KNLO : L’été est encore jeune
KNLO (né Akena Lohamba Okoko) puise à la source et se surpasse cet album écrit à la gloire du quartier si multiculturel de Québec qui l’a vu grandir.
Intitulé Sainte-Foy, le second long jeu officiel de KNLO s’est brainstormé dans la 800, «la bus» qui l’a conduit d’un point A à un point B toute sa vie durant. C’est précisément ce qu’il révèle sur À souhait, ce qu’il compte inscrire sur les t-shirts promotionnels qu’il fera bientôt imprimer pour les vendre à la table de marchandises de ses spectacles solo. Québec, sa banlieue pas si cossue et son campus universitaire, teinte toutes les pistes de ce disque franchement tonique et, surtout, écrit par un gars de la place, un fils d’immigrant. «Je suis rendu au stade où mon père sait que je fais de la musique, t’sais. C’est comme un step. Globalement, les Africains, ils considèrent pas ça comme un job, ça n’a pas de valeur surtout dans un contexte chrétien. Ça n’a jamais été une option jusqu’à tout récemment, jusqu’à ce que mon père me voit à Radio-Canada, socialement acclamed, tout ça. Après, moi ça me pousse aussi à retourner plus vers ces roots-là, si tu vois ce que je veux dire. La musique africaine, soul, des Caraïbes…»
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Justement, l’album se clôt en trombe avec Ça fait mal, assurément la chanson la plus typiquement congolaise jamais composée par Okoko. «C’est une petite goutte, quoi. On peut toujours faire plus, mais pour pas trop étourdir les gens, on part d’où on est pour les emmener ailleurs.»
En mode Paul Choix
Qu’importe ce qu’il fait pour mettre du beurre sur son pain et nourrir ses p’tits poux au lait, KNLO est du genre à trimer dur, sans compter ses heures. L’une des thématiques les plus importantes de cet album, c’est vraiment l’effort, la valeur que le musicien accorde au travail. Usine, un manifeste anti-paresse, une chanson sur les tâches répétitives et aliénantes, comme une version 2019 de La vie d’factrie de Clémence Desrochers, donne le ton dès la première piste. «C’est important pour moi, c’est à la base de mon écriture, je te dirais. C’est probablement un des sujets principaux de l’album, la motivation à accéder à mieux, pour la famille. Pas le choix. Son prénom c’est Paul, son nom de famille c’est Choix. Ça c’est une joke de mon frère Asami, un rappeur lui aussi, mon conseiller de tous les instants. […] J’ai grindé dans tellement de jobs: commis d’entrepôt, cubicules, service à la clientèle, sondages, entretien ménager, livraison, déménagement, montage événementiel, machiniste sur appel, boulangerie, entrepôt du Métro, Pharmaprix, Jean Coutu, j’ai travaillé au Subway…»
Attends, mais est-ce que ça arrivait, des fois, que les gens te reconnaissaient pendant que tu faisais leur sous-marin? «Mais oui, souvent! C’est rendu normal. Je suis dans la classe où s’était normal. On était bénis de jamais avoir les lauriers faciles.» À 35 ans, KNLO cultive sa carrière avec la constance du jardinier. Le meilleur est à venir, il n’a pas encore, espère-t-il et comme on dit au basket, dans le sport, plafonné. «Non… It’s not that, yet! On est encore en train de se préparer pour faire les grandes choses. On cultive cet état d’esprit là. Pas le choix, par vigilance. À travers de ça, le chilling est un travail, aussi. Faut travailler sur soi-même pour let loose, pas toujours être en train de grind. Sinon, le grind va nous tous nous tuer. Faut rester disponible pour profiter du fruit quand il est prêt.»
«Je suis rendu au stade où mon père sait que je fais de la musique, t’sais.» – KNLO
Sainte-Foy revêt, à bien des égards, des airs de bilan. Sur Cool Cool, le rappeur du 418 livre ses mémoires en musique, de son premier concert sur l’île de Montréal en 2005 à ses faits d’armes avec Filligrann des WordUp! Battles, son acolyte au sein du collectif K6A. «Mais c’est impossible d’être exhaustif. Avec le parcours que j’ai, si je faisais une tune de shout out, il faudrait qu’elle dure deux heures de temps!»
Bonnes ondes seulement
La philosophie de KNLO, en gros, c’est de se dire que tout ira toujours pour le mieux, que tout finira toujours par bien aller, se régler en somme et malgré toutes les embûches. Ses mots sont toujours empreints de positivisme, de joie. «Y’a clairement des choses que j’écris et que je finis par enlever parce que c’est trop wicked, trop tordu même si les rimes sont bonnes. Je les trouve super fly, mais je les enlève. Je laisse ça aux autres.»
Sa façon d’aborder l’amour, justement, est dénuée de drama, mais franchement réaliste en même temps. Sur Merci Pt 2, le père de famille épanoui fait équipe avec Eman, son pote au sein d’Alaclair Ensemble, pour livrer une série de couplets vraiment tendres et en hommage à leurs blondes. Si le bonheur n’inspire pas grand monde, certainement pas une majorité de paroliers, Monsieur Craqnuques, pour sa part, en a fait son fonds de commerce. Et on en redemande.
Sainte-Foy
(Disques 7ième Ciel)
Disponible le 7 juin
6 juin
au Don B.Comber (Montréal)
7 juin
à Limoilou en musique (Québec)
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