Julien Sagot / Valse 333 : Voyage au centre de la tête
Près de deux ans après la parution de Piano Mal, son premier effort solo, le percussionniste de feu-Karkwa Julien Sagot sort le grand jeu avec Valse 333. Un album qui n’a pourtant qu’un mot en commun avec Sissi l’impératrice.
Julien Sagot est multi-instrumentiste, parolier, compositeur, il est né en France mais il jure ne pas savoir valser. « J’ai pas cette culture de valse-là et, à la limite, je la trouve un peu ennuyante si tu parles de musette comme dans les vieux films de Jean Gabin. […] Je t’avoue que je passe mon tour sur l’accordéon. Chaque fois que j’en entends, le poil m’hérisse. C’est comme le Camembert, ça marche pas du tout pour moi! » Sa valse à lui – et toujours pour reprendre ses mots – est davantage nord-américaine et métissée.
Inspiré par ses aventures de globetrotteur, le disque co-réalisé avec le compositeur et as du steel drum jamaïcain Antoine Binette-Mercier se divise en douze plages. Douze destinations, dont une escale de 54 secondes à Saïgon. « C’est un disque qui parle beaucoup de voyages, de transport. […] Dans le déplacement tu es tout le temps entre deux. Tu es dans un milieu intemporel et c’est un peu comme ça que tu te retrouves dans un disque. »
Grand explorateur
L’auteur-compositeur-interprète utilise le terme expérimental – sans qu’on lui mette les douze lettres dans la bouche – lorsque vient le temps décrire sa plus récente offrande. Un bouquet de chansons qui a mis un an et des poussières avant d’atteindre sa pleine maturité, une collection de morceaux impressionnistes et presque abstraits. « Moi, j’aime explorer, travailler l’esthète sonore, les mots. Le côté émotif, je t’avoue que je laisse ça à Mario Pelchat et Pierre Lapointe. […] Je ne suis pas insensible mais j’ai de la misère à parler au « je ».»
Jamais moralisateurs ni nombrilistes, les textes livrés par la voix de Sagot oscillent entre chant et parole et ont été couchés sur des lits de basse, de xylophone, de batterie, de violons. Un amas d’instruments organiques traités comme s’ils étaient en fait électroniques, synthétiques. « On trouvait que c’était trop propre donc on a tout remis les beats box dans des vieux amplis tout crottés. Au point de départ, on avait l’intention de faire un disque super lo-fi. […] Après coup, on a décidé de passer trois jours dans un beau studio pour rajouter juste un peu de velours là-dessus. Mettre un peu de soie sur quelque chose de déglingué. »
Enregistré dans des apparts et des sous-sols par une figure quasi anonyme de l’industrie (Binette-Mercier), le dernier album en date du poète-musicien témoigne d’une volonté de se mettre en danger. Un clash avec la façon de procéder au sein de Karkwa, quintette habitué aux studios d’enregistrement selon le témoignage d’un des leurs.
D’ailleurs, on s’est risqué à poser la question qui chicotte, qui titille, qui fait mal : est-ce que Karlwa existe encore? « Y’a pas à être embêté avec ça. C’est la fin d’un disque et puis après ça, voilà. Je sais pas, peut-être que dans 10 ans on va se retrouver et on va se taper sur les genoux et faire comme « Yé on est content de se voir, on fait tu un projet? » Je veux dire, moi les bands qui disent « Voilà, dernier spectacle, merci, bonsoir » et qui reviennent six mois après et qui vendent encore un spectacle d’adieu, je trouve ça ennuyeux. C’est encore dans un but de formule et de faire des sous. »
Valse 333 (Simone Records)
En vente aujourd’hui
Lancement de l’album
Mercredi 28 octobre à 18h
Cabaret La Tulipe