Musique

La combustion lente de Maude Audet

La chanteuse et musicienne folk rock Maude Audet s’entoure bien sur ce troisième disque plus personnel, Comme une odeur de déclin.

«On voit parfois des artistes qui ont un gros succès et ensuite, ça fait un feu de paille. Personnellement, je préfère que ça prenne du temps, que les gens me découvrent plus lentement, mais qu’ils se tannent moins vite.»

Maude Audet a un beau succès d’estime depuis quelques années, et la voici dans un nouveau chapitre de sa carrière qui pourrait la mener loin. Entre deux contrats en scénographie dans la Vieille Capitale, elle a lancé Le temps inventé en 2013, puis Nous sommes le feu en 2015. Des liens avec l’influente étiquette de disques Grosse Boîte se sont alors formés alors qu’elle signait un contrat en booking et que ce deuxième disque sortait sur son label sœur, Sainte Cécile. Aujourd’hui, ce fort beau troisième disque de chanson folk, de rock et de grunge, Comme une odeur de déclin, paraît au catalogue de Grosse Boîte.

«Y a rien qui arrive pour rien, lance-t-elle en entrevue. Y a trois ans, je trouvais ça très long de ne pas être signée avec personne. Mais j’ai jamais été négative par rapport à ça. L’envie de continuer était plus forte que la déception que ma carrière ne marchait pas tant.» Cette attitude a porté fruit puisque le petit succès de son deuxième album – sa diffusion sur les radios satellites, entre autres – lui aura permis de vivre de musique et de produire Comme une odeur de déclin.

Maude Audet voulait une femme aux commandes de son troisième album. L’heureuse élue, Ariane Moffatt, signe d’ailleurs ici sa première réalisation de disque. On applaudit cette initiative trop peu commune. «D’avoir suivi plusieurs étapes de sa carrière, je sentais qu’elle pourrait comprendre qui j’étais. On a le même âge. J’aimais qu’on ne soit pas pareilles. Je ne voulais pas faire ce qu’elle fait non plus.»

photo : Antoine Bordeleau
photo : Antoine Bordeleau

Si la chanteuse, qui habite maintenant Longueuil avec sa famille, s’entoure de musiciens connus sur ce nouveau disque – Marie-Pierre Arthur et Joe Grass, par exemple –, ce n’est certainement pas pour crier au loup. «J’ai pas choisi ces gens-là en me disant: “Ah! je vais faire un album qui coûte cher!” J’ai hésité à demander à Ariane parce que je voulais pas être racoleuse, la fille qui se colle aux autres pour profiter de leur succès. Quand j’ai commencé à collaborer avec elle, j’avais fait beaucoup de shows solo et je n’avais plus vraiment de band. Elle m’a dit: “Avec ces musiciens-là, ce serait vraiment l’fun.” Ce sont des gens qui ont des agendas très remplis, mais heureusement, ils étaient disponibles pour nos dates en studio.»

Maude Audet signe avec Antoine Corriveau un magnifique duo, Dans le ruisseau. La voix ténébreuse du chanteur arrive en écho aux doux mots de la compositrice. «C’est une chanson sur le deuil et ça se prêtait vraiment bien à un duo parce que le narrateur est dans le souvenir et il y a la voix fantomatique qui lui répond. Antoine est le premier à qui on a pensé puisque ça colle bien avec ce qu’il fait.»

Comme une odeur de déclin reste dans les cordes des deux premiers albums, dans sa douceur folk et ses éclats grunge, tout en démontrant une évolution avec un côté classique, par exemple. «Je trouve ça important de rester moi-même, mais de décoller un peu de ma zone de confort, sans faire complètement différent», précise la chanteuse, avant de mentionner l’apport de l’auteure Erika Soucy aux textes. «Elle a fait ses études au Conservatoire comme moi. On vient du milieu du théâtre et on s’était croisées. J’ai toujours aimé ce qu’elle écrivait. Ç’a été ma première lectrice. Je ne voulais pas coécrire, mais je voulais quelqu’un qui allait avoir un second regard pour retravailler certains passages et pousser un peu plus loin certaines idées.»

«Erika m’a fait réaliser que la plupart des chansons cette fois-ci sont écrites au “tu”, poursuit Maude Audet. Sur mon précédent disque, c’était beaucoup le “on” collectif. Si y a une chose qui diffère des autres albums, c’est que cette fois-ci, je voulais ça plus intimiste, quelque chose de plus personnel.»

Quelques titres de Comme une odeur de déclin prônent l’amour et le couple avec grande sensibilité. En concert à Montréal récemment, Maude Audet disait trouver important de parler du couple même si ce n’est pas un sujet bien cool par les temps qui courent. «C’est pas à la mode être en couple en ce moment, dit-elle. Je comprends que c’est très attrayant, le fait d’être célibataire et libre, mais pour moi, être en couple depuis 15 ans et avoir une famille, c’est pas facile, mais y a vraiment quelque chose de beau et de profond quand on se retrouve avec quelqu’un en qui on croit. Je trouve que ça mérite de ne pas être laissé de côté.»

En concert cet automne en solo ou en trio, dont un arrêt au Club Soda le 4 novembre en première partie de Saratoga dans le cadre de Coup de cœur francophone.

Comme une odeur de déclin
(Grosse Boîte)
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