Marie-Eve Roy : Face à l'horizon
Musique

Marie-Eve Roy : Face à l’horizon

Après 20 ans au sein du quatuor punk rock les Vulgaires Machins, Marie-Eve Roy se fait apaisante sur son premier effort solo. 

Ça fait toujours un grand bien de changer l’énergie de place. Chez les musiciens punk, on remarque une tendance: le virage solo plus intimiste ou acoustique. L’Ontarien Dallas Green est passé au folk (City and Colour) après des années dans le hardcore d’Alexisonfire. Le leader du groupe punk rock canadien The Flatliners, Chris Cresswell, est parti en tournée l’année dernière, seul sur scène avec sa guitare acoustique. Il faut changer d’air parfois pour mieux se retrouver. Ou peut-être est-ce simplement un besoin de s’assagir un peu.

Dans le cas de Marie-Eve Roy, l’aventure solo s’est imposée comme une nécessité après deux décennies à chanter du punk rock le poing en l’air avec les Vulgaires Machins. En posant ses valises pendant tout un mois en Nouvelle-Zélande en 2010, la musicienne a réussi à prendre du recul pour la suite des choses. Il fallait tout détruire, s’éloigner, pour reconstruire.

«Les Vulgaires Machins, c’est vraiment une longue relation, et dans ma vie privée aussi, c’est une longue relation (Marie-Eve est en couple avec le chanteur Guillaume Beauregard). Avec cet album, j’ai voulu faire des chapitres différents de ce que c’est de partager sa vie avec quelqu’un aussi longtemps. Y a des moments de doute, de perte de soi. Les Vulgaires Machins et ma relation ont commencé à 17 ans. Tu te perds, tu te cherches, tu vis à travers l’autre. J’avais besoin que tout s’écroule pour que je me retrouve et que j’aie une vie en dehors de ça. À un moment donné, on dirait que tout tourne autour de la même chose et j’avais besoin de confirmer que je pouvais vivre à l’extérieur de ça.»

Voir l’infini

Seule, devant le bleu infini de l’horizon à Golden Bay, elle a trouvé l’inspiration pour son premier album. «La Nouvelle-Zélande, c’est vraiment à l’autre bout du monde et en arrivant, je me suis sentie vraiment loin. J’ai même eu le vertige parce que j’habitais près d’un mont et y avait des immenses montagnes autour de moi. Je devais prendre le temps d’être bien dans cette place-là et me retrouver. À cet endroit, je pouvais poser un regard sur tout ce qu’il y avait à l’extérieur.»

Entre ce voyage déterminant il y a quelques années et ce Bleu Nelson, Marie-Eve a fait des albums et des tournées avec les Vulgaires Machins, donné naissance à un enfant et vu son compagnon de vie se lancer en solo avec D’étoiles, de pluie et de cendres, un album très bien reçu. Aujourd’hui, c’est à son tour de se mettre en danger pour avancer, d’avoir le courage de parler au «je». Sur la douce introduction du disque, Dis-moi tout, elle chante son besoin de réconfort: «Comment fait-on / Pour se tenir debout / Quand les murs s’écroulent autour / J’avoue que j’ai les larmes qui coulent.»

«La musique me console dans la vie. C’est ça mon élan pour écrire. J’ai besoin de me consoler avec la musique et de consoler les autres. Dans le tourment de ce qui est la vie ou dans le processus d’écriture, j’ai besoin de ça», insiste-t-elle.

Univers feutré

Son inspiration principale pour cette œuvre minimaliste, enveloppante et parfois dansante – dans la veine de son premier simple Golden Bay –, c’est le trio britannique The xx. Et ses alliés, dans son aventure solo? Un homme et un instrument.

«Je me suis procuré un Wurlitzer. J’avais envie de ce son-là avant même d’écrire. J’ai écrit avec ça, avec un son vraiment vibrant et feutré. C’est ça qui a donné le ton à toutes les pièces. Je l’ai amélioré et peaufiné en allant chercher Julien Mineau (compositeur de Malajube). Je ne le connaissais pas beaucoup, mais j’ai toujours adoré son univers. J’ai su qu’il prenait de vieux pianos et les remettait à neuf. Je savais qu’il en avait quelques-uns à vendre, donc on s’est rencontrés et j’en ai acheté un. Après ça, il m’a invitée à venir faire des chansons.»

Mais tout compte fait, Bleu Nelson est un album d’une femme qui s’affirme, aussi difficile soit l’exercice sur le plan personnel, précise la compositrice. «Avec les Vulgaires Machins, j’étais entourée de gars tout le temps, tout le temps! Parfois, c’était lourd! dit-elle en riant. J’ai un besoin criant d’être femme créatrice à 100%. J’ai envie de m’entourer de filles aussi. Je veux aller au bout de mes idées. Autant c’est épeurant puisque, comme je l’explique sur la chanson Vents contraires, j’ai de la misère à m’affirmer, autant c’est salvateur.»

Et son lancement, justement, elle le fait le 8 mars, Journée internationale des femmes.

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Bleu Nelson (Costume Records), disponible maintenant marieeveroy.com