C’est le calme plat lors de mon passage dans les bureaux de l’Orchestre symphonique de Montréal, au lendemain de la tempête médiatique déclenchée par l’annonce du départ de son directeur musical Kent Nagano à la fin de son mandat, en 2020. La directrice de la programmation musicale, Marianne Perron, commente: «Je suis arrivée à l’OSM en 1999, alors que Charles Dutoit était toujours en poste, et donc pour moi ce ne sera pas la première transition. Il y a encore bien des projets à développer avec Kent Nagano, et ce n’est que dans trois ans, alors ça nous laisse encore trois belles saisons.» Ajoutons que le contexte du départ est bien différent!
Parmi les souvenirs que laissera derrière lui le maestro, il y a celui de la création de la Virée classique, cette grande fête de la musique qui en est à sa sixième édition. Une célébration pour laquelle l’Orchestre n’hésite pas à se mettre de côté. Marianne Perron explique: «L’Orchestre compte des musiciens qui sont aussi des solistes, des chambristes, et nous aimons profiter de cette occasion pour le faire découvrir au public. Et puis, c’est vrai que c’est essentiellement une célébration de la musique classique, mais il y a une thématique particulière cette année en raison du 50e anniversaire d’Expo 67. Nous célébrons le Festival mondial des arts, un événement qui a permis aux gens de découvrir les musiques du monde, le jazz, et aussi des musiques innovantes. De plus, c’est un événement durant lequel on a donné de la place aux artistes émergents, à la jeunesse.» L’OSM le fait aussi, en invitant plusieurs des lauréats du Concours OSM Manuvie, par exemple.
Trois concerts saluent spécifiquement le 50e anniversaire de l’Expo: celui de la pianiste Lorraine Desmarais, qui rend hommage en solo à Brubeck, Ellington et Monk; les concerts Place à la relève du Complexe Desjardins, et le concert électroacoustique Voyage dans le temps. Ce dernier fera entendre des œuvres de Xenakis, Gilles Tremblay, Otto Joachim, Francis Dhomont et, en reprise, l’œuvre acousmatique commandée l’année dernière par l’OSM à Robert Normandeau, qui procédera à la spatialisation des pièces au programme. Marianne Perron précise: «Je dirais que c’est presque l’ensemble de la Virée qui reflète cette célébration du Festival mondial des arts. Il y a les musiques du monde, avec le concert des griots, et celui sur la musique iranienne. Il y a aussi des concerts à thématique nationale comme celui consacré à l’Asie, avec la soprano Sumi Jo, ou celui qui salue la France, avec le pianiste Jean-Philippe Collard interprétant Ravel. Au même programme, les gens qui veulent découvrir la musique classique pourront le faire avec L’apprenti sorcier, de Dukas.»
Pour ce qui est d’une introduction à la musique classique, il faudra surtout aller à la rencontre du chef assistant de l’OSM, Adam Johnson, qui donnera une présentation du fonctionnement de l’Orchestre. Il est arrivé en poste en septembre 2016, après le mandat de Dina Gilbert (qui vient d’être nommée directrice de l’orchestre symphonique de Kamloops, en Colombie-Britannique). «Dans la Virée, explique-t-il, je vais démystifier le fonctionnement de l’Orchestre, montrer comment on fait pour arriver à interpréter une œuvre tous ensemble, ce que c’est que de lire la musique, et aussi le rôle du chef d’orchestre, etc. Je vais aussi préparer André Robitaille pour son rôle de narrateur dans Pierre et le loup (Prokofiev), et Patrice Robitaille pour L’histoire du soldat (Stravinsky).» Autre clin d’œil au Festival mondial des arts de 1967, le danseur Étienne Gagnon-Delorme concevra une chorégraphie pour l’œuvre de Stravinsky, qui deviendra donc un grand spectacle incorporant le théâtre, la danse et la musique.
L’opéra n’est pas laissé de côté, ni même le cinéma, puisqu’une nouvelle collaboration avec le Metropolitan Opera permettra la projection d’une version de 2014 du Barbier de Séville (Rossini), qui animera l’esplanade de la Place des Arts; idem pour la comédie musicale West Side Story (Bernstein). Il y a aussi le grand concert d’ouverture – gratuit – au Parc olympique dans Hochelaga-Maisonneuve, avec une version adaptée de Porgy and Bess (Gershwin) et les voix de Marie-Josée Lord et de Gardy Fury, entre autres. Et puis tout ça se terminera dans l’apothéose de l’Ode à la joie de la Neuvième de Beethoven, chantée par plusieurs chœurs amateurs accompagnés par le Grand Orgue Pierre-Béique.
La Virée classique est toujours un succès populaire, avec sa trentaine de concerts et ses activités gratuites, et c’est une tradition qui pourrait bien rester à Montréal après 2020 comme un important legs du passage de Kent Nagano à la barre de l’Orchestre.
Du 10 au 13 août
vireeclassique.osm.ca