Francis Mineau / Oothèque : L’éclosion
Francis Mineau passe de la batterie au micro avec Oothèque.
Des mois après le début de la sabbatique que Malajube s’impose, un des membres du bataillon dévoile finalement une première parution: un premier album homonyme pour Oothèque, création de Francis Mineau. «Je ne voulais pas le présenter comme un projet solo ou encore me présenter comme un auteur-compositeur-interprète derrière une guitare sèche et un micro», confie le principal intéressé en abordant l’importance du nom de plume derrière sa nouvelle aventure. «Je ne voulais pas que ce soit présenté comme étant “des chansons d’un chansonnier”, mais bien comme un tout. Ça rejoint l’idée littérale de l’oothèque: un ensemble de petits ensembles. Un tout qui se tient, mais sans rien mettre de l’avant… car j’ai eu autant de fun à la guitare qu’au drum et aux paroles!» L’idée imagée du fameux terme, elle, aura inspiré le son du violon d’Ingres.
L’organique et le technique
Avant d’être un projet musical hétéroclite, une oothèque se veut une membrane rigide protégeant les œufs de certains mollusques et insectes lors de la ponte. Mais avant d’apprendre la définition du mot, c’est sa calligraphie qui aura séduit Mineau. «Deux “o” ensemble, c’est déjà peu commun, fait-il valoir, et ça fait charnel, féminin à la limite. Puis les lignes droites – l’opposé du début – embarquent à la fin du mot.» Plus tard, le chanteur et multi-instrumentiste fera valoir que le tracé du mot s’appliquait aussi à sa recherche musicale. «Je voulais mettre de l’avant une facette plus “nature” – avec guitare acoustique, piano, etc. – et une autre plus “technique”, car je voulais aussi utiliser des samplings, une beatbox, etc. C’était ça, l’idée de départ: faire un disque qui ne soit pas que synthétique ou folk acoustique. Je voulais que les deux cohabitent et trouver quelque chose d’intéressant à faire avec ça.»
L’essence du disque
Oothèque est en incubation chez Francis Mineau depuis 2011, l’idée ayant pris racine alors que Malajube terminait l’enregistrement de La caverne, son quatrième album. «Ce n’était pas un plan à la “OK! Malajube fait une pause? Vite! Je dois me trouver quelque chose!”, assure-t-il. À un moment donné, j’ai eu le désir de faire un disque, dans l’essence la plus pure, la plus simple et la plus romantique du terme.» Composer des chansons et les enregistrer, quoi. «Je pensais que c’était possible de faire un disque… puis de le laisser aller dans le monde!»
L’artiste s’est donc mis au travail, fabriquant ses pièces sans pression, sans être convaincu qu’il allait les endisquer… ou qu’il les écrivait. «Maintenant, j’écoute les paroles et je me dis: “OK. Est-ce vraiment moi qui les ai écrites?”», glisse-t-il, amusé, revenant notamment sur le cas de Robothérapie, troisième pièce de l’album bardée d’allégories. «Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est de l’écriture automatique, mais c’est quand même l’idée derrière», indique-t-il en pointant des strophes comme «L’effet fantôme que tu me fais / Ne dort jamais, il brûle dans mon lit». «Ça suggère plein d’images!», enchaîne-t-il.
Malgré des textes fastes en images, mais aussi en styles (Portrait d’une panthère, par exemple, siérait autant à un concert qu’à un monologue au théâtre) et en références (on mentionne Hegel et Kant dans FM ainsi que Kuala Lumpur dans la chanson du même titre), Mineau préfère défendre le côté distractif de ses compositions en entrevue. «Il y a quand même un aspect ludique à ma musique, déclare-t-il. Ce ne sont pas des chansons drôles, mais il ne faut pas trop se prendre la tête avec la musique non plus!» Puis, une pause, et il précisera sa pensée. «Oui, je réfléchis beaucoup, je pense à mon projet, musicalement parlant, et c’est un art qui m’intéresse beaucoup, mais il faut aussi savoir mettre des pointes d’humour là-dedans et garder en tête que ce n’est qu’un disque!»
Avec un peu d’aide de mes amis
Bien que Francis joue de l’essentiel des instruments, il a tout de même accueilli des invités ici et là au sein de la coque d’Oothèque, dont Lisa Iwanicki de Creature, Pierre-Luc Bégin de We Are Wolves, Julien Mineau de Malajube ainsi que Pascal Shefteshy qui a enregistré l’album, en plus d’épauler l’artiste dans sa démarche. «On s’est connus en travaillant», résume le chanteur, mentionnant qu’il a rencontré Pascal en accompagnant Peter Peter – qu’on retrouve aussi sur le disque, d’ailleurs – à la batterie. Tout d’abord recruté pour capter les pistes, Shefteshy se sera avéré un allié aussi précieux que sympathique à la cause. «Je n’avais pas prévu ça: inclure quelqu’un d’autre dans la création de ce disque, s’étonne Mineau. Qu’on s’entende bien était inattendu, mais important, finalement! Ça faisait du bien qu’une autre personne réfléchisse avec moi au projet, souhaite aussi le rendre meilleur», glisse celui qui a été habitué à la création à quatre en compagnie de son fameux groupe.
«Travailler seul m’a forcé à tout faire par moi-même, à prendre davantage de décisions, mais aussi à me découvrir moi-même à titre de créateur», énumère l’artiste. Autre aspect fort apprécié de l’exercice solo? Les bourdes qui en découlent. «Les accidents sont l’autre chose intéressante que tu découvres de toi en créant, analyse Mineau. Me tromper d’accord – donc, jouer une note qui ne vient pas de mon raisonnement technique – peut donner une meilleure mélodie, par exemple.»
Période de gestation
Bien malgré Francis Mineau, la préparation de la translation du disque à la scène pourrait être annonciatrice du retour prochain de Malajube, alors que le claviériste Thomas Augustin accompagnera Oothèque sur les planches pour une poignée de concerts, tout comme Renaud Bastien, multi-instrumentiste au sein de Cœur de pirate et membre de la troupe à l’époque de Trompe-l’œil. «Qui sait? Ça va peut-être influencer la façon dont on va aborder le prochain disque!», prévient Francis. «Thomas travaille sur des trucs de son côté, Julien aussi. J’ai hâte de voir le prochain. Est-ce que ça va être un mix de nos affaires? On va voir!»
Oothèque
(Bonsound)
Dans les bacs le 14 mai
Lancement avec courte prestation le 16 mai à l’O Patro Vys