. Je ne vois pas l’intérêt de partir six mois à travers le monde pour chanter mes chansons. Je choisis quand. Je choisis où.»
Pas besoin, donc, de lui demander s’il use de stratagèmes pour garder les compositions de Towards the Sun (2011) excitantes. «Ces chansons sont toujours aussi pertinentes. Et parfois, il arrive que la chanson dévoile sa vraie nature après plusieurs années. Parce qu’on n’est pas entièrement à l’aise avec ses vrais enjeux; parce qu’on ne se doutait pas de ce qu’elle voulait vraiment dire.»
Il ajoute que cette virée québécoise sera l’occasion pour lui de faire plus ample connaissance avec les musiciens dont il a fait la rencontre l’an dernier. «Je vais d’ailleurs en profiter pour enregistrer quelques trucs avec l’un d’entre eux», explique-t-il.
Sachant que Towards the Sun a été enregistré en 24 heures dans un studio de Vancouver, on peut s’attendre à ce que le folkman soit tout aussi prolifique. Surtout quand on connaît le nom de celui avec qui il collaborera, Andrew Barr. «C’est avec Andrew [qui l’accompagnera d’ailleurs sur scène] que je vais m’enfermer quelques jours à la suite de la tournée. Je n’ai pas vraiment de plans quant à ce qui va en ressortir, mais bon… On verra bien! Ce sera amusant.»
Troubadour dans l’âme
«Le terme "romantique" a été galvaudé par cette notion plus commerciale: les fleurs, les boîtes de chocolats… D’un point de vue poétique, et dans mon écriture, je peux me considérer comme romantique», explique le chanteur quand vient le temps d’évoquer ce qui l’inspire.
Il poursuit: «Il faut voir au-delà de cette pollution. Il ne faut pas être mal à l’aise parce que c’est plus hip et cool de se foutre de tout, d’être détaché de ce qui nous entoure. Il est devenu mal vu d’exprimer de l’empathie ou des sentiments envers une situation ou une personne. Comme si cela révélait des signes de faiblesse, que l’on s’était fait avoir par une gimmick mercantile.»
Choses que Murdoch, tant par ses choix artistiques que par la façon dont il mène sa carrière, semble éviter avec grand soin. Il pourrait incarner l’archétype de l’artiste indé: «C’est pas que j’aie des idéaux plus importants que les autres, c’est juste que quand des offres me sont passées sous le nez, que ce soit des contrats ou des engagements auprès de labels en particulier, je n’y ai jamais vu une option viable. L’industrie, ou peu importe comment on l’appelle, est à l’extrême opposé de qui je suis. Je suis conscient que ce que je fais se retrouvera sur les mêmes tablettes que les autres, sur le même portail de téléchargement que les autres. Au final, je veux rester à l’aise dans ce que je fais, et c’est le processus que j’ai choisi.» Il conclut, après une longue pause: «Elle est trop courte, la vie, pour gaspiller ne serait-ce qu’une minute à faire ce qui est contre nature.»