Keith Kouna : Délire beatnik
Le Festival de Jazz, c’est un prétexte. Une excuse pour prendre des nouvelles de Keith Kouna, de sa récente nomination comme Révélation de l’année à l’ADISQ, alors qu’il roule sa bosse depuis 2001 avec Les Goules. Entrevue avec le roi bohème, le baveux sympathique de l’industrie musicale québécoise.
Joint sur son cellulaire, dont le numéro commence par les chiffres 5, 8 et 1, Keith Kouna se paie un interurbain. Il est en studio à Montréal pour enregistrer un nouvel album solo, son troisième en presque six ans. Battre le fer pendant qu’il est chaud? Pas tout à fait. «Ça fait quatre ans que je travaille sur Le voyage d’hiver, de Schubert. Une relecture. C’est un projet qui nécessite beaucoup d’investissement, de musiciens et de cash. Y’aura des cordes et des cuivres.» Date de parution: décembre 2013, si tout va bien. «Ce serait cool que je le finisse avant que je parte.» En France, de surcroît. Un séjour de six mois pour présenter son album à l’Hexagone grâce à une bourse du Conseil des arts et sans mise en marché. «Je m’en vais là semer des graines», précisera le principal intéressé.
Anti-vedette
«Tout ça me mène jusqu’à l’ADISQ et le vote du public. Je monte sur la scène hystérique et j’embrasse mon Félix», chante-t-il sur la plage 2 de Du plaisir et des bombes, son deuxième album solo en carrière qui (ironiquement) lui vaut trois nominations audit gala, soit Meilleur album rock, Meilleur auteur-compositeur, Révélation de l’année. «Ça m’a surpris, j’ai trouvé ça drôle. En tout cas, j’ai l’impression de prendre un bain de jouvence en étant en nomination avec des kids.»
Exige-t-il dans sa loge des craquelins et des fromages fins, un Playstation et des coussins? Pas pour autant. Keith, il garde les deux pieds sur terre, même s’il se projetait tout autrement dans le texte du premier single de son album sorti en septembre 2012. «Dans le brouillon de Pas de panique, il y avait des choses pas mal plus chiennes. Je voulais pas avoir l’air du gars amer.» Reste que, quand même, il avouera que le texte est truffé de petites références, comme le fait d’être «fier parce que je fais mon rock à moi», une citation empruntée à Marie-Mai. Confession qu’il fera avec un sourire dans la voix.
La magie de la dernière minute
Il a beau ne pas se laisser distraire par la popularité nouvelle, la reconnaissance des institutions comme la SOCAN et l’ADISQ, m’sieur Kouna est overbooké et il en est conscient. Un horaire chargé auquel s’ajoute la préparation de son spectacle d’un soir, celui commandé par le Festival de Jazz de Québec.
Dans la description du double plateau avec Benoit Paradis trio sur la brochure et sur le site Web de l’événement chapeauté par Simon Couillard, on annonce des «relectures de plusieurs pièces du répertoire kounien». Mais ce serait trop facile de tomber dans le cliché, selon Keith lui-même, qui a décidé d’emprunter le sentier moins bien déblayé et de changer d’idée. «Ce sera un long morceau de 40 minutes, pour se rapprocher de la lecture poétique sans être trop typé. Les musiciens, eux, joueront des textures fuzzés.» Est-ce que les organisateurs le savent? Non, et ils l’apprendront à la lecture des ces lignes.
Keith Kouna Kintette en double plateau avec Benoit Paradis trio, le mercredi 23 octobre à 20h, au Théâtre Petit Champlain