Tegan and Sara : Alternatives et populaires

Jointe à quelques minutes du début d’un test de son à Pittsburgh, Tegan Quin a la voix vive et reposée. Elle est sereine, ça s’entend. Et fort à parier que c’est la tournée américaine avec le groupe Fun qui la rend comme ça. «L’an dernier, on a fait la première partie de The Killers. Le public n’a jamais été irrespectueux, mais ce n’était pas le nôtre non plus», avoue la moitié du duo canadien en faisant référence à l’accueil pas tellement chaleureux de l’assistance – majoritairement composée de gars assez âgés – qui n’avait d’oreille que pour Brandon Flowers et ses musiciens. «Avec Fun, c’est très différent. Il y autant de fans d’eux que de nous en show. C’est une très belle collaboration!»

Mais à l’Impérial de Québec et à Osheaga, c’est elles qui seront les têtes d’affiche. Dans leurs valises, les chansons de leur plus récent album titré Heartthrob, qui figure sur la courte liste du prochain prix Polaris aux côtés de Purity Ring, Young Galaxy, Metric et Metz, notamment. «Parfois, j’ai l’impression qu’on est rendues vieilles et qu’on est devenues un heritage band. Mais le fait d’être nommées aux côtés de jeunes bands pour le prix Polaris me prouve, au contraire, qu’on fait encore de la musique d’avant-garde et qu’on a su se réinventer au fil des années.»

Se réinventer, certes, mais aussi rajeunir son public un brin. Quand on questionne Tegan sur leur virage électro amorcé avec la coécriture du hit Feel It In My Bones avec le DJ hollandais Tiësto, elle répond du tac au tac: «Notre premier album est sorti en 1998. L’industrie de la musique a beaucoup changé depuis! Quand les gens critiquent nos changements de sonorités, je leur dis « Hé! Repense à toi en 1998. Tu as changé, hein? » Et puis, de toute façon, il y a de l’électro partout aujourd’hui.»

Résolument plus catchy et maintenant dédiée aux radios Top 40 plus qu’aux college radios qui les faisaient jouer en exclusivité au début de leur carrière, la musique des jumelles originaires de Calgary est toujours entièrement composée par ces dernières. «C’est le fait d’être auteures et compositrices qui nous permet d’évoluer», ajoutera Tegan, en pleine connaissance de ses moyens, sans fausse modestie ni une once de vantardise. Et force est d’admettre que c’est cet aplomb qui inspire leurs jeunes fans. Les adolescentes, surtout, et plus particulièrement celles qui ont du mal à accepter leur orientation sexuelle fraîchement avouée. Constat facile: Tegan et Sara sont, au fil des ans, devenues les porte-étendards les plus emblématiques de l’homosexualité au féminin. «C’est arrivé hier soir encore. Une de nos fans est passée nous voir backstage après le concert pour nous dire que son homosexualité était acceptée par ses parents à cause de nous.» Un rôle de grandes sœurs qu’elles campent au quotidien et qui déteint sur leurs textes sensibles.