One Man Band Festival : Plaisirs solitaires
Le Festival d’hommes-orchestres: un événement de moins en moins esseulé.
Il est tout de même particulier de constater qu’en cette troisième édition de ce festival promouvant les hommes-orchestres et l’indépendance découlant de leur art, le musicien et organisateur de l’événement Jon Cohen est plutôt bien entouré.
En plus de présenter un documentaire – tourné l’année dernière pendant la même foire –, le bonhomme souligne ses collaborations avec le Quartier des spectacles et le Musée McCord. S’attendait-il à un engouement aussi tôt? «J’aimerais répondre que je suis surpris, mais ce n’est pas le cas», mentionne-t-il, pas peu fier.
Se qualifiant lui-même de «vieux pet blasé», l’ex-The Dears et leader du projet musical psychédélique The Jon Cohen Experimental se dit conscient qu’il tenait quelque chose en lançant un festival réunissant des musiciens qui n’ont comme orchestre que les instruments qui les encerclent sur scène. Parfois par inventivité, souvent par ressources limitées, voire les deux à la fois.
«C’est aussi un truc qui reflète une certaine réalité: c’est rendu trop cher d’être musicien dans un band, maintenant», tranche-t-il. «Ça va quand t’as une agence de booking ou une boîte de gérance derrière toi, mais pas quand t’es comme 99% des artistes qui doivent tout gérer de leur carrière. Logistiquement, ce n’est pas toujours possible d’avoir un band, c’est pourquoi plusieurs artistes tentent de se réinventer en… pas nécessairement en one man band, mais en artiste solo… et c’est également mon cheminement.»
Du même souffle, toutefois, Cohen fait valoir que «l’univers» des hommes-orchestres est loin d’être misérabiliste. Très loin, même.
«Ça reflète la réalité financière de l’industrie, mais aussi toutes les choses positives qui viennent lorsqu’on gère nos propres affaires: on n’a plus à négocier avec plusieurs personnes sur comment écrire la musique, quand faire les tournées, ne plus attendre cinq mois pour chaque décision, etc.», ajoute-t-il avant de glisser que comme le nom l’indique, les hommes-orchestres sont appelés à développer une présence sur scène hors du commun. «Tu dois vraiment up your game en termes d’entertainment», s’exclame Cohen. «Tu dois présenter quelque chose d’unique en plus d’être très bon parce que tu n’es pas cinq sur scène, mais bien seul!»
Un challenge qui emballe notamment Xania, une des rares musiciennes à participer à l’événement.
Xania: de la rue, en duo puis en solo
Chanteuse, illustratrice, danseuse et musicienne montréalaise, Xania a tout d’abord fait ses classes en jouant dans le Vieux-Port – «C’est un milieu où tu te dois de capter l’attention des passants», se rappelle-t-elle. «C’est très « Hé! Regardez-moi! Écoutez-moi! », alors que, sur scène, je crois que c’est habituellement plus « facile », car les gens sont là pour voir un concert auquel tu participes. Tu as déjà leur attention, il faut maintenant les divertir.»
Après un passage à Vancouver puis en Europe au sein de Trike, un duo électro, Xania revenait récemment dans le 514, seule mais bardée de compositions rap à à saveur folk-pop-électro (oui, oui) et de textes intimes à faire rougir Lena Dunham. «Je ne voulais justement pas me censurer!», lance-t-elle pour justifier son approche. Bien qu’elle s’accompagne parfois d’un groupe d’amis – surnommé The Potholes –, Xania privilégie toujours la voie solo. En plus de pouvoir créer et répéter à son rythme – effréné –, la touche-à-tout préfère également faire de la route par elle-même, ne serait-ce que pour s’éviter des maux de tête. «Je crois que c’est pourquoi de plus en plus d’artistes se lancent dans des carrières solos, ne serait-ce que pour les tournées et les répétitions. En ce qui me concerne, nous sommes six. Essaie de faire coïncider six horaires, pour voir!»
Bien qu’elle s’avoue surprise de constater que l’on compte aussi peu de musiciennes solos au sein du festival – «Peut-être est-ce lié à l’appellation one man band?», muse-t-elle, sourire en coin —, Xania n’en fait pas de cas, car elle remarque que de plus en plus d’artistes féminines se lancent ces jours-ci. Le succès retentissant de Grimes la rassure également.
En attendant une nouvelle cohorte, Xania persiste, signe et planche sur une tournée pancanadienne solo – qu’elle organise par elle-même, bien sûr – en plus de terminer un clip tourné au Mexique pendant les Fêtes. Son site: iamxania.com.Le Festival d’hommes-orchestres (One Man Band Festival) se tient du 15 au 18 mai. Détails sur onemanbandfest.com.