Loco Locass : La mélodie du rappeur
Musique

Loco Locass : La mélodie du rappeur

Question de faire changement, nous avons évité de parler politique avec Biz pour mieux jaser musique à l’approche du premier passage de Loco Locass à la Maison de la culture de Waterloo.

Sans doute parce que le polémiste et le souverainiste lui font de l’ombre sur la place publique, le rappeur qu’est Biz reçoit rarement les fleurs qu’il mérite, malgré ce flow reconnaissable entre tous qui, de Manifestif au plus récent Le Québec est mort, vive le Québec, a perdu un peu en vitesse pour gagner en force de frappe. «J’ai une voix du registre de Guy A Lepage, à la limite du supportable, blague le Loco Locass, mais quand je rappe, ma voix ne me dérange pas. Les voix aiguës et nasillardes, comme celle de B-Real [Cypress Hill] que j’ai beaucoup écoutée, percent bien à travers le mix. Mon flow est naturel, je ne l’ai pas beaucoup travaillé. La seule chose qu’on a ajoutée collectivement sur le dernier album et qui, moi, me demande plus de travail, c’est l’aspect mélodique. Le rap doit tendre vers la mélodie, vers le chant, il y a juste les Français qui ne l’ont pas encore compris. C’est ce qui me touche le plus du spectacle qu’on fait: jamais les gens n’ont autant chanté nos paroles.»

Bien qu’une bonne partie de ce troisième album soit composée de morceaux écrits par l’un ou l’autre des rimeurs, Biz écarte l’idée d’une éventuelle aventure solo, faisant valoir les légers désaccords que s’autorisent les membres du trio. «Batlam, Chafiik et moi, on s’est déjà dit à la blague qu’on avait droit à 10% de propos ou d’idées musicales avec lesquels les autres ne sont pas d’accord. Ce sont les joints de dilatation. C’est comme un pont: si la structure est trop rigide, dès que ça bouge un peu, ça s’écroule.»

Même dépouillé du tube Libérez-nous des libéraux qui dégourdissait à coup sûr les fans, Loco Locass vise toujours sur scène à faire «bouncer», espérant, bien sûr, que «le propos subliminal s’insinue, séminal» (pour citer une des phrases-clés de Manifestif), sans nécessairement en faire une maladie. «Quand tu donnes un bon spectacle, même les gens qui ne sont pas d’accord avec ce que tu dis peuvent avoir le goût de faire la fête. Notre musique, elle n’est fermée à personne. Il y a des enfants de 7 ou 8 ans qui attendent Le but avec impatience [Biz n’avait pas décidé, au moment de l’interview, du sort que son groupe allait réserver à cet hymne au CH récemment éliminé des séries]. On sait aussi de sources sûres qu’il y a des libéraux qui tapent du pied dans leur sous-sol avec une brassière sur la tête en écoutant nos chansons.» Philippe Couillard, nous regardons dans ta direction.