Pierre Lapointe / FrancoFolies : La forêt n’a pas bougé
Pierre Lapointe reprend intégralement aux FrancoFolies un spectacle qu’il a présenté plusieurs fois partout au Québec, La forêt des mal-aimés.
«Moi, quand je vais voir un spectacle, je veux voir l’artiste. Je veux qu’il me surprenne, qu’il me prouve qu’il est capable d’aller plus loin que ce que j’ai entendu. C’est ce que j’ai voulu faire.» C’est ce qu’affirmait Pierre Lapointe à Voir dans un entretien en 2005. Travaillant «toujours trois pas avant tout le monde», il en était déjà à présenter son nouveau spectacle La forêt des mal-aimés alors que son célébré premier album éponyme venait de sortir et se vendait par dizaine de milliers. C’est qu’il fut une époque où Pierre Lapointe travaillait ainsi: spectacle, puis disque. «Quand j’arrivais en studio, les chansons étaient déjà solides», explique-t-il en entrevue. C’est ce même spectacle qu’il revisitera 10 ans plus tard à l’occasion des FrancoFolies de Montréal, avec les mêmes musiciens qu’à l’époque. L’équipe tente de rester le plus fidèle possible au spectacle original.
«Le concept est que je n’ai pas le droit de faire les chansons qui ont été écrites après la fin de la tournée de La forêt des mal-aimés, autour de 2007. Pour les arrangements, on risque de partir beaucoup de ce qu’on faisait à l’époque – ce sera drôle parce qu’y a des trucs qui ont vieilli. Mais ça va vraiment être un retour dans le temps, La forêt des mal-aimés qui n’a pas bougé.»
C’était le début d’une époque tout à fait étourdissante mais valorisante pour Pierre Lapointe. De sa première au Théâtre Corona en octobre 2004 jusqu’en 2007, le spectacle La forêt des mal-aimés a été présenté aux quatre coins du Québec plusieurs fois ainsi qu’en Europe. Le public était témoin de l’éclosion totale d’un artiste amoureux de la scène, assoiffé de ses possibilités et franchement bien entouré. Le spectacle et les chansons du disque La forêt des mal-aimés sont aux couleurs des musiciens qui entouraient Pierre Lapointe à l’époque.
«Tout ça s’est fait avec une personne du milieu trad (Josianne Hébert), une personne issue du rock (Philippe B, auparavant dans Gwenwed), une personne du monde expérimental (Guido Del Fabbro), une personne qui faisait plein d’affaires en pop (Philippe Brault) et moi, le chansonnier qui arrivait avec la tradition française. On était en tournée, on écoutait les disques que tout le monde apportait. Tout se mélangeait et j’écrivais très rapidement. Une chanson comme Nous n’irons pas, c’est un clin d’œil à ce que j’avais appris de la chanson trad. Ça n’aurait pas donné ça si Josianne n’avait pas été à côté de moi. Même chose pour les sonorités étranges, les échantillonnages qu’on a trouvés pour le spectacle, c’est vraiment Guiddo qui a amené ça. Donc La forêt des mal-aimés est vraiment devenu une pâte commune où tout le monde pouvait mettre son grain de sel.»
Sans hésiter, tous ces joueurs – qui ont tous aujourd’hui des carrières enviables dans le monde de la musique – ont accepté l’offre des FrancoFolies, un festival qui a toujours donné à Pierre Lapointe son terrain de jeu désiré. «Entre moi et les FrancoFolies, ce n’est pas juste une fidélité, c’est quasiment dangereux!, rigole-t-il. Ils m’ont aidé à réaliser mon but premier: faire de la scène. C’est ma grande force. J’ai toujours utilisé la scène comme une plateforme d’expérimentation pour comprendre mon métier de chansonnier.»
Mutantès, présenté à l’été 2008, est l’un des nombreux projets multidisciplinaires de la riche carrière de Pierre Lapointe. Il explique que les moyens offerts par le festival ont alors permis à ses acolytes (chorégraphes, scénographes, danseurs, par exemple) de briller sans le stress financier, ce qui est assez rare. «On a eu énormément d’argent pour ce spectacle-là, précise-t-il. On a eu la possibilité d’aller au bout. Pour Frédérick Gravel, le chorégraphe, c’était la première fois qu’il était payé autant. Avec ce genre d’opportunité aux FrancoFolies, je donnais la possibilité à d’autres créateurs de créer quelque chose à la hauteur de ce qu’on voulait.»
Pierre Lapointe a toujours été un pôle d’attraction pour les artistes de toute discipline, souhaitant présenter au public des collaborations inattendues, des événements uniques. Son éclat à Tout le monde en parle en avril, où il prônait la diversité culturelle à la télévision plutôt que d’y voir toujours les mêmes personnes, est en synthèse avec ce qu’il a accompli ces dernières années avec, entres autres, le sculpteur David Altmejd, le collectif d’art BGL, le photographe et vidéaste Pascal Grandmaison et plus récemment l’illustratrice Catherine Lepage, avec qui il a pondu un livre, Le tragique destin de Pépito. Avec ces collaborations, le chanteur met en lumière des artistes géniaux mais peu connus du grand public. Le chanteur souhaite que les gens découvrent ainsi leur travail et continuent de les suivre dans d’autres projets.
«J’ai toujours intégré des artistes en arts visuels, des chorégraphes, des metteurs en scène, des scénographes, des musiciens. Je m’arrange pour avoir des équipes. C’est des gens qui sont rendus très, très loin dans leur tête et dont le travail n’est pas diffusé. Moi, je leur laisse toujours une place de choix dans mes projets en leur laissant la possibilité de s’exprimer et d’aller là où ils veulent.»
Et c’est cet esprit d’équipe, si brûlant à l’époque du spectacle de La forêt des mal-aimés, avec lequel il renouera aux FrancoFolies.
En concert sur la grande scène extérieure Bell de la place des Festivals le 11 juin à 21h, dans le cadre des FrancoFolies de Montréal.
Pierre Lapointe sera également du spectacle de clôture Intemporelle, Diane Dufresne – Un temps pour elle à la Maison symphonique le 18 juin à 20h.
Au musée
Propos recueillis par Catherine Genest
Amoureux de l’art contemporain québécois, Pierre Lapointe est le porte-parole du pavillon Pierre Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec. De ses grands complices, quatre seront en vedette au MNBAQ dans le cadre de l’inauguration qui aura lieu le 24 juin à Québec. Il nous les présente.
David Altmejd
«Ensemble, on a fait un opéra contemporain [Conte crépusculaire] en collaboration avec Yannick Plamondon, qui est d’ailleurs en train d’écrire une œuvre pour l’ouverture du musée. […] C’est une de ses grandes installations qui est présentée au MNBAQ. David est, à mon avis, et je ne crois pas que beaucoup de gens vont me contredire, un des plus grands artistes qu’on a connus au Canada dans notre jeune histoire de l’art. C’est probablement l’un de ceux qui ont le plus de visibilité à l’international. […] Ce que j’ai toujours dit pour décrire le travail de David, c’est qu’il prend des matières très pauvres et très nobles en même temps comme des pierres, des animaux empaillés, des miroirs, du plastique ou du fil. Il fait des bijoux gigantesques à partir de ces matières-là et, pour l’avoir vu travailler de proche, c’est vraiment un don qu’il a pour animer la matière morte et la rendre vivante.»
BGL
«Je les ai découverts avec À l’abri des arbres au Musée d’art contemporain de Montréal, une installation qui était une espèce de labyrinthe. Je croyais que j’allais voir la plus grande mise en scène de ma vie au théâtre, en danse ou au cinéma et puis je l’ai vue dans un musée d’art contemporain! Ils travaillaient le thème du bois et moi j’étais en train de commencer à penser au show de La forêt des mal-aimés. Je leur ai demandé de travailler avec moi et ils m’ont suggéré de construire un plafond flottant comme dans un bureau administratif en plein milieu de la forêt. On a passé quatre jours à faire des photos sur le bord de la 20 dans une érablière pas très loin de Québec. […] Leur discours a, à mon avis, beaucoup de valeur, et ce n’est pas parce qu’ils se prennent la tête. Au contraire, c’est parce qu’ils sont drôles et rafraîchissants, et ça fait du bien dans le milieu de l’art contemporain d’avoir quelque chose de léger comme ça qui a autant de puissance et de cohérence.»
Il est vraiment curieux de constater la divergence énorme des points de vue sur Lapointe. Pour moi (et j’espère pour beaucoup d’autres), ce chanteur représente le comble de l’insignificance, il est tout à fait insupportable. Ses textes et sa musique sont une réelle torture pour le veritable esthète; il émane de lui un narcissisme, un arrivisme si évident et répugnant qu’on se demande comment les Québécois font pour l’endurer. Les français eux, malgré ses tentatives désespérées de leur infliger son « oeuvre », ont bien compris qu’il n’était qu’un artiste très mineur, surtout après qu’il ait carrément massacré de leurs nombreuses et magnifiques chansons. Honnètement, comment peut-on, par exemple, ne pas décrier la manière si mièvre qu’il a récupéré « C’est extra » de Ferré, qui a du se retourner dans sa tombe. Quiconque possèdant un minimum de goût et de culture doit immédiatement fermer la radio quand sévissent de telles chansons qui n’ont d’autres buts qu’une grossière auto-promotion.