Voyou : Repenser la pop franco
Musique

Voyou : Repenser la pop franco

On s’offre une petite causerie avec Thibaud Vanhooland alias Voyou dans la foulée de son passage au Festival d’été de Québec et au Ministère à Montréal. 

Voyou s’impose comme l’une des figures les plus prometteuses de la nouvelle chanson française. Comique et tendre à la fois, le Lillois d’origine aborde des thèmes courants (genre: les ruptures amoureuses ou l’écologie) d’un angle frais et avec un petit sourire en coin. Ses textes sont minutieusement travaillés, certes, mais la poésie et les images évocatrices qu’il trace avec sa plume ne lui suffisent pas! Vanhooland enrobe ses jolis mots de séquences rythmiques habiles, d’arrangements élaborés, voire exotiques, qui évoquent bien davantage le Brésil que le pays de Trenet. Personne, vraiment, ne joue dans sa talle. Sa proposition est totalement unique.


A/S/V, s’il te plaît?

29, homme, Paris, comme sur Messenger en 2001

Je sais que tu es originaire de Lille, tout au Nord, mais la bossa nova et la samba sont des influences majeures dans ton travail. D’où te vient cette fascination pour la musique brésilienne?

C’est vrai que la musique brésilienne m’inspire beaucoup, mais tout autant que m’inspire la musique colombienne ou cubaine pour cette région du monde, mais aussi les musiques d’un peu partout en Afrique ou au Moyen-Orient, la musique anglo-saxonne et la musique francophone. Mais le Brésil est un grand pays qui a toujours été très productif en musique, alors ça m’a pas mal accompagné dans ma vie.

 

Le premier instrument que tu as appris est la trompette, mais tu as aussi été bassiste au sein de trois groupes (Pégase, Elephanz, Rhum For Pauline) avant de te lancer en solo. Comment est-ce que ces expériences-là ont influencé l’artiste que tu es devenu?

La trompette, c’est un instrument que j’ai appris au conservatoire très jeune, ça allait avec tout un apprentissage assez théorique de la musique qui m’aide encore aujourd’hui. Vers mes 13 ans, ça a commencé à m’ennuyer de jouer la musique écrite sur des partitions, alors j’ai appris d’autres instruments pour pouvoir faire des groupes de rock et écrire des chansons. Une fois le bac en poche, j’ai commencé à tourner avec Rhum For Pauline, Elephanz et plus tard Pégase, ça a été un peu comme mes années d’études, de faire des tournées pour d’autres projets que le mien, à regarder comment les gens se débrouillaient avec le fait de parler au public, répondre à des entrevues, tout ça. Et puis musicalement, ça m’a aussi beaucoup apporté.

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Le vidéoclip que tu nous dévoiles aujourd’hui pour La serre vient vraiment mettre en emphase la thématique écolo des paroles. Comment est-ce que tu abordes la vie de tournée dans ce contexte-là?

La tournée, c’est à peu près le truc le moins écoresponsable du monde. On fait des heures de camion parfois d’avion pour une heure de concert, on a beau avoir des beaux discours dans nos chansons si on veut que les gens puissent les recevoir il faut faire tout ça, et je me rends bien compte de l’hypocrisie de la chose.  Du coup, on fait en sorte de réduire au maximum nos déchets, on a tous des gourdes sur la route, on se déplace avec nos propres gels douche plutôt que d’ouvrir des miniatures de savon chaque jour dans les hôtels, on demande des fruits et des légumes de saison dans les loges plutôt que des conneries sous plastique … Et après ce sont des choses de tous les jours, pour essayer d’être le plus responsable possible, mais je réponds quand même à cette interview avec un téléphone qui doit avoir l’empreinte carbone d’un décollage d’avion, tout en étant sur la route dans un camion pour aller faire un concert. 

 

Il y a quelque chose d’hyper tragique dans la mise en images, de très frontal en fait. On comprend tout de suite ce à quoi tu fais référence. Après, tu désamorces tout ça avec le plan de 2:32, ces fesses qui prennent ton visage en sandwich. On ne s’attendait pas à moins d’un gars qui grimace sur les photos au lieu de faire le beau, qui rivalise d’adresse sur After Affect pour le vidéoclip de Seul sur son tandem.

Mais as-tu l’impression, justement, que tu es un peu devenu prisonnier de cette image de gars comique?

Non pas vraiment, je suis comme ça dans ma vie en ce moment alors je suis comme ça dans mes visuels. Si demain je prends la grosse tête et que je me prends très au sérieux, peut-être que je ferai des photos hyper sérieuses et des clips au ralenti. Pour l’instant j’ai pas envie de prendre tout ça trop au sérieux, et finalement ça m’aide à continuer à avoir des rapports simples avec les gens que je croise sur les concerts. Ils ne vont pas avoir l’impression que je me place au-dessus d’eux et on va pouvoir parler comme des gens normaux, et ça c’est précieux. 

 

L’écrin visuel de ce que tu proposes est toujours un peu décalé et tes arrangements sont métissés, inventifs, carrément dans l’air du temps. Or, la base, les mélodies et les mots, s’inscrivent vraiment, selon moi, dans la tradition de la chanson française. As-tu ce souci de créer des morceaux intemporels qui vont survivre aux modes?

Je crois que je ne suis pas aussi cérébral quand je fais de la musique, j’essaye juste de rester fidèle à ce que j’ai dans la tête et à mes goûts, et d’essayer des nouvelles choses à chaque chanson. J’ai pas la prétention de me dire que je vais survivre aux modes et aux époques, je me rends compte que ce que je fais n’est pas complètement toujours raccord avec ce qui se fait autour de moi, et que ça plaise quand même à des gens de tous âges, ça me rassure et me conforte dans l’idée que je dois continuer à faire tout ce qui me passe par la tête! 

 

Ultimement, dans 50, 75 ou 100 ans, de quelle chanson de Voyou voudrais-tu que les gens se souviennent?  

Peut être le morceau Il neige, parce que je suis pas tout à fait certain qu’il y ait encore tant de neige que ça dans 100 ans, mais j’aimerais qu’on se rappelle l’effet que ça fait de la voir tomber.

Le 10 juillet à Place D’Youville
(Dans le cadre du Festival d’été de Québec)
Consultez la programmation complète dans notre calendrier

Le 11 juillet
Au Ministère (Montréal)
Consultez cet événement dans notre calendrier

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