Bombino: Symbolismes touaregs
Musique

Bombino: Symbolismes touaregs

Le bluesman touareg Bombino revient avec un nouvel album aux touches reggae, Azel

Mon histoire avec le blues touareg et plus précisément avec la musique de Omara «Bombino» Moctar remonte à un voyage dans la mythique ville d’Agadez, en 2010. Alors que le musicien venait tout juste de se produire devant la grande mosquée en argile de la ville, c’était en janvier et son histoire, mais surtout sa musique, ne s’arrêterait pas là.

Je cherchais le guitariste dans la ville, tout le monde le connaissait, et moi, je l’avais découvert par l’entremise du label Californien Sublime Frequencies avec le disque enregistré de façon artisanale par Hisham Mayet et intitulé Group Bombino — Guitars from Agadez, vol. 2.  De mauvaise qualité, les enregistrements laissaient toutefois entendre un son brut, blues et qui dénotait une furieuse envie de jouer le rock’n’roll. Il y avait du Mark Knopfler, du Hendrix avec en plus une touche indéfinissable qui redonnait au rock ses lettres de noblesse.

Plus tard est arrivé l’album de la révélation: Agadez, enregistré par les bons soins de Ron Wyman dans la cité caravanière, avec une production de qualité qui laisse bien entendre la voix fragile et le jeu de guitare puissant du jeune homme. Bombino est alors redevenu un véritable nomade, multipliant les concerts à travers le monde et poursuivant son insatiable envie de jouer de cet instrument qu’il maîtrisait de plus en plus.

Après un deuxième opus intitulé justement Nomad en 2013 (réalisé par le Black Keys Dan Auerbach), Bombino revient aujourd’hui avec un troisième effort intitulé Azel. Un album qui semble tourner sa machine rythmique vers la basse puissante et funky du reggae. On a profité de son passage au Centre Phi le 24 mars dernier pour s’entretenir avec lui.

Il faut dire que l’album intriguait après Nomad (qui avait été une presque déception), on avait hâte d’entendre la suite…

«Les thèmes de ce nouvel album, nous dit Bombino, sont les mêmes qu’on retrouve dans mes deux précédents disques. Je traite de mon identité touarègue, de la préservation et de la démocratisation de ma culture et j’insiste sur l’amitié qui est une valeur importante pour moi. Une pièce comme Akhar Zaman traite de la jeunesse touarègue exilée en Europe et aux États-Unis et qui se retrouve perdue dans ses repères tandis que la chanson Tamiditine Tarhanam est une chanson d’amour qui parle de l’impossibilité de démontrer notre amour publiquement, elle fait référence aux débuts de ma relation avec ma femme. En définitive, mes chansons utilisent des symboles pour parler d’émotions et je crois que nous sommes bien loin de la symbolique occidentale, si je comprends bien.»

Enregistré dans une ferme de Woodstock en compagnie de Dave Longstreth du groupe Dirty Projectors, cet album sonne comme une performance live et laisse au groupe l’énergie et la liberté de se déployer. Le studio Applehead et son équipe furent un véritable plus à la conception et à la réalisation de cet album. À l’écoute, on le ressent franchement, on capte bien l’énergie du groupe qui semble plus libre à la réalisation que le précédent album où on ressentait partout l’ombre de Dan Auerbach, un brin oppressante.

«Travailler avec Dave fut une expérience franchement concluante. Il est très posé et plutôt calme, son tempérament n’est pas celui d’un producteur dominant. Au lieu de cela il avait plutôt de l’écoute et nous redirigeait vers une direction ou une autre selon nos feelings. Cet album fut un véritable travail d’équipe.»

Un album qui sort aujourd’hui et qui vous laissera entendre de nouvelles sonorités plus proches du reggae, que Bombino a voulu expérimenter par seul amour de ce langage musical. «Le reggae offre des moments d’accalmie dans mes concerts. Il exprime aussi un état dans lequel je me sens ces temps-ci. J’ai besoin de cette accalmie dans la fureur des tournées.»

Un album sur étiquette Partisan Records à se procurer aujourd’hui!

partisanrecords.com