Keith Kouna: Le voyage sans fin
Après un disque ambitieux acclamé par la critique, Keith Kouna transporte son impressionnant Voyage d’hiver sur scène.
«Ça allait de soi», nous confirme Keith Kouna. Le voyage d’hiver, son disque-épopée sorti à la fin de l’année 2013 sur lequel il a réécrit des textes de l’œuvre Winterreise de Franz Schubert, était destiné à être mis en scène. C’est maintenant presque chose faite grâce à la précieuse aide d’Antoine Laprise à la mise en scène et du musicien Vincent Gagnon à la direction musicale.
Pendant notre entretien aux studios montréalais où l’équipe répète, Keith Kouna nous dévoile quelques détails à propos de ce spectacle. Dans un décor orné de multiples arbres, le chanteur et musicien sera au milieu de la scène entouré de 10 musiciens, d’une danseuse et d’un frigidaire (qui nous réserve bien des surprises, nous dit-on!). Aussi: «Il va y avoir des pièces avec un putain de micro-casque. Un peu comme Garou!», rigole-t-il.
Le chanteur et ses acolytes ont voulu créer des petits tableaux pour les 24 pièces de l’album, en faire une espèce de parcours afin d’illustrer l’univers beau et lourd du Voyage d’hiver. «Ça a été de trouver une trame, une façon de présenter quelque chose qui soit assez sobre, mais minimaliste, élégant.»
Après des belles folies punk rock au sein du groupe Les Goules (2001-2007), deux disques solos épatants (Les années monsieur – 2008 et Du plaisir et des bombes – 2012), puis un long séjour en France en 2014 où il a fait plus d’une soixantaine de spectacles, c’est l’heure d’un plus gros défi encore pour Keith Kouna: celui d’être au centre d’une production plus imposante.
«C’est complètement différent! J’ai jamais fait ça. Je joue un rôle. Oui, c’est un peu un personnage qui est dans son univers. Oui, j’ai des trucs à jouer. Les Goules, on avait un côté théâtral, mais c’était des cues – « OK, pendant cette chanson-là, on va faire ça » –, ça restait très libre pour l’improvisation. C’est sûr que je vais être mort de trouille avant ce spectacle-ci.»
Jusqu’au bout
Alors que l’artiste a pris le temps qu’il a fallu pour compléter le Voyage d’hiver sur disque – quatre ans –, le spectacle, lui, a une date de tombée bien précise. Les spectacles sont dans le béton. C’est le côté technique de la chose et tous les petits détails à ne pas oublier qui stressent Keith Kouna, bien plus que les imposantes scènes sur lesquelles il proposera ce spectacle (la Place des Arts et le Grand Théâtre de Québec) ou encore le défi vocal que représente ce Voyage. Bien que, sur disque, il amène sa voix vers d’autres registres que sur ses œuvres précédentes, les nombreuses répétitions en vue du spectacle l’ont bien mis à l’aise pour la scène. Aussi: ça fait deux mois qu’il ne fume pas.
«Je voyais venir les spectacles et quand je suis revenu de France, je me suis dit que j’arrêtais de fumer pour ça. Je dois avoir un minimum de souffle. Ça paraît pas, mais le simple fait de bouger…», dit-il, avant de reprendre: «Y’a pas beaucoup de pauses dans ces pièces-là sur le plan vocal. Tu commences à chanter, tu te rends jusqu’au bout de la toune. C’est très lié au chant, c’est très rempli.»
Point non final
Winterreise est un long voyage vers la mort, mais le Voyage d’hiver de Keith Kouna n’aura pas de point final si tôt, nous confirme le principal intéressé. «Je pense que ce projet-là n’est jamais vraiment fini. J’aurais un fantasme de l’installer – que ce soit une tradition d’avoir un Voyage d’hiver tous les hivers, en février –, mais ça peut aussi être réorchestré pour seulement quatre musiciens, pour une autre mise en scène. Je pense que c’est un matériau très modelable et qui peut être intéressant dans d’autres formules que la grosse affaire, comme le piano-voix, mais il y a beaucoup de boulot si on fait ça. Les possibilités sont nombreuses, mais on verra après ce qui se passe avec ce spectacle-là. Je me vois bien le chanter dans 25 ans encore dans un total autre mood.»
Et après ces quelques représentations du spectacle, Keith Kouna aura-t-il besoin d’un peu de légèreté?
«Mets-en! Totalement. Oui, j’ai déjà des pistes de légèreté qui me permetteront de lâcher mon fou.»
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En spectacle à Montréal les 6 et 7 février 2015 à la Place des Arts et à Québec les 18 et 19 février au Grand Théâtre de Québec. **Les dates pour 2016 se retrouvent un peu plus bas.
[Sur la photo qui accompagne cet article, on aperçoit l’oeuvre Dans les bois / Réalisation Odace Événements / Concepteurs : Stéphanie Leduc, Manuel Baumann]