Foxtrott : Le grand déploiement
Musique

Foxtrott : Le grand déploiement

Après deux ans d’attente, Foxtrott a eu ce qu’elle voulait et lance A Taller Us

Que ce soit sur Brother, chanson relatant une relation délicate avec son frère ou sur Patience, où elle avoue avoir de la difficulté à s’ouvrir à l’amour de sa vie, A Taller Us est une œuvre émotive et personnelle pour la multi-instrumentiste, beatmaker et chanteuse Foxtrott (Marie-Hélène L. Delorme). Ce premier disque complet de l’artiste montréalaise a pris deux ans pour sortir, mais le matériel est toujours aussi vif. «Ç’a été très thérapeutique pour moi de l’écrire et ce sont des choses qui me touchent encore, explique la principale intéressée en entrevue. J’ai essayé d’écrire les choses les plus honnêtes possible, donc ça ne peut pas sonner vieux pour moi. On est toujours en mouvance, c’est pas comme: «Oh, it’s the old me!» Ça sonne pas comme lire un journal intime de quand j’avais six ans.»

La dernière fois qu’on lui avait parlé, en novembre 2013, A Taller Us, joyeux mélange d’électro, de pop, de bass et de bidouillage, était déjà pas mal déjà complété. Marie-Hélène avait en tête de trouver un label international afin de sortir le disque partout dans le monde en même temps – plutôt qu’au Québec ou au Canada en premier, et ailleurs ensuite – et c’est ce qu’elle a trouvé avec One Little Indian, basé à Londres. Le processus a été long, mais finalement, la chanteuse a eu ce qu’elle voulait. «J’aurais pu le sortir sur un label d’ici et ça m’a tenté à un moment donné parce que c’était long et dur psychologiquement, mais j’ai gardé la perspective par rapport à ça parce que c’était important pour moi. Vu que j’étais déjà rendue là, ça change rien un an de plus ou de moins. Dans une vie, c’est pas la fin du monde. J’ai tellement travaillé fort pour me rendre là… ça ne me tentait pas de faire des mauvais choix par impatience.»

Marie-Hélène n’a quand même pas chômé pendant l’attente. Elle a travaillé sur d’autres projets, puis la campagne pour A Taller Us s’est amorcée avec la sortie de la vidéo de Driven en mai dernier. La forte facture visuelle du vidéoclip s’arrime avec les propositions ultérieures de Foxtrott incluant les photographies, les vidéoclips et le stylisme entourant son œuvre. «J’essaie de créer une esthétique qui est toute cohérente et intéressante. En show aussi. C’est ce qui me fait tripper chez les artistes, quand ils sont capables de développer plein d’idées, qu’ils collaborent avec d’autres et que tout est intéressant. Tu découvres tout un monde plutôt que de miser sur une seule image.»

Si chez certains de ses pairs chanteurs-beatmakers le côté vocal est accessoire, Foxtrott met plutôt sa voix bien en avant-plan sur scène. Elle n’a pas de formation en chant, mais dit avoir chanté toute sa vie: «Je chante constamment depuis que je suis née. C’est vraiment gossant!», ricane-t-elle. Entourée d’une musicienne de cor français et d’un batteur, elle s’assure surtout de bien livrer ses textes. «Je ne fais pas trop de pitonnage sur scène. C’était un choix. J’y ai pensé pendant un bout et ce qui importait pour moi c’était de livrer l’émotion le plus possible. Je m’en fous de tourner les boutons plus ou moins. Aussi, honnêtement, c’est surtout parce que j’ai pas le choix. Les chansons sont vraiment difficiles à chanter, donc quand je le fais, je ne peux pas faire autre chose.»

Sur disque, l’interprétation est convaincante. Elle prend bien sa place dans le riche univers sonore de Foxtrott. Plus on écoute le disque, plus on entend les différentes couches qui forment A Taller Us, d’ailleurs. «J’ai été preneuse de son et j’ai fait de la postproduction sonore en cinéma pendant longtemps, donc je pense que j’ai une approche par rapport à la musique qui parle avec les fréquences. Damian Taylor, qui a mixé l’album, me disait tout le temps: « Tes chansons sont composées prémixées, y a rien qui vient dans sa petite zone ».»

Ayant participé dans le passé à de nombreuses vitrines de l’industrie musicale afin de présenter Foxtrott, Marie-Hélène pourra enfin se concentrer sur de «vrais» shows et aller à la rencontre de ses publics avec la sortie de A Taller Us. «Y a eu un moment où, quand on magasinait le label, j’ai viré un peu déprimé. Je me disais: « Pourquoi je fais ça? J’hais ça. J’aime pu ça jouer de la musique ». Je me suis rendu compte que ça faisait un an que je faisais des « showcases ». Tsé, on fait de la musique pour le monde, pas pour les badges. Ça fait une grosse différence en tant que performeur. La minute où tu joues devant un vrai public qui est là pas pour te juger mais pour écouter de la musique, tu réalises: « Ah! OK, c’est ça faire de la musique! »»

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A Taller Us (One Little Indian), sortie le 19 novembre; Spectacle de lancement le 20 novembre à 20h au Centre Phi (Montréal)

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