Ghostly Kisses : Entre rêves et réalité
Musique

Ghostly Kisses : Entre rêves et réalité

Margaux Sauvé repose sa voix basse et fantomatique sur The City Holds My Heart, une deuxième invitation musicale à l’enrobage organique et contrasté.

Élaborés et fignolés au cours de la dernière année, ces cinq morceaux se distancent de la tangente électronique et minimaliste de son prédécesseur What You See et misent plutôt sur des mélodies de piano magnétiques et des arrangements de cordes raffinés. Une recherche incessante de textures et de profondeurs pour Margaux, qui s’est concrétisée avec l’aide précieuse de Louis-Étienne Santais, de Fjord, en studio. «On a une très bonne communication dans la vie. On se feel vraiment. Ça se transmet bien dans notre musique. Toute l’émotion et la sensibilité que je veux transmettre, c’est amplifié parce que lui  aussi la ressent et veut la transmettre. On a discuté du projet pendant au moins un an avant de commencer de travailler concrètement sur des chansons. On était très connectés pour la suite. On avait pas besoin de se parler ; il savait où aller. Il y avait un non verbal qui était super facile.»

Se décrivant elle-même comme une personne «rêveuse» et «souvent dans ses pensées», l’auteure-compositrice à la plume introspective aime jouer avec la dualité des rêveries et des moments réels, cette mince ligne entre le vrai et le faux, qui évoque les relations compliquées et l’attachement à des lieux précis. «[Le titre du EP], c’est un peu une image, un endroit que j’aime beaucoup, mais où [deux personnes] ne peuvent cohabiter. Mon cœur va toujours être là, mais il faut qu’on se quitte. Personnellement, c’est une image avec plusieurs choses, dont la ville.»

Cette charge émotionnelle est palpable dans l’enveloppante et épique Spellbound et la jolie Héloïse avec ses segments de harpe feutrés, mais atteint sans doute son apogée avec Zombie, une reprise de la pièce emblématique du groupe rock irlandais The Cranberries, ébranlé par le décès tragique de sa chanteuse Dolores O’Riordan l’année dernière. Une forme d’hommage pour Margaux à cette artiste mythique des années 90 qui a façonné son esprit musical. «J’écoutais [The Cranberries] quand j’étais jeune et ça m’avait toujours marqué à quel point le style de musique était rough et tu avais cette chanteuse qui avait cette féminité et cette douceur. Quand elle est décédée, ça m’a replongé dans cette période. L’événement est aussi arrivé à un moment où on se posait beaucoup de questions [dans la création du EP]. La même semaine, j’avais un show à Québec et on a décidé de faire la chanson en cover en fin de spectacle, en guise d’hommage. La réaction des gens était folle. Ça a vraiment été un moment intense auquel je m’attendais pas. Les gens m’en ont reparlé après. Ce genre de truc ça rassemble, ça crée un moment de partage et j’avais envie d’aller au bout de cette idée.»

Ouvrir des portes

Celle qui a envoûté les oreilles en cumulant huit millions d’écoutes sur Spotify depuis 2017 (de manière totalement indépendante, soit dit en passant) n’a d’ailleurs pas encore été signé par une maison de disque, mais soutient que ce rayonnement lui a permis de se faire des «alliés» et des contacts dans le milieu. «Je me suis fait approcher. Pour être franche, ce ne sont pas des opportunités que je m’empresse absolument de saisir, explique-t-elle. C’est le genre de chose qui grossit rapidement et, à un moment donné, il va avoir de quoi qui va arriver, quand ce sera la bonne collaboration. Mais je ne suis pas pressée à m’associer avec n’importe qui. C’est important de prendre son temps.»

Crédit: Jerry Pigeon
Crédit: Jerry Pigeon

Je ne suis pas pressée à m’associer avec n’importe qui. C’est important de prendre son temps.

Margaux Sauvé

De toute manière, Margaux n’a pas le temps de penser trop longtemps aux questions contractuelles. Au-delà de la préparation du nouveau spectacle avec un groupe complet et de la trame sonore de Rotterdam au Théâtre de la Bordée en compagnie de Samuel Wagner (Harfang, Floes), il y a surtout un nouveau et troisième EP qui se profile à l’horizon, quelque part en septembre 2019. Un deuxième volet à cet élan de compositions, qui aurait pu voir initialement le jour dans un premier long-jeu. «Nous étions rendus à huit chansons. […] J’avais le goût de continuer à partager de la musique tout de suite. Il y avait une évolution dans notre travail. Je sentais que j’avais envie d’y aller plus graduellement. Il ne faut pas se le cacher : on est à l’ère des playlists, des singles alors je me voyais mal sortir un album complet en ce moment. J’aurais eu l’impression de lancer un album dans l’océan.»

The City Holds My Heart
(
Indépendant)
Disponible le 23 novembre

Mercredi 28 novembre
en formule 5 à 7

À L’Anti Bar et Spectacles (Québec)