Piknic planétaire
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Piknic planétaire

L’incontournable événement estival montréalais Piknic Électronik est devenu une marque commerciale sur les cinq continents de la planète et se développe à fond à l’international.

Depuis un peu plus d’un an, Piknic Électronik fait beaucoup de bébés. En effet, le concept de Piknic Électronik est désormais présenté à Barcelone, Lisbonne, Melbourne, Santiago et Dubaï. Et ça continue: l’équipe travaille également à tenter de l’exporter prochainement dans les villes de Sydney, de Madrid et de Paris, par exemple.

Piknic Électronik, créé en 2003, est une messe du dimanche pour les mélomanes friands de musique électronique et pour les jeunes familles. Chaque jour du Seigneur, de mai à octobre, l’événement s’installe autour de la sculpture d’Alexander Calder sur l’île Sainte-Hélène et présente des DJ internationaux et locaux dès 14h et jusqu’au coucher du soleil. Le site est magnifique avec sa vue sur la ville, la musique est entraînante et la bonne humeur est omniprésente dans ce contexte généralement très relax et convivial. C’est cette même recette gagnante qui est maintenant implantée dans plusieurs autres métropoles du monde.

«C’est le rituel, la récurrence, un rendez-vous hebdomadaire. Et le fait que ce soit le dimanche est aussi important dans le concept, parce que le samedi, t’as pas le même rapport avec la journée. C’est pour ça qu’on n’en fait pas une fête jusqu’à 3h du matin, explique Pascal Lefebvre, cofondateur et président de Piknic Électronik inc. Souvent, les fêtes en lien avec la musique électronique sont associées à ça. Ici, c’est pas ça l’idée, c’est un concept diurne. L’expérience qu’on propose semble avoir une écoute très favorable. Y a tout le phénomène EDM qui est arrivé, mais on est à l’antithèse de ce genre de rassemblement de 50 000 personnes. Nos événements attirent plutôt entre 5000 et 6000 chaque semaine, ce qui est beaucoup de monde, mais ça reste à échelle humaine.»

Pascal Lefebvre, photo Antoine Bordeleau
Pascal Lefebvre, photo Antoine Bordeleau

Passer le test

La raison de cette récente exportation en série de Piknic Électronik est que son édition-test à Barcelone, créée en 2012, a eu le temps de mijoter. Et ça a plus que passé le test. Après sa troisième année, l’événement attirait autant de monde qu’à Montréal. «Et c’est exactement ce qui est en train de se passer à Melbourne où on a des foules de 3200 personnes par événement après une deuxième année», dit M. Lefebvre en précisant que les initiatives de Piknic telles que l’utilisation des verres réutilisables Ecocup sont transmises aux nouvelles éditions.

«Barcelone a évolué plus vite. C’est sûr que la courbe d’apprentissage qu’on a eue à Montréal a été plus longue. On a mis du temps, du jus de bras et de la réflexion pour bien faire grandir le concept, pour ne pas que ce soit trop mainstream ou que ça devienne juste un party. On devait se demander aussi comment calibrer les fonctions: la fonction musicale, la fonction bouffe, la fonction environnement. Y a un contexte d’accueil qui est super important, et la recette, l’idée, c’est le rassemblement, le côté social. Y a des gens qui viennent pour la programmation, mais les gens viennent d’abord parce que c’est un dimanche agréable avec des amis.»

Chaque nouvelle entité de la marque Piknic Électronik est un investissement, mais pour réduire le risque financier que cela représente, le président de l’entreprise explique qu’il est important de bien viser des villes dont l’ADN culturel ressemble à celui de Montréal. Ça commence par un formulaire sur le site web de Piknic Électronik où les villes peuvent postuler afin d’exporter le concept et ensuite il faut trouver un solide allié local. Tout ce processus de mise en place prend habituellement de 6 à 12 mois.

«Quand les gens répondent au formulaire, on leur envoie une étude de marché. On veut comprendre le marché de la musique électronique là-bas. On veut comprendre la compétition, ça nous donne des balises. Ensuite, on va plus loin dans l’analyse. On va sur place, faire des études, feeler la place, la scène. Le terrain, y a rien qui parle plus que ça. Si on décide que c’est intéressant, il faut trouver un producteur avec qui travailler là-bas. On travaille en coproduction. Essentiellement, la production est assumée par le producteur local: trouver le lieu, les permis, toute la production. Et nous, on assure toute la communication et le marketing, les campagnes qui sont en lien. C’est la même image, le même logo, le même site web que Montréal et on gère les réseaux sociaux avec le partenaire local. C’est la campagne de Montréal qui se retrouve partout à travers la planète. Y a une alliance qui se fait avec le partenaire local pour la programmation parce que y a un mélange d’artistes internationaux et locaux. Y a donc un sentiment d’appartenance local qui se développe. C’est pas Montréal qui débarque et qui s’en va faire un Piknic à Melbourne, c’est l’esprit du concept qui débarque et c’est Melbourne qui fait son Piknic.»

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photo Sylvain Granier

Montréal laboratoire

Si le concept fonctionne bien à l’international, serait-ce une avenue possible pour son petit frère, Igloofest, où les DJ réchauffent les foules en plein hiver au Vieux-Port de Montréal depuis 10 ans? «Oui, c’est sûr. Ce qu’on essaye, avec notre stratégie d’exportation et notre modèle d’affaires, c’est que Montréal soit un peu un laboratoire d’expériences. L’idée est qu’on arrive à développer d’autres expériences sociales, au-delà de l’expérience Piknic et Igloofest, qu’on teste à Montréal, et qu’ensuite les coproducteurs avec qui on travaille à l’international et qui connaissent notre modèle d’exploitation puissent les prendre et les développer dans leur ville pour qu’il y ait une contamination.»

«C’est sûr qu’avec Igloofest, on est dans un autre rapport, un rapport à l’hiver. Déjà, on vient de s’enlever quelques villes, poursuit Pascal Lefebvre. Ça prend un contexte urbain, une ville où y a de vrais hivers. C’est un événement plus coûteux et avec des budgets plus imposants, donc on ne peut pas avoir les mêmes partenaires. À terme, on se concentre plus sur Piknic Électronik, mais on est en train de valider ce que serait le modèle d’affaires, quel type de partenariat on aurait besoin pour développer Igloofest.»

On peut rêver à des éditions d’Igloofest dans les pays scandinaves, en Allemagne et au Japon. Mais entre-temps, il ne faut pas oublier ses origines. L’équipe de Piknic Électronik prépare activement sa 14e saison dans sa ville mère.

La saison 2016 commencera par le traditionnel double Piknic des dimanche et lundi 22 et 23 mai. L’événement roulera ensuite tous les dimanches de l’été jusqu’au 2 octobre.

piknicelectronik.com