Piknic Électronik anime nos dimanches d’été depuis 15 ans déjà. Des 217 premiers «pik-niqueurs» qui se sont retrouvés sous le stabile de Calder au parc Jean-Drapeau le 23 juin 2003, ils sont aujourd’hui plus de 6000 à participer hebdomadairement à l’incontournable danse dominicale. Créé par quatre fans de musique techno simplement pour passer un bon moment avec leurs amis, ce qui se voulait au départ un petit rendez-vous bucolique est devenu une véritable machine à danser dont les ramifications s’étendent aux quatre coins du monde. «Vers la fin des années 1990, début 2000, c’était l’explosion de la scène électro et de sa commercialisation aussi. Tu avais 514 et tous les autres qui se disputaient les plus grosses parts du gâteau, les after-hours se sont multipliés ainsi que les gros événements mensuels. C’est vite devenu redondant, donc on s’est dit que ce serait intéressant de changer un peu l’ADN de ce milieu de la musique électronique», se souvient Nicolas Cournoyer, cofondateur de l’événement en compagnie de Michel Quintal, Pascal Lefebvre et Louis-David Loyer. «C’était l’époque où on pouvait encore fumer dans les bars ou les afters. C’était assez glauque parfois. L’atmosphère dans ces soirées était à l’origine plutôt positive, les gens étaient respectueux, ils prônaient l’inclusion, ils étaient là pour avoir du plaisir et quiconque était le bienvenu. On voulait revenir à ça, retrouver l’esprit de communion qu’on avait perdu, rendre cette musique-là plus accessible. Et quand on a commencé Piknic Électronik, c’était avec cet objectif d’une part, et d’autre part c’était de faire rayonner et mettre en valeur les talents locaux dans un tout autre contexte. On voulait aussi faire ça pour les gens qui avaient des enfants ou des emplois du temps qui ne leur permettaient plus de sortir jusqu’au petit matin. C’est comme ça qu’on a présenté le projet au parc Jean-Drapeau, en leur montrant qu’on ne voulait pas être l’après-party des autres après partys et se ramasser avec une atmosphère moins saine», poursuit le cofondateur de l’événement estival. «On faisait pas mal tout à quatre au début. Nos amis aidaient, puis on s’est mis à faire du recrutement vers les années 2007-2008. Aujourd’hui je dirais qu’on doit en tout être environ 500 personnes qui travaillent sur l’événement. Sécurité, bars, entretien, équipe technique… ça fait du monde!»
Démocratiser la fête
Si les fondateurs de Piknic Électronik se targuent d’avoir contribué à démocratiser la musique électro et d’avoir donné une superbe tribune aux artistes locaux, ils peuvent aussi se féliciter d’avoir fait découvrir le parc Jean-Drapeau à bien des Montréalais. «En 2003, à part le Grand Prix, le Vans Warped Tour et La Ronde, il ne se passait pas grand-chose là. On a montré aux gens qu’à 10 minutes de métro, tu te retrouves dans un des plus beaux parcs de l’île, avec une des plus belles vues de la ville, et que tu peux danser et relaxer. Depuis, on a vu défiler Les Week-ends du monde, Osheaga, ÎleSoniq et plein d’autres événements», souligne Nicolas Cournoyer. «On est devenu un incontournable de la vie culturelle montréalaise. Maintenant, on parle de l’événement dans les guides touristiques. On en est très fiers. Mais cette vibe qu’on retrouve à Piknic, ce n’est pas nous qui en sommes entièrement responsables, c’est surtout le public, ces gens qui viennent d’ici et d’ailleurs, de toutes les origines et orientations, de tous les âges et horizons, de toutes les classes sociales et de tous les styles… C’est un microcosme de la société montréalaise qui reflète l’ouverture de cette ville. Y’a pas de violence, pas de tensions, les gens sont là avec un esprit positif».
Expansion internationale
Michel Quintal ayant depuis quitté l’organisation, c’est le collectif Mishmash d’Alexandre Taillefer qui s’est associé aux trois autres cofondateurs, donnant un appui financier considérable aux ambitions du groupe qui cherche depuis quelques années à implanter ses projets dans plusieurs villes autour du monde. «On veut créer une famille, développer Piknic, qu’il vieillisse bien, que Montréal et le Québec soient bien représentés à l’étranger, autant dans l’organisation que dans les artistes. On met beaucoup d’effort là-dessus depuis deux ans», détaille Nicolas Cournoyer qui admet du même souffle que ce n’est pas facile. «On doit trouver le bon partenariat dans chaque ville pour pouvoir mener ça à terme selon la ligne directrice de Piknic. On devait en démarrer un à L.A. cette année, mais ça ira probablement à l’été prochain. On est en discussion avec le Japon, la Chine, d’autres villes aux États-Unis, avec Paris depuis plusieurs années… Là, on est à Dubaï, Santiago et Melbourne. Ce n’est pas évident de trouver le lieu adéquat, les bonnes personnes, un modèle d’affaires qui corresponde. L’objectif est d’étendre l’événement dans une dizaine de villes d’ici cinq ans».
Petit Piknic deviendra grand
Si la date d’anniversaire de Piknic Électronik tombait à la fin juin, l’organisation a préféré attendre le bon moment avant de souligner l’événement. «On voulait célébrer à la bonne date, mais comme le début de l’été était incertain et que ça tombe en plus durant les fêtes de la St-Jean, on a préféré attendre. Aussi, on voulait apprivoiser le nouveau site avant de se lancer dans la célébration de nos 15 ans», précise Nicolas Cournoyer. En effet, Piknic, qui a toujours eu cours sous l’emblématique Homme de Calder, a dû changer de lieu suite aux travaux de réaménagement entrepris par la Ville de Montréal au printemps et qui devraient durer encore un an ou deux. «On était très craintifs pour ce changement de lieu. Au Calder, on avait non seulement cette œuvre immense, mais une vue imprenable sur la ville. On a travaillé fort pour trouver le lieu idéal, le transformer avec un plancher de danse, le côté champêtre et bucolique avec des tables, des chaises, des lampions… Et en plus, on a encore une belle vue sur Montréal et le pont Jacques-Cartier», se réjouit celui qui est aussi cofondateur d’Igloofest, le petit frère hivernal de Piknic. «On s’est rendu compte qu’en déménageant, on a donné une sorte de renaissance à Piknic parce que le site est différent, ça circule mieux, y’a plus d’espace pour chiller, pique-niquer et surtout tu peux bien mieux voir la scène et être plus dans le show qu’à l’ancienne place qui débordait dès qu’il y avait un peu de monde. L’énergie passe bien mieux. Depuis juillet, on fait en moyenne 6000 à 7000 entrées et on est même montés à 9000 pour Chus & Ceballos. Là, on a le problème contraire je dirais. Ce site a beaucoup trop d’avantages… Ce qui est certain, c’est qu’on est là pour un an ou deux encore. On verra si on retourne au Calder ensuite, selon ce que la Ville aura fait comme travaux d’aménagement», glisse Cournoyer. «Depuis 3 ans, on fait environ 100 000 entrées par saison. Le nouveau site nous permet d’accueillir plus de monde de façon plus confortable et nous amène ailleurs. On ne fera pas 20 000 personnes par dimanche, mais ça nous permet de croire qu’on va pouvoir progresser encore. Il y a beaucoup plus de potentiel et ça devrait nous permettre de présenter d’autres événements et différentes thématiques».
Que la fête commence
Le party d’anniversaire de Piknic Électronik se déclinera donc en quatre actes ce week-end: trois grandes messes au parc Jean-Drapeau avec entre autres la toujours fort appréciée Misstress Barbara et la Britannique Nicole Moudaber, ainsi qu’une parade en ville. «Puisqu’il y a avait déjà l’Électro Parade de prévue (samedi le 2 septembre) et à laquelle nous participons, nous avons pensé que le week-end de la fête du Travail était plus approprié pour célébrer», explique Nicolas. «Comme on a toujours présenté un Piknic le dimanche et un autre le lundi lors de ce long week-end, on a ajouté le vendredi avec nul autre que Sébastien Léger pour un set de trois heures. De tous les artistes qu’on a reçus au fil des ans, c’est un de nos préférés. Il propose des sets de qualité, le fun, de la musique groovy, joyeuse, qui te fait voyager, mais toujours en dansant. Et si tu achètes ton billet à l’avance, le prix d’entrée sera de 5$, comme dans le temps!»