Caravane: Voyage au bout de la nuit
Le businessman a son blues, idem pour le musicien. Deux ans après Chien noir, Caravane chante sa désillusion et ses peines, l’adrénaline qui tombe après l’euphorie des concerts endiablés.
Rue St-Joseph, 5h du matin. Dominic Pelletier termine son quart de travail au Cercle, les clients sont partis depuis deux heures, les verres de bières sont rangés, le comptoir épongé. Le soleil se lèvera dans quelques minutes et lui, le rockeur au cœur d’or, retournera dans son lit à moins qu’il ne prenne crayon et guitare pour immortaliser ce qu’il vient d’observer. Avec Fuego, le compositeur, parolier et vocaliste de Caravane puise ses idées dans les bars basse-vilains. Une source inépuisable d’histoires, de scènes d’amour et de rupture. « Deux ou trois fois par semaine, je sors de la job, je regarde les lumières autour de moi et me laisse inspirer. […] Y’a vraiment une effervescence, je trouve, dans St-Roch en ce moment. C’est cool, y’a beaucoup d’artistes et on se côtoie tous au Cercle. Les gars de Fjord, de Men I Trust… On se voit toutes les semaines et on se parle. »
Ce nouveau disque, et particulièrement la sombre Midtown Blues, témoigne aussi de leur quotidien décalé, celui des petites vedettes en proie aux hauts et aux bas vertigineux. « C’est fou la double vie, ça n’a aucun sens, confie Dominic. Quand je travaillais à la quincaillerie, je trouvais ça fucké. Je pouvais faire un show devant 1000 personnes le samedi soir, avec plein de monde qui trippe, et le lendemain je faisais un 8 à 5 sous les néons en vendant des vis et des planches de deux par quatre. […] Le plus bizarre, c’est quand je m’entendais chanter dans les speakers de la radio. »
C’est aux côtés de Guillaume Beauregard de Vulgaires Machins, réalisateur et ami, que le leader du groupe a peaufiner sa prose. Un regard extérieur qui l’a nourri, l’a poussé à se dépasser comme auteur. « Il nous a fait mettre beaucoup de temps sur les paroles. Nos textes se sont vrai ment améliorés avec lui. Il avait aussi des idées musicales des fois. C’est un bon mélodiste. »
Extrait de Fièvre : « Je veux être le refrain qui t’obsède, le beat qui te possède. »
Encore et toujours, parce que certaines choses ne changent pas, le groupe s’est affairé à livrer un bouquet de petites bombes pop rock fédératrices, vouées aux ondes hertziennes. La pop, Raphaël Potvin (bras droit de Dominic) aime ça pour vrai. Leur maison disque, Ste-4 Musique, n’a même pas besoin de leur commander des extraits radios : ça leur vient instinctivement. « On en fait volontairement, on n’est pas le genre de band à qui on doit enfoncer des singles dans le fond de la gorge. […] Nous, on est des gros fans de bands qui ont des bons hooks. N’importe qui, que tu sois sur un chantier de construction ou une chick, va avoir envie de chanter nos chansons. »
Après dix ans du punk assez incisif avec The Hunters, une longue période à renier leurs vrais goûts musicaux, Dominic, Raphaël et les autres sortent du moule qu’ils se sont eux-mêmes imposés toute leur jeunesse durant. Une rédemption.
Fuego, disponible le 30 septembre (Ste-4 Musique)
Lancements le 4 octobre à 17h au Ritz PDB (Montréal) et le 5 octobre à 17h au Cercle (Québec)