Basia Bulat : Sortir de l’ombre
Basia Bulat repousse ses limites – et sa pudeur – sur Tall Tall Shadow, son troisième album.
C’est une Basia Bulat endormie et rieuse qu’on rejoint par téléphone dans une chambre d’un hôtel d’Omaha, au Nebraska, alors que la chanteuse se fait la main sur son nouveau disque en première partie du projet solo de Jim Jones, chanteur de My Morning Jacket. «C’est des concerts quand même étonnants», raconte-t-elle. «Le public est, à ce jour, hyper réceptif. Tellement que je m’inquiétais lors du premier concert tant il était silencieux. Une chance qu’il applaudissait entre les chansons. Sinon, je me serais posé des questions!»
Une histoire typiquement montréalaise
Des jours avant la parution du disque, l’artiste torontoise se dit en pleine possession de ces moyens… tout en étant hors de contrôle lorsqu’on mentionne les concerts à venir au Québec. «Ma carrière est liée de près ou de loin à Montréal. Sans vouloir être trop cryptique, cette ville a été le décor de plusieurs moments personnels et musicaux importants pour moi», note-t-elle avant de rappeler que Tall Tall Shadow a autant été enregistré dans le 416 que dans le 514 en compagnie de collaborateurs de choix: Mark Lawson et Tim Kingsbury, respectivement technicien et musicien au sein de l’équipage Arcade Fire. «C’est vraiment arrivé au gré des rencontres! Je n’ai même pas fait exprès!», lance-t-elle en rigolant quand on lui fait remarquer que son album précédent. Heart Of My Own (2010), a été concocté par Howard Bilerman, autre alumnus de la bande de Win Butler et Régine Chassagne, qu’on retrouve aussi ce disque. «C’est une histoire typiquement montréalaise, je dirais», tranche-t-elle en revenant sur la rencontre.
De passage à Montréal pour étudier le français à l’Université de Montréal, Basia a croisé Bilerman en poursuivant sa carrière musicale. Ce dernier l’a présenté à Tim – qui participait également à Heart Of My Own sur quelques pièces – et ceux-ci ont gardé le contact par la suite. «C’est très montréalais dans ce sens où les artistes ont un ardent désir de collaborer entre eux, de participer aux oeuvres de l’un et de l’autre. Et il arrive parfois que ces collaborateurs soient également membres d’Arcade Fire!»
Courage musical
Désireuse de faire différent, la chanteuse folk a approché les compères, connaissant leurs inspirations et talents couvrant plusieurs palettes, afin de se dépasser. Kingsbury et Lawson n’ont pas pris la commande à la légère. «Ils m’ont invité à repousser mes limites et m’ont donné le courage pour y arriver», explique-t-elle en faisant notamment référence au lustre plus pop de certaines pièces. «Bien que j’ai souvent eu des envies de chanter sur des instruments comme une boîte à rythmes, juste par curiosité, je doutais toutefois que mon registre fasse en sorte que je serais peu convaincante. J’ai été agréablement surprise», glissera-t-elle en pointant des extraits comme The City With No Rivers et Wires, riches en couches de claviers, par exemple.
La fameuse dose de courage appliqué à Tall Tall Shadow a aussi imbibé les textes selon l’artiste. «C’est sûrement mes chansons les plus personnelles à ce jour. Tellement que ça a été difficile d’en coucher certaines sur papier.» Sans se mettre à nue, on remarque tout de même que l’écriture de Bulat se fait plus vulnérable sur l’oeuvre discutée et la rupture qui semble l’avoir inspirée en grande partie. Bien que toujours riche en images, la chanteuse se fait moins nébuleuse, notamment sur Promise Not To Think About Love, ode aigre-douce consacrée au fameux autre en question. «J’aimerais vraiment dire que j’écris sur de grandes causes, mais ma démarche demeure incroyablement personnelle. Faire autrement serait malhonnête – envers moi et le public – en ce qui me concerne», conclut-elle.
Tall Tall Shadow sera dans les bacs dès le 1er octobre sur Secret City. En concert le 1er octobre au Cabaret du Mile-End à Montréal et le 4 octobre au Cercle à Québec.