Musica Elettronica Viva au FIMAV!
Il y a près de trois ans que Musica Elettronica Viva (MEV) n’a pas donné de concert, et le groupe n’en donnera que trois cette année: deux en Europe et un… à Victo! Ce sera l’occasion de célébrer les 50 ans de cet extraordinaire ensemble d’improvisateurs.
Ils étaient plus nombreux au départ, mais le noyau de MEV, c’est le trio que l’on verra au FIMAV: le pianiste Frederic Rzewski (bien connu pour ses variations sur The People United Will Never Be Defeated!) et les électros Alvin Curran et Richard Teitelbaum, que je rejoins par téléphone chez lui, près de Woodstock. Le groupe Musica Elettronica Viva s’est lancé en 1966 dans un concept très ouvert et très libre d’improvisation totale comme il n’y en avait alors pratiquement que du côté du free jazz, mais ses membres ne provenaient pas de la scène jazz. Richard Teitelbaum précise: «Certains d’entre-nous venaient de là, comme Ivan Vandor, qui avait joué avec Dexter Gordon, et Steve Lacy qui s’est joint à nous assez tôt aussi. Alvin avait aussi joué dans des orchestres de danse… Mais Frederic et moi étions davantage issus de la musique contemporaine et très influencés par John Cage.»
La musique improvisée de MEV est aussi éloignée du free jazz développé depuis les années 1950 que de la « musique intuitive » que Karlheinz Stockhausen allait lancer en 1968; le groupe a vraiment développé un style très personnel. «Je suppose que c’est simplement le mélange de nos différentes personnalités, et notre désir d’aller au-delà de tout ce qui pouvait nous être familier pour créer quelque chose de nouveau.» Le groupe faisait même éventuellement participer le public en grand nombre: «Oh, oui, dans certaines interprétations de notre pièce Sound Pool, il y avait bien une centaine de personnes!» Le nom du groupe signifie «musique électronique en direct», mais le résultat ne se limite pas à cela: «En effet, ça serait déjà mieux avec «musique électroacoustique en direct»… Aujourd’hui, il y a beaucoup de piano, mais à nos débuts, Frederic n’en jouait pas; il avait trop joué les klavierstücke de Stockhausen et il avait besoin d’une pause! Alors il mettait des micros contact sur une plaque de verre ou sur des ressorts, par exemple.»
Les trois membres fondateurs que nous verrons au FIMAV ont traversé toute une vie de musique depuis les premières expérimentations de MEV en 1966; Richard Teitelbaum est devenu une référence de l’exploration électronique en concert, mais aussi un professeur de composition, un expert en musique japonaise et un compositeur d’opéra (il présentait d’ailleurs son opéra interactif Golem au FIMAV en 1994). «Il y a certainement une différence entre les improvisateurs que nous étions alors et ceux que nous sommes aujourd’hui, mais je ne saurais vous dire laquelle!»
C’est en 1987 qu’il passait au FIMAV une première fois, pour un concert avec le violoniste Carlos Zingaro, dont l’enregistrement est publié chez Disques Victo. C’était l’époque où Radio-Canada enregistrait des concerts; les temps ont bien changé… «Vous savez, j’enseigne la composition électronique et lorsque je parle de Philip Glass, personne ne le connait! C’est l’un des compositeurs vivants les plus célèbres! Un seul de mes élèves connaissait Steve Reich… Mais pour Kendrick Lamar, pas de problème! Alors je suis assez pessimiste sur l’état des choses en musique…» N’empêche, il y a beaucoup de bonnes choses dans la programmation du FIMAV, alors on y retournera pour faire le plein d’espoir!
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Musica Elettronica Viva
22 mai, 22h, au Colisée Desjardins
FIMAV, 19 au 22 mai