Quatuor Molinari : Crise d'adolescence contemporaine
Musique

Quatuor Molinari : Crise d’adolescence contemporaine

Le Quatuor Molinari souligne son 15e anniversaire en concert tout en multipliant les défis.

Rares sont les ensembles contemporains qui trouvent autant de succès au sein de leur niche que du côté du grand public. Le Quatuor Molinari y est finalement arrivé au fil des années et des expérimentations: «On se sort souvent de notre zone de confort, mais chacun demeure ouvert d’esprit et je crois que c’est la grande force du Quatuor Molinari: on n’a pas peur de se casser la gueule!», lance d’emblée Frédéric Lambert, altiste de la troupe en poste depuis six années déjà.

Ainsi, le Quatuor Molinari se distingue en osant. Notons les collaborations avec des artistes pop à la Philippe B et Avec pas d’casque, bien sûr, mais également ces concerts-marathons où les membres du groupe interprètent l’entièreté des quatuors de certains compositeurs de renom. «Allons, c’était un tout petit marathon!», tranche humblement la violoniste Olga Ranzenhofer, fondatrice du projet, en revenant sur la performance abordant l’œuvre de Sofia Goubaïdoulina. «Mais il faut dire que le public aime ce genre d’événements. Il aime "être là"», poursuit-elle. Mieux encore, ce genre de spectacles est aussi intéressant — et instructif — pour les mélomanes que pour ces virtuoses. «C’est intense, mais aussi intéressant, car ça permet de voir l’œuvre d’un compositeur d’un point de vue chronologique et comment celle-ci a évolué», ajoute Lambert.

À défaut d’être olympien, le concert soulignant le 15e anniversaire du Quatuor Molinari tiendra tout de même du happening, car les musiciens y reprendront plusieurs pièces déterminantes de leur répertoire. En plus d’y interpréter à nouveau une composition de Goubaïdoulina — en prévision d’un enregistrement à venir —, les membres du quatuor s’exécuteront sur du Béla Bartók (un autre qui a eu droit au traitement marathonien) ainsi que sur du Alfred Schnittke, sujet de deux parutions de l’ensemble: Quatuors à cordes 1-4 (2011) et Musique de chambre, vol.2 (2013). «Ça a été très bien reçu en Angleterre, notamment. Le premier était un "editor’s choice" du Gramophone, une référence dans le domaine», glisse Mme Ranzenhofer, pas peu fière. Aussi du programme: des œuvres de R. Murray Schafer, allié de la première heure, compositeur mis en valeur sur deux disques: String Quartets 1-7 (2000) ainsi que Quatuor à cordes 8-12, plus récente offrande du groupe lancée en avril dernier. «Le 12e n’a jamais été interprété et le sera seulement lors du concert de lancement en présence de M. Schafer!», s’exclame l’altiste. Et sa collègue de préciser que la création a été composée à la demande du Quatuor Molinari et a même été financée par l’architecte et mécène des arts Phyllis Lambert.

Là s’arrête toutefois l’élan nostalgique du Quatuor Molinari. À l’image de son jeune âge, le projet va assurément de l’avant. «À 15 ans, on demeure adolescents, mais nous sommes quand même assez matures pour notre âge», muse Olga Ranzenhofer, faisant valoir l’expérience et la renommée du groupe pour ensuite annoncer des projets de tournées en Chine, au Canada, en Europe, des séries de concerts thématiques — dont un consacré à des compositeurs québécois — et une pièce de théâtre musicale jeunesse! «C’est le meilleur public pour la musique contemporaine», clame Frédéric Lambert. «Ils ont une innocence qui fait en sorte qu’ils n’ont pas encore de jugements provenant de l’extérieur et ils absorbent tout!» La violoniste abonde dans le même sens. «À cet âge, ils maîtrisent déjà les ordinateurs et leur iPod. Comprendre la musique contemporaine? Y’a rien là pour eux!»

quatuormolinari.qc.ca