10e anniversaire du Divan orange : Mois d'étain
Musique

10e anniversaire du Divan orange : Mois d’étain

Pour souligner son dixième anniversaire, le Divan orange organise un mois de concerts relevés. Retour sur le passé, le présent et le futur de l’établissement en compagnie du directeur de la programmation, Lionel Furonnet.

Lorsque rencontré un bel après-midi au fameux bar et salle de spectacles, Lionel Furonnet revenait tout juste de vacances. «On dirait qu’il faut repartir la machine!», souffle-t-il, bouteille d’eau à la main, s’installant à une table devant la vitrine donnant sur le boulevard Saint-Laurent et ses passants. «Il y a beaucoup de projets qui se bousculent, car ils ont été mis de côté pendant mon absence», poursuit-il, sourire aux lèvres, malgré la charge de travail élevée. «Je vis par projet», confie-t-il, les yeux brillants. «J’ai des idées que je dois étaler, sinon je frustre!»

Et c’est justement des idées et des projets un peu fous qui l’ont mené – lui et des compagnons d’armes croisés au Café Ludik – à lancer leur propre coopérative culturelle qui, en moins d’une décennie, est devenue un pôle incontournable pour la scène locale dite émergente. «Avec toute notre innocence et notre passion avec nous, on s’est dit qu’on se trouverait un nouveau local», se souvient-il.

Après avoir monté son plan d’affaires, la bande a mis plus d’une année à zigzaguer en vélo dans le quartier à la recherche de l’endroit idéal – «Pas trop loin de la Casa del popolo et de la Sala rossa, mais pas trop près non plus. On voulait se présenter comme un “complément” et non comme un “concurrent”», spécifie-t-il au passage. Furonnet et ses collègues ont opté pour la présente location, une ancienne friperie. «Il n’y avait plus rien. C’était comme une plaque de Lego sur laquelle on allait assembler un bar, une scène, des toilettes, etc.», mentionne-t-il en s’esclaffant. «Encore une fois, c’était en toute innocence. On allait chercher des gens pour nous aider parce qu’on avait peu de moyens. J’crois qu’on n’avait que 2500$ pour lancer le projet!»

À la recherche de reconnaissance

Le défi était doublement de taille, en fait.

Non seulement le collectif avait peu de moyens pour lancer le projet, mais le statut de l’établissement (aux yeux de l’arrondissement et des services publics, l’aspect «bar» du Divan orange fait en sorte qu’il relève uniquement du secteur de la restauration), le prive de bon nombre de subventions. «Et personne ne va te donner de l’argent pour te lancer dans la restauration, car c’est trop risqué», relate Lionel. «On est donc partis avec l’idée qu’on allait faire beaucoup avec peu.»

D’où son implication, quelques années plus tard, au Réseau des scènes alternatives du Québec (RSAQ); un rassemblement de petits lieux de spectacle qui, en 2013, publiait une lettre ouverte soulignant leur valeur culturelle d’incubateur de talents (mentionnant, au passage, qu’autant Arcade Fire que Cœur de pirate ont foulé leurs planches avant de se retrouver sous les projecteurs devant le grand public). Même si le ministère de la Culture et des Communications ne s’est pas encore plié aux demandes du collectif, l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal, lui, dévoilait en mai dernier qu’il travaille actuellement sur une modification au règlement d’urbanisme qui assujettirait notamment l’émission d’un permis de bar selon les mêmes contraintes que celui des salles de spectacle; une démarche vue d’un bon œil par Furonnet, qui a également été consulté pour ce projet.

Le directeur de la programmation du Divan orange se désole tout de même que les différentes instances gouvernementales s’animent aussi tard. «C’est vraiment regrettable – pour employer un mot léger! – que [le Divan ne soit toujours pas reconnu comme lieu culturel] après 10 ans. Imagine pour la Casa, le Quai des brumes, L’Esco et compagnie, qui existent depuis plus longtemps!»

À venir: le Centre de diffusion des musiques émergentes

En plus de peaufiner la programmation du 10e anniversaire, qui se tiendra tout au long du mois de septembre (à ce jour, Furonnet confirme la participation de Tommy Kruise, PyPy, Afrodizz et Jesuslesfilles, en plus de laisser entendre que de «grosses surprises» seront bientôt annoncées), Lionel Furonnet planche sur un énième projet plus ambitieux: l’achat de l’immeuble de trois étages abritant le Divan orange afin d’y aménager le Centre de diffusion des musiques émergentes. «À un moment donné, tu n’as plus le choix. Si tu veux aller plus loin, tu dois imbriquer d’autres activités après en avoir fait une qui fonctionne bien, qui peut soutenir ça», commente-t-il. Ce lieu assurera non seulement la pérennité de son établissement, mais il offrira aussi des espaces à loyer modique à différents paliers de la fameuse scène locale. «On veut créer un pôle d’information, de sensibilisation et d’outillage pour travailleurs culturels et artistes… parce qu’on s’ennuie de la SOPREF!», glisse-t-il en faisant référence à la regrettée Société pour la promotion de la relève musicale de l’espace francophone qui, de 1999 en 2009, remplissait un rôle semblable.

Comme si ce n’était pas assez, Furonnet échafaude également un volet jeunesse – surnommé Microphone – qui permettra aux publics enfant et adolescent de s’initier à la musique de champ gauche – «Bad Uncle, Socalled ou encore Groenland; y’a plein de groupes qui feraient triper les jeunes!», lance-t-il, enjoué – lors de courts concerts qui se tiendraient en après-midi au Divan orange. «Je crois que c’est un projet super “payant-entre-guillemets”», conclut-il. «C’est payant pour la culture et pour l’avenir aussi. Quand on pense à la relève musicale, il faut également penser à la relève du public et il y a plein de choses à faire avec elle.»

Le 10e anniversaire du Divan orange sera célébré tout au long du mois de septembre. Programmation sur divanorange.org.