Musique

Ghostly Kisses : Brumeuses chimères

Margaux Sauvé libère trois nouvelles chansons en plus des singles déjà consacrés en ligne sur ce premier EP très attendu.

La demi-douzaine de plages appelle au rêve, nous connecte directement au cœur de la désormais seule capitaine à bord de Ghostly KissesWhat You See s’impose comme un acte d’indépendance. La prise en charge du gouvernail, la fin d’un secret de polichinelle pour la polyvalente musicienne. « Ça a toujours pas mal été mon projet. C’est juste que lorsque j’ai approché Dragos [Chiriac] pour la première fois, on était super excités à l’idée de travailler ensemble et sur le coup, il m’a dit « on est un duo! ». Finalement, on est toujours restés comme des collaborateurs et, en définitive, on s’entend sur le fait que c’est né de mon initiative. Ghostly Kisses, c’est moi. Les deux, on le savait. » Épaulée, encouragée et ultimement sécurisée par le producteur, Margaux Sauvé est maintenant prête à porter le poétique pseudonyme toute seule – exploit qu’elle n’aurait jamais cru possible il y a seulement deux ans. Avant ça, la violoniste cachait sa voix spectrale, gorgée d’air, derrière son instrument.

Margaux Sauvé alias Ghostly Kisses (Crédit: Sam St-Onge)
Margaux Sauvé alias Ghostly Kisses (Crédit: Sam St-Onge)

Qu’il y ait un label ou pas, je vais toujours continuer à faire de la musique.

Garden, pièce inédite jusqu’ici, marque un retour à la source. Une ligne directrice qui l’a guidée dans l’enregistrement, le choix des arrangements de la seconde moitié de son maxi. « Les six chansons représentent bien les différents volets [du projet] et, justement, c’était important pour moi de mettre des cordes sur le EP. C’était mon idée au départ, mais on dirait que je l’avais mise de côté pour explorer autre chose. Là, je suis revenue à la base. » Gabriel Desjardins alias La Controverse (complice de Philippe Brach notamment) signe l’orchestration de ces passages organiques et oniriques qui, presque étonnamment, ne détonnent pas dans l’emballage synthétique. « On était un quatuor et j’ai joué l’un des deux violons. Il y avait un autre violoniste, mon ancien enseignant Brett Molzan, l’altiste Issac Chalk et le violoncelliste Ryan Molzan avec moi. C’est vraiment des pros. Il y en a deux qui font partie du Quatuor Arthur LeBlanc et il y en a un qui est dans Les Violons du Roy. […] Moi j’avais déjà un peu écrit les cordes et j’ai envoyé ça à Gab. Lui, après, il a écrit les partitions pour les quatre. Il a vraiment structuré ça. » Ensemble, les quatre hommes eux ont brodé de la dentelle autour des chansons déjà délicates de la compositrice.

Triste pop

Margaux Sauvé se fait funambule, équilibriste, sur la fine ligne entre le vrai et le faux. En plus des violons, le piano y côtoie les claviers aux tonalités générées par des plug-ins et de la façon la plus naturelle qui soit. On l’entendait déjà sur Such Words, mais c’est encore plus évident sur le morceau homonyme. « What You See, c’est la seule chanson du EP qui est complètement organique, c’est-à-dire qu’il n’y a aucun son électronique, aucun son qui vient de l’ordinateur. […] [Ce EP] est le premier chapitre de Ghostly Kisses, une phase exploratoire et là on dirait que je me sens plus prête à aller vers un album complet. C’est certain qu’il va avoir plus d’instruments organiques, comme va avoir d’autres sons électroniques. »

Ce qui n’a jamais changé, en tout cas, c’est cette façon qu’elle a de rédiger en grattant là où ça fait mal, en puisant dans les recoins les plus sombres de son cœur. « Le défi que je me donne, c’est de composer quelque chose que je vais vraiment ressentir [même] quand je me sens bien. C’est difficile d’écrire quelque chose de joyeux! Pour l’instant, le moteur de création ça a beaucoup été les moments où je me sentais plus mélancolique, plus triste. Je suis une personne qui rêvasse beaucoup. J’ai réalisé que j’étais souvent dans mes pensées, mais là je les mets sur papier. »

Une forte dose d’émotivité qu’elle s’efforce de livrer sur scène et dans une formule dépouillées de séquences. Des concerts acoustiques, intimistes, comme autant de sauts sans filets.

What You See (Indépendant)
Disponible le 24 mars

Montréal: vendredi 31 mars 2017 au Matahari Loft
Québec: vendredi 7 avril 2017 au MNBAQ Espace Nord

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