Ils sont cinq, n’ont même pas un album complet – le premier est prévu pour le début de 2018 -, n’ont pas l’âge d’entrer dans un bar aux États-Unis et pourtant, il sont bookés partout en Europe, autant dans les plus importants festivals que dans les grandes salles. Depuis sa formation en 2015, Shame est rapidement devenu l’un des groupes les plus en vue au Royaume-Uni. Un autre next big thing dont raffole la presse britannique et qui pourrait bien plonger aussi vite qu’il a été élevé direz-vous? C’est possible, sauf que cette fois-ci (ou cette fois encore), il faudra bien se ranger du côté des enthousiastes.
Shame a les références musicales, l’attitude, et juste assez de hargne et de classe pour s’immiscer – le temps aidant – dans la classe des Country Teasers, The Fall et autre Fat White Family, l’arrogance juvénile en bonus. «Les Fat Whites nous ont emmenés en tournée, ils ont été parmi les premiers à croire en nous», précise Charlie Steen, le jeune homme derrière le micro du combo londonien. «Ils trainaient dans le même pub que nous. On a eu de la chance de rencontrer ces gars, ainsi que des anciens des Ruts et de Stiff Little Fingers qui nous ont encouragés et prodigué de précieux conseils».
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S’ils ne passent désormais plus inaperçus en Angleterre, Shame est encore pratiquement inconnu en Amérique du Nord, où le groupe n’est venu qu’une seule fois, au gros cirque SXSW d’Austin. La bande a donc récemment entamé sa première tournée aux États-Unis avec deux concerts au Canada à la clé, dont un à M pour Montréal. Des grandes scènes de festivals européens, le groupe passe aux petits clubs du circuit nord-américain. Retour à la case départ et une belle occasion pour le public de saisir une formation en pleine montée dans l’ambiance intime de l’Esco. «Il n’y a pas si longtemps, on jouait dans ce genre de salles en Angleterre, et bien honnêtement, on préfère ça. On aime la proximité avec le public», se souvient le chanteur. Poli, affable, Charlie Steen n’a rien des airs de petit teigneux un peu dérangé qu’il se donne sur scène.
Révoluson
Formé il y aura bientôt trois ans, le groupe répète souvent à qui veut l’entendre, et peut-être par excès d’orgueil, qu’il est issu des quartiers sud de la capitale britannique. «Il y a réellement une différence entre le nord et le sud de Londres. Nous sommes vraiment fiers de provenir de cette partie de la ville. Il y a une scène musicale vibrante et beaucoup d’endroits cool pour jouer, un tout autre genre d’atmosphère». C’est au Queen’s Head de Brixton que Shame a pris forme, un pub et lieu de diffusion où les membres du groupe, qui se connaissent depuis des années, avaient l’habitude de se réunir. «Nous n’avions pas de plans précis autre que celui de diffuser un message, surtout politique ou social», résume celui qui ne cache pas son admiration pour l’art-punk incisif du groupe montréalais Ought.
Post-punk quelques fois acerbe et acide et d’autres fois beaucoup plus nuancé, la musique de Shame sert de véhicule (blindé à l’occasion) aux propos assassins et sarcastiques du chanteur Charlie Steen. Reconnu pour ses prises de position, le groupe déroge dans le paysage de l’indie rock mignon et de la tapisserie électro qui est la norme depuis plusieurs années. Idéalisme juvénile ou réelle lucidité? «Pour moi c’est impossible de contourner le sujet, particulièrement avec ce qui se passe au royaume de Theresa May depuis quelques années. Nos textes touchent tout le monde autour de nous, peu importe leurs opinions politiques. Il y a de plus en plus de groupes et d’artistes qui politisent leurs chansons et je trouve que c’est une très bonne chose. De toute façon, comment faire autrement! Je ne veux pas critiquer ce que font les autres, mais ça nous irrite de voir tous ces groupes ou artistes qui sont populaires et bénéficient d’une plate-forme incroyable pour diffuser des opinions et des idées censées, mais qui, à la place, ne font que des chansons cutes et insignifiantes. C’est leur responsabilité et ils ne la prennent pas!»
M pour Montréal se tient du 15 au 18 novembre. Shame y sera le 17 à minuit à l’Escogriffe
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