Half Moon Run: vaincre la perfection
Musique

Half Moon Run: vaincre la perfection

Quatre ans après le succès de Sun Leads Me On, le quatuor montréalais nous présente A Blemish in the Great Light, un troisième album éclectique aux parfums indie-folk expérimental.

«J’ai tellement entendu ces chansons. J’avais hâte qu’elles sortent, nous avoue d’emblée le fort sympathique Isaac Symonds (chant, percussions, mandoline, clavier et guitare). On en est finalement arrivé à un point où on aime chaque morceau. On place la barre assez haut, alors si on aime l’album, d’autres l’aimeront également.»

Cette attention portée aux détails fait la renommée de Half Moon Run depuis ses débuts fracassants en 2012. La foi des fidèles a été mise à rude épreuve, eux qui ont dû patienter quatre longues années avant de pouvoir se délecter de la parole d’Isaac et de ses collègues Conner Molander, Devon Portielje et Dylan Phillips.

«Je pense qu’à l’avenir, on va partager plus de musique dans le feu de l’action, sous l’émotion du moment», dit le multi-instrumentiste. Il aura donc fallu un troisième album et quatre ans de gestation pour que le groupe envisage de délaisser son étiquette de perfectionniste au nom de la productivité. «C’est notre intention parce que c’est long quatre ans, mais on verra. C’est contre notre nature de ne pas entrer dans les détails.»

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Indescriptible

Décrire cet opus syncrétique s’avère un exercice périlleux, même pour ses créateurs. «Je peux donner une entrevue d’une heure pour en parler, mais le décrire en un mot? Impossible!», s’esclaffe Isaac candidement.

Chaque membre du groupe avait d’ailleurs une interprétation différente du titre de l’album lors de sa confection. «Pour moi, A Blemish in the Great Light, c’est cette idée que chacun a une conception de la vie idéale, sauf que c’est une impossibilité car rien dans ce monde n’est parfait. Il y a toujours une imperfection quelque part», nous lance-t-il, marqué d’une sage lucidité.

Des airs empreints de légèreté qui rappellent les ballades amoureuses des années 1970 (Yani’s Song, Jello on my Mind, Black Diamond) côtoient des pistes plus expérimentales comme Razorblade, une chanson de plus de sept minutes qui aurait pu être scindée en trois, où la simplicité guitare-voix laisse place aux synthétiseurs avant que la guitare électrique nous plonge dans un grunge planant. Le groupe se permet même une piste instrumentale de deux minutes, Undercurrents, qui ferait rougir les Jean-Michel Blais et Alexandra Stréliski de ce monde par la douceur de sa mélodie au piano.

L’opus se conclut sur New Truth, où des voix se superposent pour scander que la seule vérité est une vérité nouvelle. Il y a du Radiohead là-dedans, assurément.

Lancement 

Les Montréalais étaient conviés au lancement jeudi dernier au MTelus, un événement qui avait affiché complet en à peine 10 minutes. «Il y a une folie quand on joue à Montréal», nous lance Isaac, qui a élu domicile dans la métropole québécoise il y a 8 ans. «Je lève à peine le bras et on a droit à une réaction de la foule. Les gens sont complètement déjantés!»

Les mélomanes costumés le soir de l’Halloween n’ont pas été déçus, réagissant aux moindres faits et gestes du quatuor. Le moment fort de la soirée fut certainement l’interprétation acoustique de Sun Leads Me On, que chaque tête présente dans l’enceinte de cette salle mythique entonnait fièrement.

Lorsque je demande à Isaac quelle est donc la recette de ce succès montréalais (et maintenant mondial), il me remercie d’abord de qualifier le tout de succès, assumant pleinement son humilité ingénue, avant d’ajouter que le band n’a absolument rien changé à sa routine depuis son album initiateur de 2012, Dark Eyes. «On a rien fait de différent. On se rassemble dans une pièce, Dev se met à jouer un riff et tout le monde embarque. C’est drôle, on dit toujours qu’on a pas de recette miracle, mais c’est pas mal une recette, ça.»

Ce qu’il y a de certainement miraculeux avec Half Moon Run, c’est qu’Isaac n’avait de rockstar que la somptueuse suite de l’Hôtel W où nous l’avons rejoint dans le cadre de cet entretien. Une âme pure et accessible, heureuse de discuter de ce troisième album sans la moindre prétention.

halfmoonrun.com